Projet de décret
Décret relatif à la rétention administrative
[Ce projet de décret a été soumis au Conseil
d'Etat le 26 septembre 2000.]
LE PREMIER MINISTRE
sur le rapport du ministre de l'intérieur,
VU l'article 73 de la constitution ;
VU l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative
aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, notamment
son article 35 bis ;
VU le décret n° 82-389 du 10 mai 1982 modifié relatif aux
pouvoirs du préfet et à l'action des services et organismes publics
de l'Etat dans les départements ;
VU le décret n° 98-503 du 23 juin 1998 pris pour l'application
de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile et relatif
à l'asile territorial ;
Après avis du Conseil d'Etat ;
Décrète :
Article premier
Les étrangers qui font l'objet des mesures définies à l'article 35 bis
de l'ordonnance du 2 novembre 1945 exercent leurs droits dans les
centres et les locaux de rétention administrative conformément aux dispositions
de la loi et du présent décret.
Titre I
Les centres de rétention administrative
Article 2
Les étrangers mentionnés à l'article premier sont maintenus, sous réserve
des dispositions de l'article 11 du présent décret, dans des établissements
créés, après agrément du ministre de l'intérieur et, le cas échéant,
du ministre de la défense, par le préfet territorialement compétent
et dénommés « centres de rétention administrative ». La liste
de ces centres est fixée par arrêté interministériel.
Article 3
Les centres de rétention administrative ont vocation à recevoir les
étrangers précités, quels que soient leur résidence, le lieu de leur
interpellation et le service qui les a interpellés. Le préfet qui a
engagé la procédure d'éloignement en conserve cependant la responsabilité
jusqu'à son terme, quel que soit le centre dans lequel est maintenu
l'étranger concerné.
Article 4
Le préfet désigne par arrêté le service de police ou l'unité de gendarmerie
territorialement compétent(e) chargé(e) d'assurer la garde et le fonctionnement
du ou des centre(s) dont il est responsable. Il nomme, sur proposition
du chef de ce service ou du commandant de cette unité, un chef de centre.
Article 5
Le chef de centre est responsable de la gestion et de l'organisation
du centre. Il a autorité sur l'ensemble des personnes qui concourent
à sa garde et à son fonctionnement et il est notamment responsable :
- de la tenue du registre de rétention, dont un modèle est fixé par
arrêté ministériel, et de sa communication au procureur de la République,
à sa demande ;
- des mouvements des étrangers maintenus ;
- de la sécurité et du maintien de l'ordre à l'intérieur du centre
et à ses abords immédiats ;
- de l'application du règlement intérieur prévu à l'article 7
du présent décret ;
- du respect des conditions nécessaires à l'exercice, par les étrangers
maintenus, des droits que leur donne la loi ;
- de la mise en oeuvre des conventions passées avec des organismes
extérieurs, publics ou privés.
Article 6
Les centres de rétention administrative doivent disposer des locaux,
espaces et équipements permettant l'hébergement, la restauration, la
détente, les soins et l'exercice des droits des étrangers.
Article 7
Les conditions de vie des étrangers maintenus dans les centres, ainsi
que celles relatives à l'exercice de leurs droits, font l'objet d'un
règlement intérieur propre à chaque centre et approuvé par le préfet
territorialement compétent. Ce règlement doit être conforme à un modèle
fixé par arrêté interministériel.
Article 8
Pendant toute la durée de leur rétention, les étrangers sont logés,
nourris et soignés à titre gratuit.
Tous les soins assurés dans l'enceinte du centre de rétention sont
gratuits. Ils font l'objet d'une convention passée, pour chaque centre,
entre le préfet territorialement compétent et un établissement hospitalier,
selon les modalités définies par arrêté conjoint des ministres concernés.
Article 9
Les étrangers maintenus dans un centre de rétention administrative
bénéficient d'un accompagnement social comprenant notamment des actions
d'accueil, d'information et de soutien psychologique et moral.
Pour la mise en oeuvre de cet accompagnement social, l'Etat dispose
de l'Office des migrations internationales, avec lequel il détermine
par voie de convention les conditions d'affectation et d'intervention
des agents de l'établissement.
L'Etat peut en outre, pour contribuer à l'accomplissement de cette
mission, passer convention avec une association à caractère humanitaire.
Dans ce cas, les membres désignés par cette association et acceptés
par le préfet territorialement compétent pour le centre dans lequel
leur intervention est envisagée reçoivent de ce préfet une habilitation
donnant accès au centre.
Un local du centre est mis à la disposition de ces personnes habilitées.
Article 10
Lorsqu'un étranger maintenu dans un centre de rétention demande à bénéficier
de l'asile territorial, l'audition prévue à l'article 2 du décret
n° 98-503 du 23 juin 1998 pris pour l'application de la loi
du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile et relatif à l'asile
territorial est assurée par un agent du centre désigné par le préfet
et spécialement formé à cet effet.
Lorsque l'étranger se trouve dans un local défini au titre II
du présent décret au moment où il demande l'asile territorial, il est
entendu par un agent d'un centre de rétention mentionné au premier alinéa
du présent article.
Titre II
Les autres locaux
de rétention administrative
Article 11
Lorsque les conditions dans lesquelles s'est effectuée l'interpellation
d'un étranger qui est l'objet d'une mesure d'éloignement font obstacle
à son placement immédiat dans l'un des centres mentionnés à l'article 2,
l'intéressé peut être placé en rétention dans ces locaux prévus à cet
effet et spécialement désignés par arrêté préfectoral.
Cet arrêté précise le service de police ou l'unité de gendarmerie territorialement
compétent pour la garde et le fonctionnement de ces locaux. Ceux-ci
peuvent être créés, de manière intermittente, lorsque les besoins n'exigent
pas leur ouverture permanente.
Article 12
Le placement dans ces locaux présente un caractère provisoire. Le transfert
dans un des centres mentionnés à l'article 2 doit intervenir dès
que possible.
En tout état de cause, ce transfert doit intervenir, au plus tard,
dès que le président du tribunal de grande instance où, s'il y a appel,
le premier président de la Cour d'appel a statué sur la demande de prolongation
de la rétention.
Si la mesure d'éloignement en vertu de laquelle l'étranger est maintenu
en rétention est un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière
notifié par la voie administrative qui fait l'objet d'un recours devant
le tribunal administratif, l'étranger peut également être maintenu dans
ces locaux de rétention jusqu'à ce que le tribunal administratif ait
statué sur son recours.
Article 13
Les étranges maintenus peuvent bénéficier du concours de l'association
mentionnée à l'article 9, à leur demande ou à l'initiative de cette-ci,
dans les conditions définies par la convention précitée.
Article 14
Ces locaux de rétention doivent être aménagés de manière à assurer
gratuitement, aux étrangers qui y sont maintenus, l'hébergement, la
restauration et l'exercice de leurs droits. Un registre de rétention,
dont le modèle est fixé par arrêté interministériel, y est ouvert en
permanence et communiqué au procureur de la République à sa demande.
Les étrangers bénéficient à titre gratuit des soins médicaux nécessaires
durant leur séjour dans ces locaux. Ces soins font l'objet d'une convention
passée entre le préfet territorialement compétent et un établissement
hospitalier, selon les modalités définies par arrêté conjoint des ministres
concernés.
Titre III
Dispositions communes
Article 15
Les frais d'entretien et de fonctionnement des centres de rétention
administrative et des autres locaux de rétention sont à la charge des
ministères qui en sont responsables. Les frais relatifs à l'ensemble
des prestations médicales sont à la charge du ministère de l'emploi
et de la solidarité. Les rémunérations du personnel qui en assure le
fonctionnement sont à la charge de leur ministère de tutelle.
Article 16
Un arrêté conjoint des ministres de l'emploi et de la solidarité, de
l'intérieur et de la défense fixe la liste des équipements nécessaires,
différenciés selon les centres et les locaux de rétention administrative,
pour héberger les étrangers maintenus dans des conditions satisfaisantes.
Les centres et les locaux de rétention administrative seront mis en
conformité avec les dispositions de l'arrêté précité dans un délai de
trois ans suivant la publication du présent décret au Journal Officiel
de la République Française.
Les autres dispositions du décret sont applicables dès sa publication.
Article 17
Le ministre de l'emploi et de la solidarité, le garde des sceaux, ministre
de la justice, le ministre de l'intérieur et le ministre de la défense
sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent
décret.
Fait à Paris, le
Par le Premier Ministre
Le Ministre de l'emploi et de la solidarité
Le Garde des Sceaux, Ministre de la justice
Le Ministre de l'intérieur
Le Ministre de la défense
Dernière mise à jour :
8-10-2000 15:17.
Cette page : https://www.gisti.org/doc/actions/2000/retention/projet-decret.html
|