B. Condamnations pénales et atteintes à l’ordre public

1. Comportements délictuels et condamnations

  • CAA Nantes, 9 février 2024, n°22NT02870
    La requérante avait fait l’objet d’une procédure pénale pour vol à l’étalage en 2008 (faits finalement non établis) puis d’une autre pour vol en réunion le 2014 qui avait donné lieu à un rappel à la loi. Ces faits ne sont pas anciens et présentent un caractère non dénué de gravité, estime le juge, qui en déduit que le ministre n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ajournant à deux ans la demande de naturalisation.
  • CAA Nantes, 21 mars 2023, n°21NT03659
    Le demandeur a été condamné à deux ans de prison dont un an assorti du sursis simple pour des faits d’agression sexuelle commis le 1er janvier 2004. Eu égard à la gravité des faits, bien qu’ils aient eu lieu 15 ans auparavant, c’est à bon droit que la demande a été déclarée irrecevable.
  • CAA Nantes, 19 avril 2022, n°21NT00760
    Le ministre a pu sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation rejeter la demande de naturalisation déposée par l’auteur de violences par conjoint suivies d’une incapacité n’excédant pas huit jours. L’intéressé avait été condamné pour ces faits à quatre mois de prison avec sursis, sursis finalement révoqué. Les faits, bien qu’anciens, présentaient une gravité certaine et n’étaient pas isolés.
  • CAA Nantes, 9 juillet 2021, n°20NT03101
    Pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation du postulant, le ministre de l’intérieur s’était fondé sur le motif tiré de ce que l’intéressé avait, le 26 mars 2008, été l’auteur de faits de transport prohibé d’arme, munition ou de leurs éléments de catégorie 1. Même si la condamnation prononcée pour laquelle l’intéressé a bénéficié de la réhabilitation légale, ne figure plus sur le bulletin n° 2 de son casier judiciaire le ministre pouvait tenir compte de ces faits, d’une singulière gravité, pour apprécier l’intérêt de lui accorder la nationalité française et ajourner la demande.
  • CAA Nantes, 31 mars 2021, n°20NT00888}
    En 2006 le demandeur avait transporté des armes de la 6e catégorie (une bombe lacrymogène et une matraque télescopique), ce qui lui avait valu une composition pénale, puis avait été condamné l’année suivante pour violences. Malgré la relative ancienneté des faits, leur gravité et leur caractère réitéré justifiaient la décision d’ajournement prise par le ministre.
  • CAA Nantes, 20 juin 2019, n°18NT04440
    Le seul constat des condamnations à des peines d’emprisonnement prononcées contre l’intéressé entre 1982 et 2005 ne pouvait fonder une décision d’irrecevabilité dès lors que le demandeur avait bénéficié de la réhabilitation de plein droit prévue par le code pénal à l’expiration d’un délai de dix ans. Mais au regard de la gravité des délits commis (vol avec violence, vol en réunion, violences volontaires et escroquerie) et de leur caractère répété le ministre a pu à bon droit considérer, malgré leur relative ancienneté, que la condition de bonnes vie et mœurs n’était pas remplie et déclarer sa demande irrecevable.
  • CAA Nantes, 26 décembre 2018, n° 18NT01424
    La postulante avait été mise en cause pour des appels anonymes à son mari à une époque où son couple, en situation de divorce, traversait une grave crise conflictuelle et s’adressait mutuellement des appels anonymes. Le mari avait été condamné mais les faits retenus à l’encontre de l’épouse avaient fait l’objet d’un classement sans suite. Aux yeux du juge, le ministre a donc commis une erreur manifeste d’appréciation en ajournant la demande de naturalisation de la postulante pour le seul motif tiré de ces faits, compte tenu des circonstances très particulières de l’espèce, de leur relative ancienneté, de leur caractère isolé et de l’absence non contestée de toute nouvelle infraction commise par la postulante.
  • CAA Nantes 26 décembre 2018, n° 18NT01516
    Pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation du postulant, le ministre avait invoqué une série de faits graves qu’il avait commis : acquisition, détention ou emploi de stupéfiants en 1988, conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique en 1988, outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique en 2001, dégradation ou détérioration grave d’un bien appartenant à autrui, violence avec usage ou menace d’une arme suivie d’une incapacité n’excédant pas huit jours et conduite de véhicule sous l’empire d’un état alcoolique en 2003.
    Dans la mesure où ces faits remontaient respectivement à 27 ans, 14 ans et 12 ans à la date de la décision contestée et où une décision d’ajournement à deux ans avait déjà été opposée à la demande de naturalisation formée par l’intéressé pour les mêmes faits et que dans l’intervalle l’intéressé ne s’était rendu coupable d’aucune nouvelle infraction, la cour confirme le jugement du TA de Nantes annulant pour erreur manifeste d’appréciation la nouvelle décision d’ajournement.
  • CAA Nantes, 1er octobre 2018 N° 18NT00400
    Le demandeur, entré seul en France et pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance, avait fait l’objet d’un rappel à la loi pour avoir donné un coup de pied dans la portière d’un véhicule lors d’une dispute à la sortie d’une discothèque. Il avait, de sa propre initiative, réglé la réparation des dommages. Eu égard au caractère isolé des faits, à leur relative ancienneté et compte tenu de l’intégration de l’intéressé, c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu’en ajournant à deux ans la demande de naturalisation de l’intéressé, le ministre en charge des naturalisations avait commis une erreur manifeste d’appréciation.
  • CAA Nantes, 4 mai 2018, n° 17NT01439
    L’intéressé avait fait l’objet d’une procédure pour destruction ou détérioration importante du bien d’autrui et pour violence ayant entraîné une incapacité de travail n’excédant pas huit jours. Cette procédure pénale a été classée sans suite après rappel à la loi, mais ces faits, commis neuf ans avant la date de la décision n’étaient pas dépourvus de gravité et, en dépit de leur relative ancienneté, le ministre a pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, ajourner la demande à deux ans.
  • CAA Nantes, 14 décembre 2016, n°16NT00246
    Le demandeur avait été condamné à quatre mois d’emprisonnement pour un vol commis en 1989, en 1991 à une amende de 2 000 francs pour outrage à agent ou commandant de la force publique dans l’exercice de ses fonctions, en 1993 par le tribunal correctionnel de Nanterre, à six mois d’emprisonnement pour une tentative de vol et en 2003 à quatre mois d’emprisonnement pour vol facilité par l’état d’une personne particulièrement vulnérable. En dépit de leur ancienneté, de tels faits étaient, eu égard à leur nature et à leur gravité, propres à faire regarder l’intéressé comme n’étant pas, à la date de la décision contestée, de bonnes vie et mœurs.
  • CAA Nantes, 15 janvier 2016, n°15NT01552
    L’intéressé avait été condamné en 2007 à un mois d’emprisonnement pour conduite d’un véhicule sans permis puis en 2008, à 500 euros d’amende pour avoir conduit un véhicule sans assurance. Il avait fait aussi l’objet de procédures pour port illégal d’arme de 6e catégorie, vol à la roulotte, usage de stupéfiant. Le ministre a pu prendre en compte l’ensemble de ces faits qui présentent un caractère de gravité suffisant et n’étaient pas anciens à la date de la décision contestée, même s’ils n’avaient pas donné lieu à des condamnations pénales, pour apprécier le comportement du postulant et rejeter sa demande en opportunité.
  • CAA Nantes, 26 juin 2015, n° 14NT03039
    Le demandeur avait été condamné à trois mois d’emprisonnement avec sursis pour des faits d’atteinte sexuelle par majeur sur mineur de 15 ans en 1998 et 1999. Le ministre a pu se fonder sur ces faits qui, en dépit de leur ancienneté, revêtent un caractère certain de gravité, pour rejeter la demande de naturalisation sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation.
  • Ministère de l’intérieur, sous-direction de l’accès à la nationalité française, 26 mars 2011
    Mme N, réfugiée rwandaise en France depuis 12 ans, a obtenu son diplôme d’assistance sociale scolaire et est dans l’attente de sa naturalisation pour être titularisée par l’éducation nationale. Mais sa demande est rejetée au motif qu’elle a fait l’objet d’un simple rappel à la loi (qui n’a donné lieu à aucune poursuite pénale). Il s’avère qu’elle avait donné une gifle à sa petite voisine de 11 ans, laquelle avait entraîné sa fille de 7 ans dans une fugue de l’école et fait un « faux mot d’excuse » avec imitation de sa signature auprès de l’établissement scolaire. Le rejet a été confirmé après recours gracieux.
  • Sous-préfecture d’Antony, Hauts de Seine, 31 janvier 2012
    Le demandeur était un jeune Algérien venu rejoindre son père en France, qui a demandé sa naturalisation en 2011. Elle lui a été refusée sur le fondement d’une condamnation pour outrage sur dépositaire de l’autorité publique en 2007. Il avait en effet été condamné avec sursis pour avoir insulté des policiers qui tenaient des propos xénophobes à son égard lors d’un contrôle routier. Il était aussi redevable aux services fiscaux depuis 2009 d’une somme qui lui avait été réclamée par erreur et qui lui avait ensuite été remboursée.

2. Autres atteintes à l’ordre public

  • Rouen, préfecture de Seine Maritime,23 et 24 novembre 2010 - Ministère de l’intérieur, sous-direction de l’accès à la nationalité française, 24 février 2011
    Un couple d’Arméniens yézidis se voient refuser leur naturalisation pour leur appartenance au PKK (parti indépendantiste kurde)
    Sur recours hiérarchique faisait valoir qu’il s’agit manifestement d’une erreur sur la personne compte tenu de l’origine des clients et de leur méconnaissance du PKK, le ministère confirme la décision, précisant que les liens de Monsieur avec le PKK sont établis par le fait qu’il a travaillé comme salarié pour un entrepreneur turc qui serait cadre du PKK et qu’il a perçu des fonds de son entreprise. M K avait expliqué qu’il avait été salarié de cette personne, et que les sommes perçues correspondaient à des salaires et des remboursements de frais.

3. Faits répréhensibles imputables à un tiers

1. Faits imputables au conjoint du demandeur

  • Conseil d’État 8 avril 2021 n°436264
    La demande de la postulante avait été rejetée au motif que son mari avait, en qualité de ministre du plan du Rwanda, directement et publiquement incité à commettre le génocide de 1994, faits pour lesquels il a été condamné à une peine de trente ans d’emprisonnement par le Tribunal Pénal International pour le Rwanda en 2014. Elle était toujours mariée avec lui et continuait à entretenir des relations avec lui. La cour administrative d’appel puis le Conseil d’État considèrent que de tels liens étaient susceptibles de justifier ce refus et que le ministre n’a commis aucune erreur de droit.

2. Faits imputables aux enfants du demandeur

  • CAA Nantes, 8 décembre 2020, n°19NT04885
    La demande de naturalisation de la postulante avait été rejetée au motif de ce que l’intéressée avait failli à ses obligations parentales, quatre de ses enfants ayant eu des comportements délictueux. Le premier fils avait été l’auteur de violences commises en réunion suivies d’incapacité inférieure à huit jours, de vol aggravé, de vol d’un vélo électrique, de vol de VTT et de violences commises en réunion suivies d’incapacité inférieure à huit jours ; le second avait été l’auteur d’infractions de nature analogue. Les filles fait l’objet d’une procédure pour violences volontaires aggravées. Les enfants résidaient, à la date des faits répréhensibles, à son domicile.
    Ainsi, eu égard au caractère récent, au nombre et à la gravité des faits commis par les enfants de la postulante, titulaire à leur égard de l’autorité parentale, et en dépit de ce que ces comportements répréhensibles sont intervenus dans un contexte de difficultés familiales, le ministre n’a pas entaché sa décision d’erreur manifeste d’appréciation en rejetant sa demande de naturalisation.
  • CAA Nantes, 1er juin 2015, n°14NT01801
    Le ministre avait rejeté la demande présentée par une femme en se fondant sur le fait que trois de ses enfants avaient eu des comportements délictueux, ce qui révélait un défaut d’exercice de son autorité parentale à leur égard. Un de ses fils avait fait l’objet de vingt-quatre poursuites pénales ayant donné lieu à treize condamnations, entre 2001 et 2011, pour des faits de violences volontaires, vols avec violence, d’outrage à agent de la force publique, trafic de stupéfiants ou encore de délit de fuite après accident matériel de la circulation et usage de fausses plaques d’immatriculation ; un autre fils avait fait l’objet de neuf poursuites pénales entre 2005 2011 pour des faits de vol aggravé, d’outrages et menaces de mort à agent de la force publique, rébellion, e violences volontaires avec arme blanche et ayant entrainé une ITT de 8 jours, usage et revente de produits stupéfiants, refus d’obtempérer, défaut de permis de conduire et défaut d’assurance ; le troisième avait fait l’objet de 5 poursuites pénales entre 2008 et 2011 pour des faits de vols avec violence ou par effraction en réunion, usage et revente de stupéfiants et port d’arme de 6ème catégorie.
    Eu égard au caractère récent, au nombre et à la gravité des faits commis par les enfants de la postulante et qui sont survenus alors que les enfants résidaient au domicile de leur mère, le ministre n’a commis d’erreur manifeste d’appréciation en rejetant, pour le motif mentionné ci-dessus, la demande de naturalisation.
  • CAA Nantes, 29 décembre 2014, n°14NT01060
    Pour rejeter les demandes d’acquisition de la nationalité française présentées par un couple, le ministre s’était fondé sur le fait que trois de leurs enfants avaient eu des comportements délictueux : l’un était connu pour fraude ou fausse déclaration en vue d’obtenir des prestations de chômage, plusieurs accidents corporels ou matériels de la circulation routière et diverses infractions au code de la route, le second pour usage et trafic de stupéfiants et conduite de véhicule sans permis, le troisième pour infractions graves au code de la route. Le ministre estimait qu’en les hébergeant à leur domicile, en subvenant à leurs besoins matériels et en tolérant leurs agissements répréhensibles, les demandeurs leur avaient apporté un soutien actif relevant un non-respect des lois et règlements régissant la vie en société.
    La cour administrative d’appel entérine ce raisonnement et considère que, eu égard au caractère récent, au nombre et à la gravité des faits commis par les enfants majeurs du couple et qui sont survenus alors que les enfants résidaient au domicile de leurs parents et bénéficiaient de l’aide de ceux-ci, le ministre n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation. Elle annule le jugement du tribunal administratif qui avait au contraire estimé qu’on ne pouvait pas retenir les faits commis par les enfants.

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Dernier ajout : mardi 9 juillet 2024, 07:29
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