Article extrait du Plein droit n° 1, octobre 1987
« Immigrés : la dérive de l’État de droit »

Obstacles à la scolarisation des enfants d’immigrés

La rentrée scolaire donne bien souvent lieu, dans certaines mairies, à des mesures discriminatoires pour l’inscription scolaire des enfants étrangers. Déjà en 1983 et 1984, la Mairie de Paris s’était illustrée en interdisant l’inscription en école maternelle et l’accès aux crèches municipales des enfants dont « la famille ne justifie pas d’un séjour régulier ». La circulaire du 16 juillet 1984, publiée à la suite de nombreuses protestations, venait mettre un terme, du moins sur le plan des textes, à de telles illégalités. Divers échos récents montrent que les discriminations n’ont pas cessé.

En juillet 1984, le Gisti publiait une note sur les inscriptions scolaires des enfants étrangers. Celle-ci dénonçait un ensemble de pratiques discriminatoires qui, sous prétexte de lutter contre l’immigration clandestine, avaient pour conséquences de refuser aux enfants étrangers l’accès aux crèches, à l’aide sociale et à l’école maternelle ou primaire.

Les mairies (celle de Paris en particulier) exigeaient pour admettre un enfant étranger à l’école, que ses parents présentent un titre de séjour dont la validité couvrait l’année scolaire à venir et, dans le cas où le titre de séjour expirait avant la fin du mois de juin, l’enfant n’était pas admis, son inscription à l’école était refusée.

Ces mesures étaient parfaitement illégales et avaient surtout pour conséquences d’accentuer l’isolement des enfants alors qu’on prêchait dans le même temps la nécessité de l’intégration des communautés étrangères à la vie française.

À la suite de cette note et aussi de la campagne de presse sur ce sujet, le ministre de l’Éducation nationale dans une circulaire du 16 juillet 1984 publiée au BOEN n° 30 du 26.07.1984, a rappelé fort opportunément que l’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, de 6 à 16 ans.

S’agissant de l’enseignement du second degré, cette circulaire précise que les titres de séjour des parents ou des responsables du mineur n’ont pas à être demandés lors de son inscription dans un établissement ; il en est de même s’agissant de l’enseignement du premier degré et de la maternelle. Il était donc clair qu’on ne devait pas subordonner l’inscription des enfants étrangers dans les établissements scolaires à la production du titre de séjour de leurs parents.

Pour être inscrit dans un établissement scolaire, le mineur étranger devait produire les mêmes pièces et remplir les mêmes conditions qu’un enfant français jusqu’à l’âge de 16 ans. Toutefois, à partir de cet âge, la législation en vigueur exige que le mineur soit en possession d’un titre de séjour. Il doit donc en justifier pour obtenir son inscription dans un établissement scolaire s’il veut poursuivre ses études.

Malheureusement, trois ans après cette circulaire ministérielle, on constate que la situation s’est encore dégradée.

Si, pendant un temps, les enfants étrangers ont pu s’inscrire sans grande difficulté, aujourd’hui les pratiques discriminatoires qui avaient conduit le ministre de l’Éducation à intervenir sont revenues en force.

À l’heure actuelle, toutes les mairies de Paris exigent, pour inscrire les enfants étrangers à l’école, une carte de séjour des parents valable jusqu’à la fin de l’année scolaire. On a même vu le Rectorat de Paris exiger, pour la scolarisation d’un enfant mineur de 15 ans, après consultation de la préfecture de police de Paris, qu’il produise un visa de long séjour.

Le glissement qui s’est produit en trois ans est inquiétant. Il faut donc redoubler de vigilance face à cette volonté des pouvoirs publics de maintenir les jeunes étrangers dans la marginalité en créant de nouveaux obstacles à leur intégration.



Article extrait du n°1

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Dernier ajout : mercredi 2 avril 2014, 14:06
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