Recours contre le décret du 8 juillet 2024 relatif aux cas d’assignation à résidence ou de placement en rétention des demandeurs d’asile

Le Gisti, avec huit autres organisations, a déposé un recours en annulation contre le décret du 8 juillet 2024 pris pour l’application des dispositions de la loi du 26 janvier 2024 créant de nouveaux cas d’assignation à résidence ou de placement en rétention des demandeurs d’asile.

La requête relevait la contrariété de plusieurs dispositions du décret avec le droit de l’Union européenne ainsi qu’avec les exigences constitutionnelles en matière d’asile. Et notamment :

  • la contrariété des dispositions du décret avec la directive dite « accueil », en ce qu’il permet l’assignation à résidence de demandeurs d’asile indépendamment des conditions expressément fixées par cette directive ;
  • la contrariété des dispositions du décret avec la même directive, en ce qu’il permet le placement en rétention administrative de demandeurs d’asile en dehors des cas qu’elle fixe expressément ;
  • la contrariété avec la directive « procédure », en ce que le décret prévoit la demande d’asile est instruite selon la procédure accélérée en dehors des cas prévus par la directive ;
  • la méconnaissance des exigences constitutionnelles du droit d’asile, en ce que le décret prévoit qu’un étranger placé en rétention administrative ne dispose que d’un délai de cinq jours pour introduire sa demande d’asile complète auprès de l’Ofpra ;
  • la méconnaissance de la directive « accueil »,en ce que les demandeurs d’asile assignés à résidence doivent solliciter une autorisation pour se présenter devant les autorités et les tribunaux lorsque leur présence y est nécessaire ;
  • la méconnaissance de la directive « procédure », en ce que le décret permet à une autre autorité que celle responsable de la détermination de prendre connaissance des éléments fondant une demande d’asile.

Il était enfin demandé au Conseil d’État de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L.523-1 du Ceseda en tant qu’il permet le placement en rétention des demandeurs d’asile dont le comportement constitue une menace à l’ordre public ou qui présentent leur demande à une autorité autre que celle chargée de son enregistrement.

Par une décision du 6 mars 2025, le Conseil d’État a accepté de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel, estimant que le moyen tiré de ce que cet article porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution soulevait une question présentant un caractère sérieux.

Dans sa décision du 23 mai 2025 le Conseil constitutionnel a fait droit à la demande des associations, considérant que, en tant qu’elles permettent le placement en rétention des demandeurs d’asile, les dispositions contestées méconnaissaient l’article 66 de la constitution qui garantit la liberté individuelle. Le Conseil les a en conséquence déclarées contraires à la Constitution, avec effet immédiat. Cette censure, qui porte sur les seules dispositions permettant le placement en rétention des demandeurs d’asile, ne concernait pas les dispositions du même article qui permettent leur assignation à résidence pour les mêmes motifs.

L’affaire est revenue devant le Conseil d’État qui a rendu sa décision le 16 octobre 2025. Il a constaté que la disposition de la loi du 26 janvier 2024 prévoyant l’examen accéléré de la demande d’asile présentée à une autorité administrative autre que celle chargée de son enregistrement méconnaît l’article 31 de la directive du 26 juin 2013. Constatant ensuite qu’un demandeur d’asile ne peut être assigné à résidence si l’examen de sa demande d’asile ne relève pas de la procédure accélérée, il a annulé le second alinéa de l’article R. 523-2 du Ceseda pris pour l’application de la disposition permettant l’assignation à résidence de la personne qui présente sa demande d’asile à une autorité autre que celle chargée de son enregistrement.

Requête sommaire AAR et rétention demandeurs d’asile
Mémoire complémentaire AAR et rétention des demandeurs d’asile
Mémoire QPC - art. L. 523-1 du Ceseda
CE, 6 mars 2025- transmission de QPC
CE 16 octobre 2025

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Dernier ajout : mercredi 22 octobre 2025, 12:34
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