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Campements, loterie, service payant : le système d’asile ne répond plus

10 personnes exilées et 10 associations venant en aide aux demandeurs d’asile en Île-de-France demandent au juge du tribunal administratif de Paris (TA) de prendre des mesures d’urgence pour garantir un véritable accès à la demande d’asile, dans le respect du délai légal d’enregistrement de 3 jours. Il est aujourd’hui impossible pour une personne souhaitant déposer une demande d’asile en Île-de-France d’accéder aux services de la préfecture sans attendre plusieurs semaines.

En cause : le numéro de téléphone mis en place en Ile de France en mai 2018 par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Ce service téléphonique est censé permettre à une personne souhaitant déposer une demande d’asile d’obtenir un rendez-vous par SMS auprès de la SPADA, la plateforme d’accueil pour demandeurs d’asile. La SPADA lui remet ensuite une convocation papier, sésame incontournable permettant d’accéder au guichet unique des demandeurs d’asile regroupant services de la préfecture et de l’OFII, pour y déposer sa demande d’asile.

Premier écueil : ce numéro est très difficile d’accès ; il faut appeler des dizaines de fois, et attendre plus d’une demi-heure, avant de pouvoir entendre un agent de l’OFII au bout du fil. Autre élément incompréhensible, ce numéro est un numéro payant.

Pour un seul appel de 45 minutes, le montant facturé par les principaux opérateurs utilisés par les exilés est équivalent à 6,75 euros. Ce coût est particulièrement exorbitant pour des personnes sans ressources qui, pour beaucoup, sont obligées de dormir dans la rue tant qu’elles n’ont pas pu déposer leur demande d’asile. De plus, au bout de 45 minutes d’attente, la communication s’arrête automatiquement et il faut alors tout recommencer.

Un délai qui pèse lourdement sur les exilés

Une situation d’autant plus grave que tant que la personne n’a pas enregistré sa demande d’asile, elle est en situation irrégulière et risque à tout moment d’être placée en rétention et expulsée. Elle n’a pas non plus accès aux droits sociaux destinés aux demandeurs d’asile : hébergement (sauf le 115, saturé), allocation, couverture maladie.

Pire, l’administration retiendra ce délai d’attente, qui n’est pas du fait des exilés mais bien de son fait, pour les placer en procédure « accélérée » qui est plus expéditive et moins protectrice et leur refuser le bénéfice des conditions matérielles d’accueil (notamment allocation et hébergement), si les personnes ont pris plus 90 jours après l’entrée en France pour déposer leur demande d’asile.

De plus, l’autre système local d’entrée dans la procédure d’asile, les CAES (centres d’accueil et d’examen de la situation), est saturé. Pour y avoir accès, il faut au préalable être passé par des centres d’accueil de jour parisiens, eux-mêmes saturés. À tel point que l’un d’entre eux a dû avoir recours à des solutions aberrantes comme le tirage au sort pour permettre l’accès des personnes à la procédure d’asile.

Un accès à la demande d’asile pointé du doigt à de nombreuses reprises

L’accès à la demande d’asile dans la région à de nombreuses fois été dénoncé par le Collectif Asile Île-de-France dont font partie la plupart des associations requérantes. En 2016 notamment, les délais d’enregistrement étaient de plusieurs mois, entraînant la formation de nombreux campements notamment dans le nord de Paris qui mettaient les exilés dans une précarité extrême. Pourtant, le CESEDA (Code l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), transposant la Directive européenne dite « accueil », prévoit que l’autorité administrative a 3 jours pour enregistrer une demande d’asile (ou maximum 10 jours en cas de nombre élevé de demandes).

Aujourd’hui, nos 10 organisations condamnent les graves dérives du système de plateforme téléphonique payante de l’OFII qui n’a pas pour but de faciliter l’accès à l’asile, au contraire. Il a surtout pour conséquence de rendre invisible les personnes en attente d’enregistrement de leur demande d’asile. Les files d’attente ne sont plus devant les SPADA, mais elles existent toujours… au bout du fil. Nous demandons au tribunal administratif de Paris qu’il garantisse un véritable accès à la demande d’asile pour tous et toutes, dans le délai légal de 3 jours.

Le 11 février 2019

Organisations signataires :

  • ACAT France
  • ARDHIS
  • La Cimade IDF
  • Dom’Asile
  • Gisti
  • Groupe Accueil et Solidarité
  • JRS France
  • Ligue des droits de l’Homme
  • Secours catholique-Le Cèdre
  • Solidarité Jean Merlin

Voir notre dossier « Jungles, campements et camps d’exilés en France »

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Dernier ajout : vendredi 9 octobre 2020, 10:53
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