action collective
« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants »*
Ne laissons pas partir un charter pour Kaboul
Quelles que soient les incertitudes trompeuses affichées par ministère français de l’immigration, un « charter » d’expulsion est bel et bien prévu pour décoller de Londres le 18 novembre 2008, faire escale à Lille et à Bakou, avant d’arriver le lendemain à Kaboul.
Depuis plusieurs années, les Afghans n’étaient expulsés que dans de rares cas individuels, à l’exception de deux « vols groupés » en 2005, qui ne se sont pas reproduits depuis. Comme les milliers d’autres exilés de diverses nationalités - Irakiens, Erythréens, Soudanais, notamment - qui se sont succédé au fil des ans dans la région de Calais, ils étaient l’objet d’une sorte de marché tacite : les autorités fermaient les yeux sur leur présence à la condition que ces étrangers se rendent aussi invisibles que possible en attendant de glisser incognito chez nos voisins européens. Pour les contraindre à la dissimulation et à la fuite, les pouvoirs publics ont mis le prix : chasses à l’homme, refus de tout hébergement, accès minimaliste à la santé, complication maximale de la possibilité de solliciter l’asile. A ce comportement national, s’ajoute l’effet du Règlement européen « Dublin 2 » qui permet de renvoyer sans cesse les exilés dans des pays de l’UE où ils n’ont aucune chance ou presque de bénéficier d’une protection effective ou d’intégration. Résultats : d’une part, la dispersion des exilés sur un territoire de plus en plus vaste du nord-ouest de la France [1], dans des squats insalubres, des bois ou des trous de bombes de la Première Guerre mondiale ; et, d’autre part, malgré les contrôles aux frontières, la perpétuation des franchissement de la Mer du Nord et des errances innombrables à travers l’Europe.
Que s’est-il donc passé pour que les Afghans du Calaisis soient maintenant considérés comme expulsables, au moment même où leur pays connaît sa situation la plus dramatique (nombre de tués, notamment civils ; risques majeurs de famine) depuis la chute des talibans en 2001 ? Après la fermeture du camp de Sangatte en 2002, le gouvernement français n’a cessé d’affirmer que sa disparition entraînerait la fin de la migration des exilés. Sans doute vient-il de comprendre que les causes de leur venue en Europe sont si sérieuses qu’aucune politique dissuasive ne réussira à les convaincre de demeurer chez eux ? Au lieu de tirer de cette évidence des conclusions à la fois humaines et conformes aux droits fondamentaux, le voilà qui opte pour un degré supplémentaire de violence et d’illégalité.
A ce nouveau mépris des normes et des valeurs, de très nombreux individus et organisations ont rapidement opposé leur condamnation. Les Afghans enfermés dans le centre de rétention de Coquelles bénéficient d’une étroite collaboration de plusieurs d’entre elles. Les organisations signataires appellent à amplifier cette mobilisation contre le « charter » qui, s’il conduisait dans les jours à venir la cinquantaine de malheureux Afghans à Kaboul, ouvrirait la voie à une politique d’éloignement encore plus inadmissible que celle qui, chaque jour, arrache des dizaines d’étrangers à leur vie privée ou à la protection qui leur est due. Elles espèrent que le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) ne prêtera pas la main à la légitimation de ces expulsions, comme l’y invite le ministère de l’immigration dans le souci de couvrir une opération totalement arbitraire et d’échapper à la condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).
Organisations signataires :
Cimade, FSU, Gisti, Mrap, RESF et Terre d’Errance
[1] Lire sur ce point le rapport de la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA), publié en septembre 2008, « la loi des ’jungles’ : la situation des exilés dans le nord-ouest de la France », téléchargeable à http://cfda.rezo.net.
Voir notre dossier « Jungles, campements et camps d’exilés en France »
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