Projet de loi constitutionnelle présenté au gouvernement le 9 mai 2018 - article 73
Projet de loi constitutionnelle pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace présenté mercredi 9 mai 2018 en conseil des ministres
Cet article sera probablement l’objet de plusieurs amendements.
Article 73 de la constitution de 1958 Dans les départements et les régions d’outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. Ces adaptations peuvent être décidées par ces collectivités dans les matières où s’exercent leurs compétences et si elles y ont été habilitées selon le cas, par la loi ou par le règlement. Par dérogation au premier alinéa et pour tenir compte de leurs spécificités, les collectivités régies par le présent article peuvent être habilitées, selon le cas, par la loi ou par le règlement, à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement. Ces règles ne peuvent porter sur la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l’état et la capacité des personnes, l’organisation de la justice, le droit pénal, la procédure pénale, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l’ordre publics, la monnaie, le crédit et les changes, ainsi que le droit électoral. Cette énumération pourra être précisée et complétée par une loi organique. La disposition prévue aux deux précédents alinéas n’est pas applicable au département et à la région de La Réunion. Les habilitations prévues aux deuxième et troisième alinéas sont décidées, à la demande de la collectivité concernée, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Elles ne peuvent intervenir lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti. La création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités. |
Article 17 du projet de loi constitutionnelle
L’article 73 de la Constitution est ainsi modifié :
1° Les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par les deux alinéas suivants :
« Sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, les collectivités régies par le présent article peuvent, à leur demande, être habilitées par décret en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement.
« Ces habilitations sont confiées dans les conditions fixées par la loi organique. » ;
2° Les cinquième et sixième alinéas sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Pour le département et la région de La Réunion, les habilitations prévues au deuxième alinéa s’appliquent uniquement dans les matières relevant de leurs compétences.
« Chaque session ordinaire, le Gouvernement dépose un projet de loi de ratification des actes des collectivités pris en application du deuxième alinéa dans le domaine de la loi. Ces actes deviennent caducs en l’absence de ratification par le Parlement dans le délai de vingt‑quatre mois suivant l’habilitation. »
Extrait de l’exposé des motifs
En modifiant l’article 73 de la Constitution, l’article 17 du projet de loi organise une procédure nouvelle permettant aux collectivités ultra-marines de fixer elles‑mêmes les règles applicables sur leur territoire dans un nombre limité de matières, relevant de la loi ou du règlement. Elles y seront habilitées par décret en conseil des ministres, pris après avis du Conseil d’État, afin de faciliter la mise en œuvre de cette faculté.
Présentation par le ministère de la justice :
« Les départements et les régions d’outre-mer pourront aussi bénéficier d’un propre régime de différenciation des normes, grâce à une procédure plus simple à mettre en œuvre par la voie de décrets en conseil des ministres et avec un contrôle du Parlement ».
Article 73 de la constitution de 1958 modifié par cet article du projet de loi constitutionnelle Dans les départements et les régions d’outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. Sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, les collectivités régies par le présent article peuvent, à leur demande, être habilitées par décret en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement. Ces habilitations sont confiées dans les conditions fixées par la loi organique. Ces règles ne peuvent porter sur la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l’état et la capacité des personnes, l’organisation de la justice, le droit pénal, la procédure pénale, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l’ordre publics, la monnaie, le crédit et les changes, ainsi que le droit électoral. Cette énumération pourra être précisée et complétée par une loi organique. Pour le département et la région de La Réunion, les habilitations prévues au deuxième alinéa s’appliquent uniquement dans les matières relevant de leurs compétences. Chaque session ordinaire, le Gouvernement dépose un projet de loi de ratification des actes des collectivités pris en application du deuxième alinéa dans le domaine de la loi. Ces actes deviennent caducs en l’absence de ratification par le Parlement dans le délai de vingt‑quatre mois suivant l’habilitation. La création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités. |
Analyses
A. Commentaires juridiques
- Réforme constitutionnelle : « Les Outre-mer ont été un modèle pour la République », par Véronique Bertile, Outremers 360°, 10 mai 2018
EXTRAIT : « c’est, en l’état, une réforme peu ambitieuse pour les Outre-mer mais, cette procédure d’habilitation législative est mieux encadrée et c’est le réel apport de cette réforme.
Depuis 2003, les habilitations de la loi ont été faites en Guadeloupe et en Martinique mais la procédure n’était pas du tout satisfaisante parce qu’une collectivité pouvait demander au gouvernement ou au Parlement une habilitation et le gouvernement n’était pas obligé de répondre. Désormais, la procédure est plus encadrée, avec un projet de loi de ratification des actes pris par les collectivités ultramarines à chaque session parlementaire. La procédure passe au Conseil des ministres et devant le Conseil d’État ».
- Réforme constitutionnelle : Vers une simplification des statuts et un article « Outre-mer » unique ?, par Véronique Bertile, Outremers 360°, 8 avril 2018 )
- Les collectivités territoriales régies par l’article 73
par Ferdinand MÉLIN-SOUCRAMANIEN, professeur de droit public, Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur du CERCCLE-GRECCAP
Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 35 (Dossier : La Constitution et l’outre-mer) - avril 2012
EXTRAIT :
En guise de conclusion, on peut se borner à relever que, même éclairé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, l’article 73 de la Constitution révisé en 2003 et 2008, complété par les lois organiques de 2007 et 2011, brille d’une « obscure clarté ». Comme le soulignait déjà en 2005, Stéphane Diémert : « ... le droit de l’outre-mer n’a pas encore atteint un degré suffisant de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité : sa modernisation, qui constitue un objectif hautement souhaitable, implique des efforts de rationalisation des procédures interministérielles et parlementaires, ainsi qu’un important travail de codification, de consolidation et de classification ». En d’autres termes, si l’on souhaite parvenir à établir un droit constitutionnel de l’outre-mer plus cohérent, afin de renforcer son applicabilité et son efficacité au service du développement économique et social de territoires fragiles, il sera sans doute un jour nécessaire que le constituant remette un semblant d’ordre au sein de l’article 73 de la Constitution.
Une réforme constitutionnelle est nécessaire pour modifier ce statut
B. Sur le statut de Mayotte selon la Constitution
- L’actualité au prisme du droit > Mayotte : vers une évolution de statut pour sortir de la crise ?,
par Ferdinand Mélin-Soucramanien, Le Club des juristes, avril 2018
EXTRAITS a) L’« évolution des rapports entre Mayotte et l’État ne nécessite donc pas une modification de la Constitution, mais un changement de comportement de part et d’autre. »
b) « Juridiquement, contrairement à une idée reçue, le « droit du sol » à Mayotte est une solution envisageable (une autre question étant de savoir si elle est opportune) ».
En effet, l’article 73 de la Constitution distingue [...] l’adaptation décidée au niveau national prévue par le premier alinéa de l’article 73 [et] l’adaptation décidée au niveau local prévue aux alinéas 2 et 3 du même article 73. [...] L’alinéa 4 de l’article 73 prévoit, entre autres, que ces règles aménagées localement ne peuvent pas porter sur le droit de la nationalité. En revanche, si c’est le législateur national qui intervient pour adapter le droit commun, dans le cadre de l’alinéa premier, il n’y a pas d’autres limites que celles de respecter la Constitution et de se conformer à cette exigence que l’adaptation soit bien justifiée par l’existence de « caractéristiques et contraintes particulières ». L’auteur ajoute cependant que « Ici, tout est question d’interprétation, tant que la question n’aura pas été tranchée par [...] le Conseil constitutionnel. »
C. Sur le statut spécial à la Réunion (alinéa 5)
- « Nouvelle supplique pour la suppression de l’alinéa 5 de l’article 73 de la Constitution »
Témoignages, Libre opinion d’André Oraison, Professeur des Universités, Juriste et Politologue, 5 mai 2018
- « La suppression de l’alinéa 5 de l’article 73 de la Constitution »
Témoignages, André Oraison, 16 mars 2018
- "Les bonnes raisons de garder l’amendement Virapoullé, Tribune de Nadia Ramassamy, Députée de La Réunion, 2 mai 2018
- « La Réunion hésite sur le droit d’adaptation proposé par Macron », par Patrick Roger, Le Monde, 8 novembre 2017
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