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NOTE
Annulation d'un refus de séjour :
les arguments de fond à invoquer
Deux types darguments peuvent être invoqués lors
d'une demande d'annulation d'un refus de séjour.
1. On peut dabord sefforcer de démontrer
que, contrairement à ce que prétend ladministration,
on remplissait bien les conditions prévues par lordonnance
de 1945 (ou, le cas échéant, par la convention franco-algérienne
ou la convention franco-tunisienne) pour obtenir le titre de séjour
sollicité. Sans quil soit possible denvisager ici
toutes les situations, on peut, par exemple, contester les affirmations
ou les appréciations de ladministration concernant :
-
linsuffisance des ressources (pour un visiteur ou un étudiant) ;
-
le manque de sérieux des études (pour le renouvellement
dune carte étudiant) ;
-
la gravité des faits commis, lorsque ladministration
invoque la menace pour lordre public ;
-
la durée du séjour antérieur en France (pour
la délivrance dune carte de séjour temporaire
« vie privée et familiale » fondée
sur la résidence habituelle en France pendant plus de dix
ans) ;
-
la réalité de la vie commune (dans le cas dun
étranger marié avec un Français) ;
-
labsence datteinte à la vie privée et
familiale (dans le cas dune carte de séjour demandée
sur le fondement des liens personnels et familiaux en France :
larticle 12 bis 7° de lordonnance de
1945) (voir ci-dessous, à propos de larticle 8
de la CEDH) ;
-
etc.
2. On peut aussi tenter de montrer que, même si lon
ne remplissait pas les conditions prévues par les textes, le
refus de séjour porte atteinte à un droit fondamental
garanti par une convention internationale. Il ne faut donc pas hésiter
à citer directement les dispositions des conventions internationales
(les exemples qui suivent ne sont pas exhaustifs).
- Larticle 8 de la Convention européenne des droits
de lhomme : « Toute personne a droit au
respect de sa vie privée et familiale ». Cette disposition
a été incorporée au droit interne, puisque larticle 12 bis
7° de lordonnance du 2 novembre 1945 impose désormais
de délivrer une carte de séjour temporaire à
létranger « dont les liens personnels
et familiaux en France sont tels que le refus dautoriser son
séjour porterait à son droit au respect de sa
vie privée et familiale une atteinte disproportionnée
au regard des motifs du refus ». Ladministration
doit appliquer cette disposition à la lumière de la
jurisprudence abondante à laquelle a donné lieu lapplication
de larticle 8 par les tribunaux français et par
la Cour européenne des droits de lhomme.
La notion de vie familiale englobe tous les rapports avec les
proches parents, quel que soit le lien de parenté. Mais il
faut que les liens soient effectifs (communauté de vie pour
les conjoints, entretien des enfants...). De façon générale,
le respect des principes établis par la Convention implique
la prise en compte des éléments objectifs qui justifient
le maintien de relations étroites entre les membres de famille
qui ne sont pas nécessairement conjoints ou parents/enfants.
Ces éléments peuvent être de nature affective,
matérielle et pécuniaire, etc. Ainsi peuvent être
aussi analysés comme relevant de lapplication de la Convention
les liens entre des couples non mariés, entre des enfants et
leurs grands-parents...
La prise en compte du droit à la vie privée par
ladministration est pour linstant quasiment inexistante.
Mais la position de ladministration sera dautant plus
susceptible dévoluer dans un sens positif que les recours
fondés sur ce principe seront nombreux. Le droit à la
vie privée a été défini par la Cour européenne
des droits de lhomme comme « le droit détablir
et dentretenir des relations avec dautres êtres
humains, notamment dans le domaine affectif, pour le développement
et lépanouissement de sa propre personnalité ».
Ainsi, le droit à la vie privée ne se confond pas avec
le droit au respect de la vie familiale ; il permet de prendre
en compte lensemble des liens sociaux quun étranger
a pu tisser en France en dehors dattaches familiales. Cest
notamment le cas des célibataires qui résident depuis
longtemps sur le territoire français et qui seraient privés
de toute vie sociale en cas de retour dans leur pays dorigine.
Depuis lentrée en vigueur du Pacte civil de solidarité
(PaCS), ce texte doit évidemment être invoqué
par des étrangers « pacsés » auxquels on refuse
un titre de séjour. Tous les concubins « non-pacsés »
doivent aussi sy référer, ainsi que tous ceux
même célibataires qui, par la
durée de leur séjour en France et les liens quils
y ont forgés (travail, sports, culture, voisinage, etc.), peuvent
défendre la légitimité de leur présence
par leur vie privée [1].
- Larticle 3.1 de la Convention internationale des droits
de lenfant : « Dans toutes les décisions
qui concernent les enfants, quelles soient le fait des institutions
publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux,
des autorités administratives ou des organes législatifs,
lintérêt supérieur de lenfant doit
être une considération primordiale ».
Le Conseil dÉtat a estimé quun refus de
regroupement familial pour un enfant au motif quil réside
déjà sur le territoire français (interdiction
du regroupement familial sur place), alors même quil na
plus de parent dans son pays dorigine susceptible de le prendre
en charge, porte atteinte à lintérêt supérieur
de cet enfant. Plus généralement, cet article peut être
invoqué pour contester le refus de regroupement familial dun
mineur étranger quel quen soit le motif (insuffisance
des ressources, logement inadapté) ou le refus de délivrance
dune carte de séjour à un jeune de plus de 16 ans.
- Larticle 9 de la Convention internationale des droits
de lenfant : « Les États veillent
à ce que lenfant ne soit pas séparé de
ses parents ». Cet article peut être invoqué
pour contester toutes les décisions administratives ou judiciaires
qui entraîneraient une séparation entre lenfant
et ses parents.
- Larticle 3 de la CEDH, qui interdit dexposer quiconque
à des traitements dégradants ou inhumains (risques pour
ses libertés, sa vie , sa sécurité, sa santé
dans le pays dorigine, voire en France si ladministration
crée trop longtemps les conditions dune situation inhumaine :
tolérance sur le territoire sans titre malgré de multiples
demandes). A noter que cet art. 3 est surtout reconnu par les
juges en matière déloignement, guère en
matière de droit à un titre de séjour.
Notes
[1]
Dans une décision du 28 avril 2000 (préfet des Alpes-Maritimes
contre Youri Maroussitch), le Conseil dÉtat a admis que
le concubinage (y compris homosexuel) constituait un élément
de la vie privée. Le CE sest fondé sur « lancienneté
et la stabilité de la relation » de lintéressé
et sur son « degré dintégration (...) dans
le village dans lequel il réside » (création
dune entreprise).
Extrait de la Note pratique « Que
faire après un refus de séjour », parue
en juin 2000.
Dernière mise à jour :
21-05-2001 23:07.
Cette page : https://www.gisti.org/
pratique/modeles/sejour/arguments.html
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