Article extrait du Plein droit n° 45, avril 2000
« Double peine »

Le point sur la réglementation

Le dispositif réglementaire pour l’application de la loi du 11 mai 1998 est, deux ans après son entrée en vigueur, presque complet avec la promulgation, depuis le dernier « point » que nous avons fait dans Plein Droit (n° 41-42, avril 1999), de deux décrets importants, relatifs l’un aux modalités d’entrée et de séjour en France, l’autre au regroupement familial. Plusieurs circulaires sur le regroupement familial, l’asile, le PaCS ou l’éloignement viennent compléter le dispositif.

Application de la loi Chevènement du 11 mai 1998

• Entrée et séjour

Le décret n° 99-352 du 5 mai 1999(1) modifie le décret du 30 juin 1946 qui réglemente les conditions d’entrée et de séjour des étrangers. Il détaille d’une part les visas qui permettent l’accès au territoire français, d’autre part les modalités de délivrance et de renouvellement des différentes catégories de cartes de séjour temporaires, de la carte de résident, et de la nouvelle carte portant la mention « retraité ».

Il décrit également le fonctionnement de la commission du titre de séjour instaurée par l’article 12 quater de l’ordonnance du 2 novembre 1945. C’est aussi ce décret qui précise la procédure applicable aux demandeurs d’asile.

Le décret du 5 mai 1999 est détaillé par une circulaire du 1er décembre 1999(2), comportant en annexe un tableau de correspondance entre les différents visas et les titres de séjour qu’ils permettent de solliciter.

• Mineurs étrangers

Le décret n° 99-179 du 10 mars 1999(3) concernant le document de circulation pour étrangers mineurs (application de l’article 9 de l’ordonnance du 2 novembre 1945) modifie la liste des bénéficiaires de ce document qui, rappelons-le, facilite la circulation hors de France et le retour sur le territoire français des mineurs étrangers qui y ont leur résidence en les dispensant notamment de visa.

Outre les catégories énumérées à l’article 9 de l’ordonnance, le décret prévoit que peuvent prétendre à la délivrance du document de circulation : les mineurs séjournant en France sous couvert d’un visa d’une durée supérieure à trois mois, les mineurs ressortissants d’un État membre de la Communauté européenne ou de l’Espace économique européen dont l’un des parents au moins est établi en France pour plus de trois mois, les mineurs dont au moins l’un des parents dispose d’une carte de séjour temporaire ou d’une carte de résident en qualité de réfugié politique, d’apatride, ou au titre de l’asile territorial, et enfin les mineurs dont au moins l’un des parents a acquis la nationalité française ou celle d’un État membre de la Communauté européenne ou de l’Espace économique européen.

En revanche les mineurs étrangers nés en France ne peuvent plus obtenir le DCEM depuis la loi du 16 mars 1998 qui leur octroie à la place un titre d’identité républicain, censé régler leur statut jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de 13 ans à partir duquel il peuvent devenir français. Comme le document de circulation, ce titre leur permet de rentrer sans visa sur le territoire français.

La circulaire du 19 avril 1999 détaille les conditions de délivrance et les modalités pratiques d’établissement du document de circulation selon la catégorie de bénéficiaire à laquelle appartient le mineur(4).

• Regroupement familial

La publication du décret n° 99-566 du 6 juillet 1999 relatif au regroupement familial des étrangers(5) rend désormais le dispositif mis en place par la loi du 11 mai 1998 (chapitre VI de l’ordonnance du 2 novembre 1945) complètement applicable.

La circulaire du 1er mars 2000(6), est venue boucler ce dispositif. Cette circulaire très complète passe en revue tous les aspects du régime mis en place par la loi du 11 mai 1945 (principes, champ d’application, conditions de fond et de forme, modalités d’arrivée de la famille en France).

• Asile

Dans une circulaire du 14 janvier 2000(7), le ministère de l’intérieur donne aux préfets quelques précisions sur le traitement en urgence des demandes d’asile, qu’il s’agisse de celles qui sont fondées sur la Convention de Genève ou de l’asile territorial.

Il y indique la démarche à suivre lorsque les demandeurs relèvent de la procédure d’urgence, soit parce qu’ils se voient appliquer la clause de cessation du statut de réfugié (parce qu’ils sont originaires d’un pays qui n’est plus considéré comme susceptible de générer des réfugiés au sens de la Convention de Genève), soit parce que, demandeurs d’asile territorial, leur situation correspond aux cas définis à l’article 9 du décret du 23 juin 1998 (rétention, menace à l’ordre public et demande abusive ou dilatoire).

• Asile territorial

En complément du décret du 23 juin 1998 et de sa circulaire d’application du 25 juin 1998 relatifs au droit d’asile et à l’asile territorial(8), une circulaire du 31 mars 1999 relative à la procédure d’audition des demandeurs d’asile territorial dans les centres de rétention(9) précise le dispositif applicable aux étrangers qui sollicitent le bénéfice de l’asile territorial alors qu’ayant fait l’objet d’une mesure d’éloignement, ils sont placés en rétention administrative (art. 35 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945).

• PaCS

La circulaire du 10 décembre 1999(10) tire les conséquences de l’entrée en vigueur de la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité lorsque celui-ci est conclu entre deux étrangers ou entre un Français et un étranger, dans le domaine du droit au séjour. Cette loi prévoit en effet que la conclusion d’un PaCS constitue l’un des éléments d’appréciation des liens personnels en France au sens de l’article 12 bis 7° de l’ordonnance du 2 novembre 1945 (délivrance d’un titre de séjour au regard de la vie privée et familiale). [Pour le détail, voir article p. 31].

Éloignement du territoire

• Reconduite à la frontière

Dans une circulaire du 11 octobre 1999 sur l’éloignement des étrangers en situation irrégulière(11), le ministre de l’intérieur rappelle que l’opération de régularisation organisée en 1997 ayant produit tous ses effets, les étrangers qui se trouvent aujourd’hui en situation irrégulière doivent être effectivement éloignés. Sont détaillées les procédures à respecter à chaque « séquence » de l’éloignement (interpellation, identification, relations avec les consulats étrangers, procédures juridictionnelles, rétention et transfert des étrangers, exécution matérielle de l’éloignement).

• Mise en œuvre de l’éloignement

Une circulaire du 1er juin 1999 relative aux mesures d’éloignement(12), traite des difficultés rencontrées par les préfets qui doivent éloigner des étrangers dépourvus de passeport pour obtenir des autorités consulaires les laissez-passer nécessaires (55 % des causes d’échec en matière d’éloignement, selon la circulaire). Il est rappelé aux préfets que ceux-ci ne peuvent transmettre aux services consulaires qui le leur demandent les « indications de nature pénale susceptibles de nuire gravement à l’intéressé lors du retour dans son pays d’origine », sauf si l’intéressé ne s’oppose pas à cette communication.

• Double peine

A la suite de la remise à la ministre de la justice des conclusions du rapport « Chanet » sur les interdictions du territoire français touchant des étrangers ayant des liens familiaux et privés forts avec la France, une circulaire du 17 novembre 1999(13) concernant la politique pénale relative au prononcé et au relèvement des peines d’interdiction du territoire français a été diffusée auprès des procureurs. [Pour le détail, voir article page 5].


Notes

(1) Reproduit et commenté dans Entrée, séjour et éloignement des étrangers après la loi Chevènement, 3è édition, Gisti, 1999.

(2) Circulaire NOR/INT/D/99/00234/C du 1er décembre 1999.

(3) JO du 12 mars 1999.

(4) Circulaire NOR/INT/D/99/00094/C du 19 avril 1999, Répertoire mensuel du ministère de l’intérieur, juin 1999.

(5) JO du 8 juillet 1999.

(6) Circulaire DPM/DM2-3/2000/114-NOR/INT/D/00/00048/C.

(7) Circulaire INT/D/990011/C du 14 janvier 2000.

(8) Reproduits dans Entrée, séjour et éloignement des étrangers après la loi Chevènement, 3e édition, Gisti, 1999.

(9) Circulaire NOR/INT/D/99/00070/C du 31 mars 1999, Bulletin officiel du ministère de l’intérieur n° 99-2.

(10) Circulaire NOR/INT/D/99/00251/C du 10 décembre 1999, Application de l’article 12 bis 7° de l’ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée aux partenaires d’un PACS.

(11) Circulaire NOR/INT/D/99/00207/C du 11 octobre 1999. Cette circulaire a fait l’objet d’un recours en annulation partielle du Gisti devant le Conseil d’État.

(12) Circulaire NOR/INT/D/99/00123/C du 1er juin 1999 relative aux mesures d’éloignement : délivrance des laissez-passer consulaires et compétence préfectorale en matière d’expulsion, Bulletin officiel du ministère de l’intérieur n° 99-2.

(13) Circulaire NOR/JUS/D/99/30176/C du 17 novembre 1999.



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Dernier ajout : jeudi 20 mars 2014, 15:55
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