Le tribunal administratif de Toulouse vous souhaite un joyeux déni de justice !
28 décembre 2022. Le tribunal administratif de Toulouse s’oppose à la demande d’une centaine de mineurs de voir leur audience d’expulsion reportée, demande formulée d’une part à raison de l’irrégularité de l’organisation de l’audience et, d’autre part, dans le but de pouvoir assurer utilement leur défense. En se prononçant ainsi, le juge des référés du tribunal a décidé de juger de l’expulsion de ces jeunes en toute illégalité et au détriment des plus rudimentaires droits de la défense.
Le 15 décembre 2022, une centaine de mineurs en danger ont trouvé refuge dans un bâtiment vide de toute occupation situé sur le campus de l’Université Toulouse III – Paul Sabatier, dont l’État est propriétaire et l’université gestionnaire. Ces adolescents sont tous des mineurs isolés étrangers, que le conseil départemental a mis à la porte de sa structure d’évaluation (DDAOMIE), les estimant tous majeurs. Étant précisé que plus de 90% des jeunes évalués par le DDAOMIE sont par la suite reconnus mineurs par le juge des enfants, ce que n’est pas sans ignorer le département de la Haute-Garonne.
Le jeudi 22 décembre 2022, l’Université Toulouse III – Paul Sabatier a introduit un recours en urgence devant le tribunal administratif de Toulouse afin que soit prononcée dans un délai de 48h l’expulsion du bâtiment actuellement occupé par ces jeunes. Le lendemain, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a décidé de fixer une audience le mercredi 28 décembre 2022 à 11h. Ce n’est que le lundi 26 décembre 2022, autour de 15h30, soit moins de 48 heures avant l’audience, que les jeunes ont été informés de cette procédure ainsi que de la date retenue par le tribunal.
Dès le mardi 27 décembre au matin, les mineurs présents dans le bâtiment ont saisi leurs avocats afin d’être défendus dans le cadre de cette procédure. L’audience devant intervenir tout juste 24h après, ces derniers ont aussitôt adressé au tribunal une demande de renvoi afin de disposer du temps nécessaire pour préparer leur défense dans des conditions normales. Sans tarder, le tribunal s’y est opposé.
Le matin du mercredi 28 décembre 2022, l’audience s’est donc tenue au tribunal administratif de Toulouse. À cette audience était présente l’une des avocat·es pour y plaider leur demande de renvoi au regard des nombreuses atteintes aux droits dont le tribunal était en train de se rendre coupable. En effet, sauf à méconnaître le code de justice administrative, cette audience ne pouvait se tenir en l’état : même en cas d’urgence, un délai minimum de 48h doit être respecté entre la notification de l’avis d’audience aux défendeurs et la tenue de l’audience. De plus, en violation des dispositions de la loi relative à l’aide juridictionnelle, le juge des référés aurait dû reporter cette audience dès lors qu’un des occupants avait sollicité en amont la désignation d’un·e avocat·e commis·e d’office. Le droit fondamental à bénéficier de l’assistance d’un conseil devait nécessairement conduire le juge des référés à revoir sa position initiale et fixer une nouvelle date d’audience, fût-ce à bref délai.
Comment ne pas s’inquiéter d’un tel mépris pour le droit à un procès équitable venant d’une institution précisément supposée en être la garante ? Ce sinistre pied de nez au principe d’égalité des armes est inacceptable. La trêve des confiseurs ne s’applique manifestement pas aux cent mineurs convoqués et jugés en moins de 48h, en période de congés d’un grand nombre de leurs avocat·es, face à une université gestionnaire d’un bâtiment vide.
Le Gisti condamne l’atteinte grave portée aux droits de la défense les plus élémentaires par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse en refusant tout report de l’audience sans motif légitime et alors que l’Université elle-même n’y semblait pas opposée.
Il dénonce avec force et inquiétude cet erzatz de justice, toujours plus expéditive, s’abattant systématiquement sur les plus vulnérables.
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