Demande de QPC pour faire reconnaître l’inconstitutionnalité de l’article 30-3 du code civil

Le Gisti et la LdH ont présenté des observations à l’appui d’une QPC que la première chambre civile de la cour de cassation, par quatre décisions rendues le 15 janvier 2025, a accepté de transmettre au Conseil constitutionnel.

La question est formulée ainsi :

  • L’article 30-3 du Code civil, tel qu’interprété par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, est-il contraire au principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel la perte de la qualité de Français par désuétude ne peut être constatée que par un jugement, en ce qu’il instaure une présomption irréfragable de perte de la nationalité française à l’expiration du délai cinquantenaire d’expatriation de l’ascendant, en l’absence de possession d’état de l’intéressé et de son ascendant durant ce délai ?

L’article 30-3 du code civil dispose : « Lorsqu’un individu réside ou a résidé habituellement à l’étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d’un demi-siècle, cet individu ne sera pas admis à faire la preuve qu’il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n’ont pas eu la possession d’état de Français ».

Cette disposition est massivement opposée aux descendants des personnes nées sur un territoire anciennement colonisé par la France qui avaient été maintenues, d’office ou à leur demande dans la nationalité française au moment des Indépendances, dans le cas où ces dernières n’ont pas résidé en France ni entretenu leur possession d’état de Français, par exemple en demandant le renouvellement de leur carte d’identité ou de leur passeports français, pendant les cinquante années qui sont suivi l’Indépendance.

Leurs enfants et petits-enfants se voient ainsi déclarés « irrecevables à faire la preuve de leur nationalité » dans le cadre de leurs demandes de certificat de nationalité ou des actions déclaratoires de nationalité prévues à l’article 29-3 du code civil aux termes duquel « Toute personne a le droit d’agir pour faire décider qu’elle a [ou qu’elle n’a point] la qualité de Français ».

La jurisprudence vise une « présomption irréfragable de perte de la nationalité » rendant impossible la preuve contraire, alors même que cette perte de la nationalité est le plus souvent survenue sans que les intéressés n’en soient informés.

Par sa décision du 11 avril 2025 le Conseil constitutionnel a rejeté la QPC. Il a notamment opposé aux arguments qui lui étaient soumis :

  • qu’« en mettant fin à cette transmission [de la nationalité] lorsque la nationalité est dépourvue de toute effectivité, [le législateur] a poursuivi un but d’intérêt général »,
  • que les dispositions contestées « poursuivent l’objectif de valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice » ;
  • qu’il « résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que les dispositions contestées ne peuvent être opposées à des enfants mineurs au jour de l’introduction de l’action déclaratoire si elles ne l’ont pas préalablement été à leur ascendant. »
Cour de cassation 8 janvier 2025
Observations LdH et Gisti
CC 11 avril 2025

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Dernier ajout : mardi 15 avril 2025, 17:40
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