Recours contre les conditions de scolarisation d’enfants roms à Ris-Orangis
En février 2013, le Gisti, la LDH, le MRAP, l’association de solidarité en Essonne pour les familles roumaines Roms (ASEFRR) et le European Roma Rights Centre (ERRC) sont intervenus volontairement aux côtés de plusieurs familles roms qui avaient formé devant le tribunal administratif de Versailles un recours pour excès de pouvoir assorti d’un référé-suspension contre la décision du maire de Ris Orangis de scolariser leurs enfants dans une classe spéciale au sein d’un gymnase désaffecté et non dans l’école de leur secteur. Le Défenseur des droits, constatant le caractère discriminatoire de ces modalités de scolarisation, avait de son côté sommé le maire de scolariser les enfants dans des établissements ordinaires de leur circonscription. Le jour-même où l’affaire devait être audiencée, le maire, requis par le préfet, a procédé à l’inscription des enfants dans l’école primaire et le collège où ils devaient être normalement affectés. Le tribunal a donc prononcé un non lieu à statuer.
Le tribunal a rendu sa décision sur le fond par un jugement du 16 mars 2017. Il a donné raison aux requérants, en constatant que les arguments avancés par le maire pour justifier la différence de traitement constituée par le dispositif mis en place ne pouvaient qu’être écartés et que, dès lors, « la décision du maire de Ris-Orangis d’accueillir pendant quatre semaines, douze enfants de nationalité roumaine, d’origine rom, dans des locaux spécialement réservé à cet effet alors que cet accueil et leur scolarisation auraient dû se faire dans les locaux scolaires relevant de la commune, [était] illégale et constitutive d’une rupture d’égalité ».
Il en a donc prononcé l’annulation. La commune ayant fait appel du jugement devant la cour administrative d’appel de Versailles, les associations sont à nouveau intervenues en déposant un mémoire en défense.
Dans son arrêt du 25 mai 2020 la cour confirme que la décision du maire était contraire au principe d’égal accès à l’instruction. Elle constate que cette décision a eu pour effet de tenir à l’écart les enfants roms des autres enfants scolarisés dans des établissements scolaires ordinaires de la commune et que les enfants concernés n’ont pas pu bénéficier de services comme la restauration scolaire, l’étude du soir ou les activités périscolaires. Elle retient par ailleurs que si le maire explique, pour tenter de justifier les refus de scolarisation qu’il a opposés, qu’il a été saisi de demandes de scolarisation incomplètes, il aurait dû dans ce cas chercher à prendre contact avec les familles pour demander la production de pièces complémentaires.
La commune s’étant pourvue en cassation devant le Conseil d’État, les associations sont encore intervenues volontairement en défense aux côtés des familles.
Parallèlement, saisi d’une demande d’indemnisation, le tribunal administratif de Versailles, par un jugement du 17 octobre 2019, avait condamné l’Etat et la commune de Ris-Orangis à indemniser les préjudices subis par les familles. Saisie en appel par la commune, la cour administrative d’appel de Versailles s’est déclarée incompétente, au regard du montant de la somme en litige, et a transmis la requête au Conseil d’État.
Là encore les associations se sont portées intervenantes volontaires en défense devant le Conseil d’Etat.
Par plusieurs décisions rendues le 8 décembre 2023, le Conseil d’État met un point final à un contentieux entamé dix ans (!) auparavant.
- S’agissant du recours en annulation formé contre la mesure procédant à la scolarisation des enfants dans un local séparé, le Conseil d’Etat a annulé une telle décision, comme l’avait fait la cour administrative d’appel et avant elle le tribunal.
- S’agissant des dossiers portant sur le contentieux indemnitaire, Il a estimé que la décision contestée avait été prise conjointement par l’Etat et par la commune, ce qui l’a amené à décider un partage de la charge indemnitaire. Il a donc prononcé la condamnation de l’Etat et de la commune solidairement à verser à titre de de réparation une somme identique à celle que le tribunal avait retenu à la charge de la seule commune.
> > Voir le communiqué : « Classe spéciale « roms » de Ris Orangis : rupture d’égalité ou discrimination ethnique ? »
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