Article extrait du Plein droit n° 43, septembre 1999
« Outre-mer, autre droit »

Découpler nationalité et citoyenneté

Michel Giraud

Sociologue, chercheur au Centre de Recherches sur les Pouvoirs Locaux dans la Caraïbe, Université des Antilles-Guyane
La solide tradition d’hospitalité qui a toujours caractérisé le monde caraïbe serait-elle aujourd’hui en péril ? D’où viennent les réticences et parfois même l’hostilité que de larges secteurs de certaines sociétés caraïbéennes manifestent à l’encontre d’immigrants venus de pays voisins ? Plus que d’autres régions du monde, la Caraïbe, étant donné son histoire, a pourtant les moyens d’éviter les crispations identitaires et de construire une véritable communauté où l’exercice des droits serait davantage fondé sur la citoyenneté que sur la nationalité.

La Caraïbe est l’une des régions du monde où l’explosion migratoire contemporaine est la plus forte. Les émigrations en question se font dans une double direction : vers l’extérieur de la région, à destination des métropoles coloniales (Angleterre, France et Pays-Bas) ou de l’Amérique du Nord (Canada et États-Unis), mais aussi à l’intérieur de celle-ci (migrations d’Haïtiens dans tout l’archipel jusqu’à la Guyane française, de Dominicains et de Cubains vers Porto-Rico, de Dominicais – habitants de la Dominique – vers la Guadeloupe ou de Saint-Luciens vers la Martinique, principalement). Et ce, au gré des difficultés économiques et des crises politiques qui secouent les pays de cette aire.

C’est ainsi une part très importante des personnes d’origine caraïbéenne qui vivent aujourd’hui hors du territoire où elles sont nées ou dans lequel sont nés leurs parents. Par exemple, les Antillais et leurs enfants résidant en France métropolitaine représentent en nombre l’équivalent de la population totale de la Guadeloupe ou de la Martinique, au point qu’un sociologue martiniquais les a désignés comme constituant « la troisième île »(1). De leur côté, autant de Portoricains vivent aujourd’hui aux USA qu’il n’en réside à Porto-Rico même.

La scène migratoire caraïbéenne présente un paradoxe : nombre de Caraïbéens qui partent s’« installer » dans un autre pays de la Caraïbe que le leur vont y rencontrer un accueil au moins aussi mauvais que celui qui attend dans les métropoles européennes ou nord-américaines les émigrants venus de cet autre pays. Ce paradoxe est d’autant plus digne d’intérêt qu’il ne semble pas que la situation qui le constitue ait toujours prévalu. Quand, au tournant de ce siècle, des Guadeloupéens allaient s’installer en Haïti, ils y étaient fort bien reçus. Cinquante ans plus tard, comme le rappelle dans un ouvrage récent un historien martiniquais(2), les Saint-Luciens et les Dominicais accueillaient à bras ouverts les milliers de Martiniquais et de Guadeloupéens qui, fuyant l’ordre vichyssois imposé aux Antilles, partaient en « dissidence » pour aller rejoindre les Forces françaises libres, eux qui, aujourd’hui, sont si mal accueillis dans les départements antillais de la France. Ainsi, ce qui était largement considéré, il n’y a pas si longtemps, comme une solide tradition d’hospitalité serait aujourd’hui en péril.

On nous objectera qu‘au moins dans le cas des territoires de la Caraïbe qui sont encore politiquement dépendants d’une métropole, au premier chef desquels les départements français d’Amérique, ce sont les autorités de cette métropole qui portent la principale responsabilité des difficultés que connaissent les immigrants caraïbéens dans ces territoires, à l’entrée comme durant le séjour qu’ils y font. Nous ne voulons pas négliger ce fait, que nous jugeons tout à fait dommageable, et nous partageons ainsi les critiques qui ont été adressées, par exemple, à la politique française d’immigration en Guyane et à Saint-Martin par un collectif d’associations et de syndicats(3).

Mais, il serait dangereux d’entretenir l’illusion qu’une telle politique se développe sur place dans une sorte de vide social, où les populations et les responsables locaux ne feraient que l’observer de loin, sans y prendre quelque part. Car, dans une certaine mesure, ils y consentent pour le moins, quand ils n’en sont pas les complices actifs(4). Pourquoi, donc, les Caraïbéens, à commencer par nous-même, ne commenceraient-ils pas par balayer devant leur porte ?

La nation comme facteur d’exclusion

C’est vers l’expérience coloniale singulière des peuples de la Caraïbe que l’on est tenté, tout d’abord, de se tourner. Ces peuples ayant été, il y a bien longtemps, arrachés – aux quatre coins du monde – à leurs terres ancestrales et brutalement plongés, à des milliers de kilomètres de celles-ci, dans l’ordre totalitaire de l’esclavage américain, puis soumis à la loi d’airain de la plantation post-esclavagiste, sans donc pouvoir conserver autre chose que des bribes d’une mémoire disloquée de leurs cultures d’origine, la table aurait été comme rase pour la colonisation.

On est ainsi amené à supposer que cette dernière a laissé dans la Caraïbe une marque d’autant plus profonde qu’aucune structuration antécoloniale ne venait plus s’y opposer et que le champ était libre pour que se développent de puissantes stratégies d’identification à la personne du maître et à la loi de la puissance coloniale.

Dans cette ligne de pensée qu’ont beaucoup empruntée les sciences sociales caribéannistes, le rejet ou la marginalisation, dans des territoires caraïbéens non indépendants, de ceux qui, venus d’îles voisines, sont souvent de la même couleur mais bien plus démunis que soi relèverait de l’aliénation coloniale, d’une volonté éperdue d’échapper à ce que Frantz Fanon a appelé « le grand trou noir », qui est celui de la misère, pour s’approcher au plus près de l’enviable monde des dominants. Notre collègue Laënnec Hurbon a ainsi indiqué qu’on pouvait voir dans les exclusions et les violences que les Dominicais et les Haïtiens subissent en Guadeloupe – dont l’acmé a été les ratonnades du 28 et 29 septembre 1979 contre les premiers, au cours desquelles des hommes ont été battus et des femmes violées, puis remis aux autorités de police qui les ont expulsés sur le champ – un « effet de l’interminable tâche d’assimilation à la culture française » dans laquelle les Guadeloupéens sont engagés depuis l’esclavage(5).

Sans qu’il faille refuser tout fondement à l’interprétation qui vient d’être présentée, force est de constater qu’elle ne permet pas de rendre compte d’un des principaux traits du paradoxe examiné : ce n’est pas au plus fort de la période coloniale, pas même à l’apogée de l’entreprise assimilationniste, que se développent, dans les territoires caraïbéens encore politiquement dépendants, les attitudes xénophobes dont nous avons parlé, mais au moment où cette entreprise fait largement l’objet d’une profonde mise en question. Un tel développement aurait-il donc partie liée avec la poussée anticoloniale, au moins avec certaines modalités de celle-ci ?

Affirmer sa « différence »

Pour tenter de répondre à cette interrogation quelque peu sacrilège, il faut garder présent à l’esprit qu’un des principaux enjeux de ladite poussée est d’en finir avec un système qui continue de restreindre fortement l’accès d’un grand nombre de personnes, dans leur propre pays, à des ressources fondamentales restées rares : de bonnes conditions d’emploi et de travail, de rémunération et d’habitat, d’instruction et de santé. Dès lors que ce système d’inégalités entend trouver sa justification dans la prétendue infériorité d’une couleur de peau ou des identités culturelles qui ne sont pas celles de la métropole coloniale, la recherche par les colonisés de leur promotion sociale ne peut que passer par l’affirmation de leur « différence » et la reconnaissance par l’autre de la dignité de leur identité bafouée.

Le projet de reprendre à la puissance coloniale les ressources qu’elle a jusqu’ici si chichement octroyées conduit ainsi souvent à une mobilisation nationaliste qui est, bien sûr, dirigée en premier lieu contre cette puissance. Mais, parce qu’elle suppose – face aux menaces de phagocytose culturelle que comporte la colonisation – un renforcement, quand ce n’est pas une rigidification, des frontières de la nation à libérer et à construire, ce que Laënnec Hurbon a justement appelé une « passion de l’homogénéité »(6), cette mobilisation pousse aussi, comme par ricochet, à l’exclusion des autres peuples. Une exclusion d’autant plus marquée lorsqu’il s’agit de populations immigrantes.

Parce que celles-ci, évidemment, viennent tendre un peu plus la compétition pour l’accès aux ressources convoitées, mais aussi parce que les migrations participent du procès de transnationalisation qui met en crise le modèle de l’Etat-Nation selon lequel les souverainetés politiques caraïbéennes se sont récemment constituées et d’autres pourraient dans l’avenir se former. Contribuant à déstabiliser les revendications nationalistes dans des territoires où celles-ci ne correspondent encore qu’à un projet de minorités agissantes qui se heurte à de vives résistances de la part de larges fractions de l’opinion(7), ce procès et les mouvements migratoires qui en sont un des vecteurs ne peuvent, en effet, que faire l’objet de suspicion dans le « camp patriotique » de ces territoires(8).

Les migrations intracaraïbéennes, comme bien d’autres mouvements migratoires dans le monde, manifestent donc clairement le caractère fondamentalement contradictoire du procès de transnationalisation : en même temps que ce procès vide peu à peu de leur substance les appartenances nationales, il produit, comme réactions de défense, des exacerbations nationalistes ou nationalitaires qui prétendent continuer de prendre appui sur ces appartenances pour faire face aux profondes perturbations qu’il suscite.

Une profonde ambivalence à l’égard des immigrants

Si, partout, la concurrence dans l’accès à des ressources rares est le premier moteur de la xénophobie, celle-ci, dans la Caraïbe, s’alimente aussi très particulièrement à la crispation identitaire qui accompagne le plus souvent les recherches d’une sortie de la situation coloniale. Car la conception visant à aligner l’identité politique jugée légitime sur l’identité culturelle prétendue authentique à laquelle conduit une pareille crispation, revient, en effet, à confondre ce qui doit être rigoureusement distingué : le domaine de l’être et le règne de la valeur, le fait et le droit ; la nouvelle citoyenneté recherchée, qui est en son principe – comme toute citoyenneté – l’expression d’une exigence et d’un projet, qui manifeste un vouloir vivre ensemble, une volonté d’appartenir à un système politique, ne serait plus alors qu’un état de fait, la marque de la contingence d’une naissance fondant une nationalité(9). Et c’est précisément cette confusion que les immigrants paient de leur exclusion.

En fin de compte, c’est une profonde ambivalence qui semble prévaloir dans l’attitude des populations des territoires considérés vis-à-vis des immigrants caraïbéens. Certainement, une volonté de garder pour soi les avantages arrachés à l’ordre colonial en matière de rémunération et de droit du travail, de protection sociale, de couverture sanitaire, d’instruction gratuite,… Mais aussi une sourde irritation devant le dénuement de ces voisins, dont la responsabilité est souvent attribuée à leur propre incurie (peut-être parce qu’il rappelle trop le sort que l’on connaissait hier encore).

Un dénuement qui soit est perçu par certains comme la preuve vivante du bien-fondé de leurs réticences quant à l’indépendance politique de leur propre pays, soit, au contraire, pour d’autres, jette le trouble dans les volitions nationalistes qui sont les leurs, en présentant une image grimaçante de ce que pourrait être le futur auquel ils aspirent. A quoi vient enfin, paradoxalement, se mêler, chez tous ceux qui ont le vif sentiment d’une déperdition coloniale de leur identité, une sorte d’admiration envieuse pour des peuples dont il est dit qu’ils ont su préserver la « pureté » de leur culture. Exemplaire de cet étonnant complexe est assurément l’ambiguïté du rapport que nombre de ressortissants des Antilles françaises entretiennent avec Haïti, pays tout à la fois considéré – au plan politique – comme un repoussoir et – au plan culturel – comme le conservatoire des véritables traditions caraïbéennes, surtout magico-religieuses(10).

Etendre la citoyenneté au-delà de la nation

Au vu de l’état de choses présenté, il semble clair que toute amélioration de la situation des immigrants caraïbéens dans les pays de la Caraïbe ne peut passer que par une construction autonome de l’organisation politique de ces pays, qui décrocherait celle-ci des filiations culturelles et des allégeances communautaires existantes. Et ce pour asseoir solidement cette organisation sur un corps de principes qui, bien qu’enraciné dans les systèmes normatifs des communautés ethno-nationales concernées, transcenderait ces systèmes, parce qu’il serait, avant tout, porteur d’une visée d’universalité.

Ainsi, il ne peut être, selon nous, remédié aux inégalités et aux exclusions qu’affrontent les populations qui migrent d’un pays de la Caraïbe à un autre – des inégalités et des exclusions qui constituent autant de limites à l’exercice de la démocratie dans ces pays – sans que, dans ces derniers, ne soit étendu le champ d’application de l’idéal de la citoyenneté au-delà du cadre de la nation. Et, donc, sans que soit mise en question la doctrine de la « préférence nationale » qui – explicitement ou implicitement – sous-tend les politiques des États présents dans la région, que la nationalité de référence soit celle d’une métropole coloniale ou une nouvelle nationalité caraïbéenne.

Il s’agirait en fait – après qu’ait été régularisé le séjour des migrants en situation irrégulière – d’opérer, à l’instar de ce qui est actuellement en débat dans les pays d’immigration d’Europe et d’Amérique du Nord, un découplage de la nationalité et de la citoyenneté qui permettrait une extension des possibilités d’accès des résidents étrangers aux droits civiques de leurs pays d’accueil et qui remettrait ainsi en cause l’actuelle coexistence dans ces pays de populations à droits inégaux.

Au-delà de ce premier objectif, il serait, plus encore, question d’assurer une meilleure participation de tous, nationaux et étrangers, à la vie de la cité, par un élargissement du contenu de la notion de citoyenneté à une dimension civile et sociale plus marquée que ce n’est le cas présentement et par un renforcement du contrôle de tous les résidents, quelle que soit leur origine, sur les fonctions essentielles de l’État.

Bref, il s’agirait donc d’assurer la primauté des critères de la résidence et de l’activité économique et sociale sur ceux de l’origine et de la filiation dans la définition des conditions d’exercice des droits démocratiques fondamentaux.

Compte tenu de l’extrême difficulté qu’il y aurait, selon toute vraisemblance, à effectuer directement le découplage de la nationalité et de la citoyenneté qui a été suggéré, eu égard aux pesanteurs et aux résistances nationalistes qu’il faudrait affronter pour ce faire, on peut raisonnablement penser qu’une telle réforme n’a de chance d’être réalisée, de manière progressive, qu’à travers diverses applications du principe de réciprocité, un des principes régulateurs de portée universelle que nous évoquions plus haut.

Puisque les mouvements migratoires ne sont qu’exceptionnellement réciproques et que, donc, il serait de peu d’effet de prévoir une symétrie entre les pays concernés dans la mise en œuvre des nouveaux droits pouvant être garantis aux immigrants dans leur société d’accueil, il serait ainsi souhaitable de décider des dispositions concernant ces mouvements dans un cadre de négociations interétatiques qui dépasseraient la seule question des migrations, pour lier celle-ci à toute une dynamique multidimensionnelle d’échanges, de coopération et d’intégration entre pays de la Caraïbe. Une dynamique qui serait, peut-être, d’autant plus facile à enclencher qu’elle commencerait par associer des pays que de fortes affinités historiques, linguistiques ou politiques rapprochent déjà, préfigurant ce qui pourrait devenir à terme une véritable Communauté caraïbéenne.

Vers une construction autonome du politique

La Caraïbe – tout en n’étant pas à l’abri, nous l’avons vu, des exclusivismes identitaires – pourrait cependant avoir, plus que d’autres régions du monde, les moyens de la construction autonome du politique, hors de tout alignement culturel, que nous appelons de nos vœux. Notamment parce qu’elle a été et est encore le lieu d’une expérience historique, souvent présentée sous l’image du « laboratoire créole », à travers laquelle – par delà les souffrances et les violences qui l’ont marquée – ses peuples se sont forgés de nouvelles identités sans prendre fermement appui sur un arrière-pays culturel préexistant mais en étant totalement placés sous la coupe d’un rapport colonial fondateur de toutes choses. Des identités qui ne peuvent, donc, pas être convenablement appréhendées dans la référence verticale à une origine considérée comme fondatrice mais seulement dans le jeu horizontal des interactions entre les traditions fort diverses qui sont entrées dans leur composition. Et que de ce caractère premier de la relation dans la formation de l’identité dans les sociétés créoles, ressortent fortement la relativité et la labilité des démarcations et des appartenances que l’on dit culturelles. C’est ainsi que, contraints à « faire l’économie d’une Genèse »(11) et condamnés au mélange incessant de diversités renouvelées, les peuples caraïbéens devraient être protégés mieux que d’autres des pièges que la recherche de la pureté d’une origine et le souci de l’authenticité tendent toujours à l’action politique. Les hommes et les femmes de la région caraïbe seraient alors à même de connaître et reconnaître plus clairement qu’ailleurs – en sachant assumer la contingence, la complexité et la relativité de leurs appartenances culturelles – que l’émergence ou la consolidation d’un ordre démocratique passe par une tension vers l’universel des droits de l’homme. Et non par le souci intégriste de la conformité à une origine, qui nourrit le sectarisme de clôtures communautaires dont on sait à quel point il met aujourd’hui à feu et à sang de trop nombreux endroits du globe. Partant, davantage qu’à « tempérer l’intolérable propre aux nationalismes sans les aliéner », il nous semble qu’à l’encontre des crispations identitaires, l’expérience créole tendrait plutôt à rendre inadéquate la problématique nationaliste elle-même. Parce que plutôt qu’à faire de l’ascendance commune, donc de la nationalité, le fondement de l’exercice des droits et du respect des devoirs politiques, il appelle ceux qui ont été réunis par l’histoire à partager et à approfondir ces droits et ces devoirs dans un vouloir vivre ensemble transcendant la diversité de leurs origines, donc dans une citoyenneté ouverte à tous.


(1) Anselin Alain, L’émigration antillaise en France. La troisième île, Paris, 1990, Editions Karthala.

(2) De Lépine Edouard, Dix semaines qui ébranlèrent la Martinique, Paris, 1999, Maisonneuve & Larose.

(3)En Guyane et à Saint-Martin. Des étrangers sans droits dans une France bananière (rapport de mission), Asosyasion Solidarité Karaïb (ASSOKA), CCFD, Gisti, Medel, Cimade, SAF, SM, mars 1996.

(4) Comme ce fut le cas, en Guadeloupe, dans un événement évoqué un peu plus loin, quand des Guadeloupéens se transformèrent en auxiliaires de fait de la police française dans sa politique d’expulsion d’immigrés dominicais. On pourra également, à ce propos, lire avec intérêt la lettre que le maire de Saint-Martin a adressée au premier ministre le 17 mai 1994, où le premier réclame au second une accélération immédiate des expulsions d’étrangers de sa commune, et d’autres documents relatifs au même problème, reproduits dans le rapport cité plus haut (ASSOKA et alii, 1996 : 36-46).

(5) Hurbon Laënnec, « Racisme et sous-produit du racisme : les immigrés haïtiens et dominicains en Guadeloupe », Les Temps modernes, numéro spécial « Antilles », 441-442, avril-mai 1983 , pp. 1988-2003.

(6)Cette passion nationaliste peut se développer, dans d’autres situations, loin de toute opposition à un colonialisme européen ou nord-américain, comme c’est le cas en République Dominicaine où un antihaïtianisme de principe, et le violent racisme qu’il suscite, est - compte tenu de l’histoire agitée de l’île - un élément central de la formation de l’identité nationale. Sous la dictature trujilliste, c’est ainsi trente mille Haïtiens qui seront massacrés par la soldatesque du dictateur.

(7) Rappelons qu’à Porto-Rico, Etat associé aux Etats-Unis, et à Curaçao, territoire intégré au royaume des Pays-Bas, des référendums qui ont eu lieu en novembre 1993 n’ont accordé que 4% des voix, dans le premier cas, 0,5 %, dans le second, au vote indépendantiste ; qu’à la dernière consultation électorale sur le statut de Porto-Rico, en décembre 1998, ce vote est même tombé à 2,3% ; et soulignons que, concernant les DFA, les succès auxquels parviennent les forces politiques nationalistes, comme celui du principal parti indépendantiste martiniquais aux dernières élections législatives et régionales, témoignent davantage d’une demande de citoyenneté accrue que d’une volonté de sécession.

(8) Un phénomène dont l’article cité de Laënnec Hurbon, par exemple, atteste de la réalité.

(9) Ainsi, même si étymologie n’est pas raison, le mot de nation prend-il sa source dans le latin nascere.

(10) Ainsi, bien des Antillais diront que s’il s’agit d’avoir recours aux services d’un sorcier, il est plus efficace de « faire le voyage » pour s’adresser, en Haïti, à un houngan, un prêtre vaudou, que de rester sur place, en Guadeloupe ou en Martinique, et d’aller consulter un quimboiseur ou un gadézafè local.

(11) Glissant Edouard, Le discours antillais, Paris, 1981, Editions du Seuil.



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Dernier ajout : jeudi 3 avril 2014, 19:25
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