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Rapport « Immigration,
emploi et chômage » du CERC
III.2.6 - La gauche au pouvoir et les étrangers (1981-1986)
i - 1981 : le contre-pied
Une fois arrivée au pouvoir, la gauche va relâcher la
tension et prendre le contre-pied de la politique antérieure
en entamant un premier mouvement de balancier à l'ordonnance
de 1945, mouvement « droite/gauche » qui se poursuivra
alternativement avec les lois du 9 septembre 1986 (loi Pasqua),
du 2 août 1989 (Joxe), de 1993/94 (Pasqua) et de 1997 (Debré),
puis du 11 mai 1998 (Chevènement). Mais l'image du balancier
ne doit pas tromper : le retour ne va jamais jusqu'au bout et laisse
à chaque fois subsister une partie des dispositions restrictives
adoptées par la majorité précédente [Lochak,
1995d].
D'août à novembre 1981, d'importantes mesures sont prises
par la gauche nouvellement arrivée au pouvoir. L'aide au retour
est supprimée ; la loi Bonnet est abrogée, les mineurs
ne peuvent plus être expulsés, les parents d'enfants français
et les personnes nées ou arrivées en France avant l'âge
de dix ans deviennent inexpulsables (sauf dans des cas très limités),
des télégrammes circulaires sont adressés aux préfets
pour mettre un terme aux expulsions et une vaste opération de
régularisation est engagée, dès le mois de mai
1981, qui concernera finalement 132 000 personnes. Plusieurs circulaires
viennent assouplir les conditions du regroupement familial surtout en
permettant l'admission au séjour des membres de familles résidant
déjà en France. D'autre part, des garanties de procédure
sont ajoutées aux règles régissant l'entrée
et le séjour en particulier en faisant intervenir l'autorité
du judiciaire comme contrepoids face au pouvoir de l'administration,
notamment pour ce qui concerne les expulsions. Enfin, la loi du 29 octobre
1981 élargit la liberté d'association et supprime l'autorisation
du ministre de l'Intérieur à laquelle étaient préalablement
soumises les associations d'étrangers en France depuis un décret-loi
de 1939. Dans le même temps, la loi du 17 octobre 1981 sur l'emploi
des travailleurs étrangers en situation irrégulière
transforme le recours au travail immigré clandestin en délit
passible d'une amende ou de prison.
L'égalité de droit dans le monde du travail est renforcée
par les lois Auroux qui introduisent en 1982 dans le Code du travail
une disposition explicite interdisant toute discrimination en matière
d'embauche, de sanctions ou de licenciement, notamment « en
raison (...) de son appartenance à (...) une nation... »
(art. L. 122-45). Conformément à la convention de l'OIT
n° 111 adoptée le 28 juin 1958 et ratifiée
par la France en mai 1982, une discrimination ethnique ou nationale
ne peut davantage justifier une sanction disciplinaire ou un licenciement,
alors nuls de plein droit.
La loi du 28 octobre 1982 permet aux étrangers d'être
électeurs et d'être élus dans les conditions du
droit commun pour les élections des délégués
du personnel, des membres du comité d'entreprise et du comité
d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail
(art. L. 423-7 et 433-4) [51].
Pour l'élection des conseillers des prud'hommes, les étrangers
salariés et employeurs sont électeurs (art. L. 513-1)
mais ne sont pas éligibles (art L. 513-2). Sur le fondement d'une
circulaire de 1946, ils ne peuvent non plus siéger dans un comité
technique de prévention des accidents du travail [Mekachera,
1993, p. 36]. Enfin, en décembre 1983 sont abrogées
les dernières incapacités professionnelles et politiques
qui pesaient sur les Français naturalisés.
A côté de ces nombreuses mesures libérales, sont
toutefois conservées certaines dispositions répressives
introduites à la fin du septennat précédent, en
particulier les contrôles d'identité préventifs,
l'exécution forcée des mesures d'éloignement du
territoire et la rétention.
ii - Favoriser la stabilisation des étrangers installés
La loi du 17 juillet 1984 modifie de fond en comble le régime
des titres de séjour, en réduisant à deux le nombre
des titres de séjour, la carte de séjour temporaire valable
un an maximum et la carte de résident valable dix ans et renouvelée
automatiquement. Parallèlement, la dualité du titre de
séjour et du titre de travail est supprimée.
La possession de la carte de résident de 10 ans, délivrée
de plein droit à certaines catégories et renouvelée
automatiquement, vaut autorisation de travail et dispense de détenir
une carte de commerçant ou d'artisan. Elle est valable sur l'ensemble
du territoire et pour la profession de son choix. Cette loi traduit
enfin dans les textes la reconnaissance du caractère durable
de l'installation en France et a d'ailleurs été adoptée
à l'unanimité [Weil, 1995]. La population étrangère
n'est plus seulement considérée comme un volant de main-d'oeuvre
compressible au gré des nécessités mais comme partie
intégrante de la société française. Cette
loi justifiera la notion d'intégration en lui donnant un peu
de contenu.
En revanche, le titulaire d'une carte temporaire doit comme auparavant,
s'il veut travailler, obtenir préalablement une autorisation
de travail dans des conditions assez proches de celles qui existaient
antérieurement. Un étranger ne peut exercer une profession
que s'il est autorisé à séjourner. En revanche,
un étranger peut être autorisé à séjourner
en France sans avoir la possibilité d'y exercer une activité.
Le droit du travail (art.L.341-4 du Code du travail) soumet en effet
de manière discriminatoire les étrangers en leur faisant
obligation d'être titulaires d'une autorisation de travail. L'employeur
doit s'assurer que l'étranger est muni de cette autorisation
et qu'elle correspond à son travail effectif (art.L.341-6). Délivrée
et renouvelée de manière discrétionnaire par l'administration
en fonction de la situation de l'emploi, l'autorisation préalable
de travail concerne désormais une minorité des étrangers
résidents : elle est demandée aux primo-demandeurs
d'autorisation de travail salarié ou non salarié ainsi
qu'au moment du renouvellement. Le progrès est néanmoins
important. Désormais, une part importante des étrangers
n'a plus besoin d'autorisation de travail : les ressortissants
communautaires et les titulaires d'une carte de résident.
iii - Premières mesures de restriction
La générosité des débuts du septennat
Mitterrand va être battue en brèche au lendemain des élections
municipales de mars 1983 [Lochak, 1997 ; Viet, 1998, p. 413].
Dans un contexte de fort chômage et de difficultés sociales
croissantes, la montée d'un parti d'extrême-droite xénophobe
prenant les étrangers comme boucs émissaires modifie la
donne politique. Le « problème » de l'immigration
devient un enjeu politique majeur. Les discours des pouvoirs publics
emboîtent le pas à l'amalgame insécurité-chômage-immigrés,
entretenu initialement par la droite et largement relayé par
une partie des médias.
De cette époque date aussi l'approfondissement de la doctrine
toujours en vigueur en matière de législation sur les
étrangers comportant deux volets : un volet « intégration »
ou insertion pour les « bons » étrangers
que l'on peut surtout illustrer par la création de la carte de
résident de dix ans ; un volet répressif contre les
« mauvais » étrangers (clandestins, délinquants,
etc.). Ces deux volets sont supposés être complémentaires
en vertu du postulat selon lequel l'intégration des étrangers,
voire celle des immigrés français ou des personnes ayant
un parent immigré, dépendrait de l'étanchéité
des frontières et du durcissement de la police des étrangers.
« Georgina Dufoix tenta dès le mois de juin [1983]
de supprimer toute possibilité pour un étranger d'accéder
au séjour et au travail par la voie de la régularisation »
[Viet, 1998, p. 414]. Les dispositions du Code du travail furent
renforcées pour opposer au travailleur étranger la situation
de l'emploi, présente et à venir, dans la profession et
la zone géographique demandées par lui (article R. 341-4).
La question de l'immigration est devenue l'objet de toutes les surenchères
dans le débat politique et le Premier ministre annonce le 10
octobre 1984 des mesures restrictives, notamment le resserrement des
contrôles à la frontière et la limitation du regroupement
familial. Un décret du 4 décembre 1984 interdit désormais
la régularisation sur place des conjoints et des enfants venus
légalement sur le territoire à l'occasion d'une visite
familiale ou touristique. Entre-temps, la renégociation de l'accord
franco-algérien aboutit également à durcir les
conditions posées au regroupement familial des Algériens,
ainsi qu'à leur entrée sur le territoire.
iv - Le retour de la politique du « retour »
Rebaptisée aide publique à la réinsertion, l'aide
au retour est aussi remise à l'ordre du jour par un décret
d'avril 1984 : le dispositif, auquel sont associés le Fond
d'Action Social et l'Office National d'Immigration (ONI), est mis en
place en octobre 1984. Il est destiné aux étrangers privés
d'emploi qui acceptent de repartir. La nouvelle aide au retour à
laquelle peut s'ajouter une aide de l'ancien employeur, connaîtra
le même genre de déboires que le dispositif mis en place
au cours du septennat précédent. La formule a surtout
permis à Citroën et Peugeot-Talbot de licencier en douceur
et à moindre coût les ouvriers étrangers « volontaires »
[Mamet, 1987, Weil, 1995]. Si cette opération s'est soldée
par un échec du point de vue du nombre des retours [52],
la décision de cette aide au retour, son affichage et son invocation,
ont en revanche eu un effet (et un coût ?) politique.
III.2.7 - L'affichage politique de la fermeture des frontières
et la législation sur les étrangers depuis 1986 :
la fuite en avant
Les clauses des conventions bilatérales favorisant l'admission
au travail des ressortissants des pays anciennement colonisés
sont suspendues le 16 septembre 1986. Au même moment,
les attentats terroristes perpétrés à Paris fournissent
le prétexte pour justifier l'instauration de la pratique des
visas, qui sera ensuite discrètement et progressivement supprimée
pour les seuls ressortissants des pays développés.
Ce sont aussi les avantages acquis par l'instauration de la carte
de dix ans qui vont être remis en cause par des pratiques préfectorales
restrictives. Les lois suivantes vont aussi venir durcir les conditions
d'attribution ou de renouvellement des titres, y compris la carte de
dix ans, avec l'objectif proclamé de limiter ou supprimer les
flux migratoires : ce seront la loi Pasqua de 1986 (notablement
atténuée par la loi Joxe de 1989) puis les lois Pasqua
(1993) et Debré (1997) sur l'entrée et le séjour.
En matière de travail, notons la pratique de plus en plus fréquente
à délivrer des titres temporaires (« salarié »,
« commerçant », « visiteur »,
« membre de famille » voire des autorisations provisoires
ou des récépissés) à des personnes destinées
à demeurer en France au lieu de leur attribuer une carte de résident.
La part des étrangers résidents soumis à autorisation
de travail a probablement augmenté depuis le début des
années quatre-vingt-dix [53].
On ne sait pas toutefois si cette tendance à l'attribution de
titres de séjour temporaires se poursuivra avec les nouvelles
dispositions de la loi Chevènement de 1998.
L'opposabilité à la situation de l'emploi pour une autorisation
de travail reste en effet la règle. La loi du 11 juillet 1979
avait limité l'arbitraire total de l'administration, obligeant
cette dernière à motiver en droit et en fait ses refus
d'autorisation de travail. La jurisprudence est venue ensuite quelque
peu encadrer les pratiques administratives exagérément
et systématiquement restrictives [54].
Mais, les intéressés méconnaissent leurs droits
et font très rarement des recours devant les tribunaux contre
les refus abusifs d'autorisation des directions départementales
du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Il s'avère
par ailleurs que, dans ce cadre légal, ce sont encore les entreprises
qui peuvent le mieux parvenir à argumenter devant la direction
départementale du travail, et le cas échéant devant
le juge, sur la spécificité de l'emploi proposé
à laquelle la situation de l'emploi ne pourrait être opposée.
Dans le cadre de la libre circulation en Europe, les ressortissants
communautaires ont obtenu très progressivement la possibilité
d'accéder, en principe au moins, à tout un ensemble de
professions qui leur étaient jusque là interdites (cf.
IV). Mais, le cadre juridique européen n'autorise toujours pas
un étranger d'un pays tiers à l'Union européenne
et résidant dans un Etat membre à travailler dans un autre
Etat membre de l'Union, qu'il vienne résider ou non dans ce second
Etat. Cette situation pénalise les étrangers vivant dans
des zones d'emploi frontalières (cf. IV).
La volonté d'empêcher les étrangers d'accéder
à certaines professions est toujours tenace et conserve une certaine
actualité. La fermeture à l'immigration de travailleurs
permanents a conduit peu à peu à restreindre l'accès
au territoire et au marché du travail à d'autres catégories
d'étrangers, suspectés de vouloir s'installer et/ou de
devenir travailleur : les membres de famille par des restrictions
en matière de regroupement familial, les étudiants par
limitation des entrées, des possibilités de travailler
et de prolonger le séjour, les demandeurs d'asile par l'interdiction
de travailler décidée en 1991 par voie de circulaire.
La crainte de « créer un appel d'air »
a abouti à restreindre l'entrée, le séjour mais
aussi le droit au travail des étudiants. C'est sur eux
qu'a été expérimentée la pratique des visas
de long séjour, institués pour eux en 1977. Ils seront
intégrés à la mesure générale sur
les visas, introduite initialement de façon provisoire en 1986
suite aux attentats terroristes. A partir de 1985, l'octroi de la carte
de séjour étudiant jusque là du ressort de la commission
de séjour de l'établissement scolaire devient de la responsabilité
de la préfecture. Auparavant, l'étudiant doit avoir obtenu
auprès des autorités consulaires un visa délivré
selon des critères restrictifs et confidentiels. Lors du renouvellement
de la carte de séjour d'un an, les préfectures ont durci
les conditions. Toute possibilité de prolonger le séjour
ou de s'installer en France après les études a été
tarie, successivement par les lois Pasqua de 1986 et de 1993 (cf.
encadré 12). Enfin, des circulaires prises
en 1976 et en 1985 ont restreint le droit au travail de l'étudiant
étranger titulaire de la carte de séjour étudiant,
créant une discrimination par rapport à l'étudiant
français ou l'étudiant étranger résidant
en France avec un autre statut (cf. encadré
12).
Encadré 12 - Les étudiants étrangers |
Diminuer les entrées, limiter la durée de séjour,
restreindre le droit au travail, tels sont les axes majeurs de
la politique de la France relativement aux étudiants étrangers
[Slama, 1997, 1998]. Si cette politique est fondée sur
la méfiance et l'obsession de la fraude, l'enseignement
supérieur français reste encore fréquenté
par un nombre important d'étudiants de nationalité
étrangère (environ 150 000, dont 125 000
dans les universités). La logique de la suspicion a cependant
conduit à durcir les conditions d'entrée et de séjour,
de peur que les étudiants ne s'installent. C'est probablement
également dans cette logique qu'a également été
restreint le droit au travail des étudiants étrangers.
Concernant l'entrée en France, les mesures restrictives
prises à partir de 1977 pour les étudiants étrangers
(notamment l'institution pour eux des visas de long séjour)
n'ont pas eu d'effets immédiats, mais depuis 1984 leur
part relative a régressé passant de 14 % à
8 % en 1994. En raison de conditions draconiennes et de pratiques
administratives restrictives, on constate par ailleurs une chute
significative des effectifs depuis 1994 (moins 15 000 étudiants
en trois ans). La croissance du nombre de jeunes issus de l'immigration
et déjà établis en France, qui représenteraient
selon diverses sources de l'ordre de 30 % à 40 %
du total des effectifs, masque d'ailleurs la très forte
baisse des nouvelles entrées. La structure de la population
étudiante étrangère a également beaucoup
changé en passant d'une immigration étudiante de
masse à une migration d'élites : l'étudiant
étranger fréquente les troisièmes cycles
plutôt que les premiers et second cycles. Son visage change
aussi : plus européen, asiatique ou américain.
Le nombre de visas délivrés à des étudiants
algériens est passé de 2 231 en 1991-1992, à
269 en 1992-1993, 175 en 1993-1994 et 22 en 1994-1995, soit une
chute de 99 % en quatre ans.
Pour le renouvellement annuel du titre de séjour étudiant,
les préfectures contrôlent « la réalité
des études » et soumettent les étudiants
à une « obligation de résultats »
auxquels ne sont pas soumis les autres étudiants (qu'ils
soient Français ou étrangers sous un autre statut).
De crainte de les voir s'installer, la loi Pasqua de 1986 leur
a interdit le regroupement familial et la possibilité de
passer du statut d'étudiant à celui de résident
(cette dernière disposition a ensuite été
maintenue par la loi Joxe de 1989). La loi Pasqua de 1993 est
venue encore durcir cette disposition en les excluant de l'obtention
de plein droit de la carte de résident après dix
ans de présence régulière (modification inchangée
depuis). Avec la loi Chevénement, une personne ayant résidé
une partie du temps avec un titre étudiant peut prétendre
de plein droit à un titre de séjour temporaire d'un
an, mais il doit justifier d'une résidence de quinze ans.
Un droit au travail amputé
Le droit au travail de l'étranger titulaire d'une carte
de séjour étudiant a également été
limité par les circulaires du 24 février 1976 et
du 1er août 1985. L'étudiant étranger doit
obtenir une autorisation provisoire de travail (APT) soumise à
la situation de l'emploi et délivrée par la direction
départementale du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle. En outre, l'emploi occupé par un étudiant
étranger ne peut revêtir qu'un caractère accessoire
pour rester compatible avec la poursuite des études. Aussi
ne peuvent-ils plus occuper pendant les périodes scolaires
que des emplois à temps partiel inférieur à
20 heures par semaine, et à temps plein pour une durée
maximale de trois mois durant les périodes de vacances
scolaires. Par ailleurs, ils ne peuvent s'inscrire à l'ANPE
en cas de perte d'emploi et ne peuvent non plus prétendre
à une indemnisation en cas de chômage.
Le droit au travail des étudiants algériens
Une circulaire du 14 mars 1986 étendait l'obligation
d'autorisation provisoire de travail aux étudiants algériens
alors que, pour ces derniers, une convention internationale (l'accord
franco-algérien du 27 décembre 1968) aurait dû
prévaloir. Suite à un pourvoi contre ce texte en
mai 1986, le Conseil d'Etat a annulé la nécessité
d'obtenir une autorisation provisoire de travail (APT) pour les
étudiants algériens (arrêt GISTI du 29 juin
1990). L'administration a ensuite mis près de sept ans
pour prendre des dispositions et mettre ses pratiques en conformité
avec cet arrêt en levant la condition d'APT pour les étudiants
algériens (note DPM du 24 février 1997). Toutefois,
elle confine encore ces derniers à des emplois à
temps partiel (inférieur à 20 heures) pour les périodes
scolaires. Un arrêt du Conseil d'Etat du 25 avril 1997 (Meftah
c/préfet des Yvelines) pose le principe que les étudiants
algériens peuvent exercer une activité salariée,
même supérieure à vingt heures par semaine
et sans avoir besoin d'une APT, dès lors que cette activité
est exercée à titre accessoire en même temps
que la poursuite de leurs études. Les étudiants
algériens sont donc toujours dans l'attente d'un texte
d'application mettant les pratiques administratives en conformité
avec le droit.
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Le marché du travail va également être fermé
aux demandeurs d'asile, suspectés aussi d'être en
fait des travailleurs déguisés. Aussi une circulaire du
26 septembre 1991 étend l'opposition de la situation de l'emploi
à tous les demandeurs d'asile, ce qui signifie en pratique que,
sauf très rares exceptions, ils n'ont plus le droit de travailler
et n'ont aucune autre ressource légale possible pour vivre qu'une
très faible allocation d'insertion versée pendant un an
au plus [55].
Pour l'exercice de la médecine aussi bien à titre libéral
qu'à titre salarié, non seulement des mesures de restrictions
adoptées dans les pires moments des années 30 n'ont pas
été levées mais de nombreuses mesures prises ces
dernières années montrent une volonté toujours
très vivace d'écarter tout signe d'altérité
dans cette profession. Ces mesures visent non seulement les médecins
étrangers mais aussi les médecins français à
diplôme étranger et les médecins français
naturalisés, y compris quand leur diplôme a été
obtenu en France (cf. infra, encadré
16).
Avec la création par la loi Chevènement de cartes temporaires
« scientifiques » et les textes favorisant une immigration
de travail hautement qualifié (les informaticiens par exemple),
la politique d'immigration favorise plus ouvertement une immigration
d'élites au détriment de l'immigration moins qualifiée [56].[57]
Notes
[51] Ils étaient
déjà électeurs et éligibles à ces
fonctions depuis les lois des 9 et 11 juillet 1975, mais soumis à
des conditions particulières (maîtrise de la langue française...).
Ils peuvent également être délégués
syndicaux (art. L. 412-14). Ils peuvent enfin être administrateurs
ou dirigeants de syndicats, mais avec des conditions particulières
(travailler depuis au moins cinq ans) et à condition de ne
pas représenter plus d'un tiers du total.
[52] De 1984 à
1996, la formule concernera en tout 32 000 travailleurs, soit
72 000 personnes en y incluant les membres de famille.
[53] Si une publication
du Ministère de l'Intérieur a fourni la répartition
des étrangers au 31/12/94 selon le titre de séjour (87 %
des étrangers disposaient d'un titre de 10 ans), il n'est pas
possible de connaître l'évolution de cette répartition
car le Ministère ne l'a pas rendue publique pour les années
antérieures et les années suivantes. En dépit
de l'importance de ces questions dans le débat public de notre
pays, les données de stocks, mais aussi de flux (les nouveaux
titres et les renouvellements), relatives aux titres de séjours,
à leurs évolutions et surtout à leur répartition
selon les divers critères administratifs utilisés ou
encore selon les caractéristiques socio-démographiques
connues des préfectures constituent des informations qui, jusqu'à
ce jour, ont été occultées au citoyen.
[54] Voir « Le
Conseil d'Etat se penche sur la situation de l'emploi »,
Plein Droit n° 31,
mars 1996, pp. 8-13. Pour une interprétation à
des fins plus « administratives » de la jurisprudence,
voir Note d'information DPM/DM 2-3 n°97-606 du 16 septembre 1997
relative au contentieux des autorisations de travail et du regroupement
familial (Bulletin Officiel du Ministère de l'Emploi et
de la Solidarité n° 42, 10 novembre 1997).
[55] Cette prestation
est depuis début 1998 d'environ 1 700 francs par mois. Auparavant,
elle n'avait pas été revalorisée depuis 1986
et s'élevait à 1 300 francs. Sur cette prestation
et son évolution, voir Cerc-Association (1997), Les minima
sociaux : 25 ans de transformations, Les dossiers de Cerc-Association
n°2. Sur la portée et les conséquences du changement
apporté par la circulaire de septembre 1991 pour les demandeurs
d'asile, voir Comède (1996).
[56] Suivant en cela
les recommandations de Patrick Weil (1996, 1997).
[57] Les analyses
et références juridiques de cette partie, ainsi que
de nombreux commentaires, sont directement empruntés à
Lochak (1990,
1995e).
Dernière mise à jour :
13-11-2000 16:48.
Cette page : https://www.gisti.org/doc/presse/1999/cerc/chapitre-3-5.html
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