Deuxième QPC sur les délais de recours contre une OQTF notifiée à des personnes détenues

Venant après une première QPC relative au contentieux des OQTF notifiées en détention, cette seconde QPC, déposée à l’appui d’un contentieux individuel, vise cette fois à contester directement le délai de 48 heures laissé aux personnes détenues pour attaquer une mesure d’éloignement. Elle a été transmise au Conseil constitutionnel par le Conseil d’Etat dans sa décision du 17 juillet 2018.

Intervention OIP-Cimade-Gisti

Mais alors que la QPC était pendante devant le Conseil constitutionnel est intervenu le vote de la loi Collomb qui, tout en modifiant le texte antérieur pour tenir compte de la décision du Conseil sur la première QPC, laisse subsister le délai de 48 h : ceci a conduit la Cimade, le Gisti et l’OIP a rédiger un amicus curiae pour tenter - en vain - d’obtenir l’invalidation de la disposition critiquée.

À l’audience, Cécile Madeline, l’avocate du requérant, et Patrice Spinosi, l’avocat des associations intervenantes, ont démontré de façon éclatante qu’il était non seulement difficile mais impossible, pour un détenu, de déposer un recours dans le délai de 48 h. On peut écouter leurs plaidoiries ici.

Le Conseil constitutionnel a pourtant décidé de reconnaître la constitutionnalité de la disposition critiquée, en invoquant les obligations imparties à l’administration - sans tenir compte du fait, amplement démontré, qu’elles ne peuvent justement pas, matériellement, être respectées dans le contexte de la détention.

« […] d’une part, l’article L. 512-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile impose que, dès la notification de l’arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, qui doit intervenir par voie administrative, l’étranger soit mis en mesure, dans les meilleurs délais, d’avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. Le même article prévoit également que l’étranger est informé qu’il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées. Il précise enfin que ces éléments lui sont communiqués dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend. Il résulte de ces dispositions que l’étranger doit se voir informer, dès la notification de la mesure d’éloignement, dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, de son droit d’obtenir l’assistance d’un interprète et d’un conseil. Il appartient à l’administration, en particulier lorsque l’étranger est détenu ou placé en rétention, d’assurer l’effectivité de l’ensemble des garanties précitées. D’autre part, l’étranger peut, à l’appréciation du juge et pendant le délai accordé à ce dernier pour statuer, présenter tous éléments à l’appui de sa requête.

Dès lors, le délai de quarante-huit heures contesté ne méconnaît pas, en lui-même, compte tenu de l’objectif poursuivi par le législateur, le droit à un recours juridictionnel effectif. »

CC, 19 octobre 2018

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Dernier ajout : jeudi 1er novembre 2018, 09:14
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