Référé-liberté contre l’expulsion de personnes installées sur un campement dans le nord de Paris
Ce contentieux s’inscrit dans le contexte d’une politique systématique d’expulsion et de harcèlement visant des personnes exilées, souvent en demande d’asile mais sans proposition d’hébergement et ne bénéficiant d’aucune mesure de mise à l’abri, et donc condamnées à errer de campement en campement au gré des opérations d’évacuation décidées et réalisées illégalement par les autorités préfectorales.
Le Gisti et Utopia 56 sont intervenus volontairement au soutien d’une requête en référé liberté introduite au nom de 10 personnes, dont 8 de nationalité afghane, la plupart en demande d’asile, expulsés d’un campement situé sur un terrain en friche rue de la Marseillaise, dans le 19e arrondissement de Paris. La plupart d’entre elles avaient déjà fait l’objet d’opérations d’évacuation, dont la dernière en date, le 11 mai 2022, avait visé un campement situé à Pantin.
Le 22 juin 2022 au matin, les forces de l’ordre étaient intervenues sur le campement pour procéder à l’évacuation des lieux, officiellement présentée comme une opération de mise à l’abri. En réalité l’expulsion a été réalisée par la force et plusieurs dizaines de personnes n’ont pu monter dans les bus affrétés, faute de places d’hébergement effectivement disponibles. Elles se sont donc immédiatement réinstallées sur le campement, avant d’être contraintes par les forces de l’ordre à le quitter en abandonnant leurs affaires. Le même scénario s’est répété le lendemain.
Il était donc demandé au tribunal administratif de Paris de constater que le comportement des autorités était manifestement illégal et portait une atteinte grave à plusieurs libertés fondamentales. : car d’une part l’expulsion s’analysait en une exécution forcée illégale, d’autre part elle avait porté atteinte au droit à la protection du domicile, au droit au respect de la dignité et au droit de propriété, puisqu’ils n’avaient pu récupérer leurs biens.
Il était donc demandé au juge des référés d’enjoindre au préfet d’Ile-de-France, au préfet de police et à la mairie de Paris de faire immédiatement cesser les opérations d’expulsion et de destruction de bien mises en œuvre depuis le 22 juin 2022 sur le terrain en question, de faire cesser les opérations policières aux abords visant à empêcher la réinstallation des personnes expulsées sans qu’aucune solution de mise à l’abri ne leur soit proposée ou accessible et de dégager une solution de mise à l’abri et de relogement adaptée à la situation sociale des requérants.
Dans son ordonnance du 25 juin 2022 la juge a rejeté les conclusions de la requête. Elle a repris à son compte les affirmations des autorités préfectorales prétendant qu’il n’y avait pas eu expulsion mais mise à l’abri avec encadrement policier pour éviter des troubles éventuels, que l’ensemble des personnes présentes sur le terrain en litige, y compris les requérants, se sont vu proposer une solution d’hébergement et que les places de mise à l’abri n’avaient pas toutes été attribuées. Et dès lors que les requérants étaient des occupant sans droit ni titre, l’interdiction de s’y réinstaller n’a porté d’atteinte grave et manifestement illégale à aucun des droits évoqués dans la requête.
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