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L'immigration,
une question trop sensible
par Danièle Lochak
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Texte publié dans Questions sensibles, publication
du CURAPP, PUF, 1998.
Reproduction interdite sauf
pour usage personnel
Que l'immigration soit une question sensible, cela paraît relever
de l'évidence. Mais elle peut être sensible pour des raisons
variables selon la conjoncture politique, selon les époques,
et susciter de la part des gouvernants des réponses différentes.
Ce sont les stratégies adoptées par les hommes politiques
face à une question sensible que l'on se propose de décrire
ici.
Une question sensible, c'est une question qu'il faut aborder et traiter
avec précaution, parce qu'elle est délicate. On peut penser
qu'elle est délicate parce qu'elle est difficile à régler,
qu'elle est objectivement complexe, n'étant pas susceptible de
recevoir une réponse simple. Mais tel n'est pas le critère
de la question sensible. Une question difficile n'est pas nécessairement
une question sensible : la sécurité routière
n'est pas une question sensible, pas plus que ne l'est le suicide des
adolescents, ou même la justice fiscale. Il n'y a pas de question
sensible en soi, de question « objectivement » sensible :
la sensibilité d'une question, comme le rappelle Jacques Chevallier,
est toujours construite, dans un contexte social et politique donné.
Une question peut être sensible, en premier lieu, parce qu'elle
est potentiellement explosive, parce qu'elle est susceptible d'entraîner
des emportements incontrôlés, de susciter des mobilisations,
voire de déboucher sur une crise politique. Elle peut aussi être
sensible en raison de ses retombées électorales prévisibles
et/ou redoutées. Elle peut enfin être sensible en raison
du fort investissement idéologique dont elle fait l'objet, de
sorte qu'elle risque de donner lieu à des affrontements dangereux
pour la cohésion nationale en suscitant des dérives par
rapport aux valeurs « républicaines » sur
lesquels le consensus s'est forgé. Ces trois hypothèses
ne sont évidemment pas exclusives l'une de l'autre.
Face à une question sensible, plusieurs stratégies ou
plus prosaïquement plusieurs tactiques sont envisageables,
qui peuvent être utilisées alternativement ou cumulativement.
La première consiste à lui apporter une réponse :
on peut répondre immédiatement à toute sollicitation
de l'opinion, pour tenter de couper court aux risques de mobilisation
étant entendu que cette tactique ne préserve
pas contre des sollicitations ultérieures dans le même
sens ou en sens inverse ; on peut aussi s'efforcer de la régler
au fond en en faisant l'objet d'une politique publique, de façon
à ce qu'à terme cette question disparaisse comme question
sensible.
Seconde possibilité : la question sensible est érigée
en enjeu dans l'affrontement entre les partis. Un enjeu, c'est un thème
qui non seulement mobilise et suscite des controverses, mais qui constitue
un point d'ancrage autour duquel le débat politique se structure,
qui permet à chacun des camps qui s'affrontent dans une lutte
concurrentielle de se distinguer de l'adversaire.
Il n'y a pas incompatibilité entre les deux situations que
l'on vient de décrire : une politique publique peut en effet
être elle-même constituée en enjeu de la compétition
politique. Enjeu direct, dans la mesure où les objectifs assignés
à une politique publique sont une façon de se distinguer
de ses adversaires ou de montrer à l'opinion que l'on prend en
compte, mieux que ceux-ci, ses préoccupations ; enjeu indirect
en ce sens que l'enjeu d'une politique publique, c'est l'accroissement
ou la diminution de la légitimité des gouvernants selon
qu'elle réussit ou qu'elle échoue. On relèvera
que l'enjeu d'une politique publique ne se confond pas avec l'objectif
officiellement poursuivi. Pour illustrer cette affirmation, et en anticipant
sur les analyses qui vont suivre, on peut dire que ce qui est en jeu
dans la politique actuelle de l'immigration, c'est la maîtrise
des flux migratoires ; mais que l'enjeu de cette politique, c'est
de démontrer la capacité du gouvernement à maîtriser
effectivement ces flux, à les maîtriser en tous cas mieux
que son adversaire, l'opposition devant de son côté s'efforcer
de convaincre qu'elle fera mieux que le gouvernement en place si elle
arrive au pouvoir.
Une troisième attitude consiste, à l'inverse, en une
tactique d'évitement. Le but est d'éviter précisément
de la question sensible ne se constitue en enjeu, soit parce qu'on pense
qu'on ne peut qu'y perdre sur le plan électoral, soit parce qu'on
craint qu'elle ne suscite des dérives dangereuses. Cette tactique
peut revêtir à son tour deux formes : soit on cherche
à évacuer la question du champ politique - c'est
la stratégie de l'abstention ou du silence ; soit on s'efforce
de refroidir le débat politique par la recherche d'un consensus
avec les autres forces politiques.
On peut tenter de relire toute l'histoire de la politique face à
l'immigration depuis la fin du XIXè siècle à la
lumière de cette grille d'analyse. Par « politique »
on entendra aussi bien les politiques publiques (policies) que
les luttes politiques (politics), et autant les discours que
les mesures adoptées ou les pratiques.
1880-1940
Durant toute la IIIè République, il n'existe pas à
proprement parler de politique publique en matière d'immigration.
La question n'en apparaît pas moins sur le devant de la scène
politique où elle émerge comme question sensible, d'abord
de façon sporadique, puis de façon permanente.
La dictature de l'opinion
Jusqu'à la premier guerre mondiale, la question des étrangers
est surtout posée dans des circonstances de crise économique
ou d'agitation politique. Les pouvoirs publics cèdent alors volontiers
aux emportements de l'opinion en adoptant des mesures propres à
la calmer, sans craindre d'en conforter les tendances xénophobes.
Mais une fois les passions retombées on ne se préoccupe
guère d'appliquer les mesures annoncées car elles ne s'inscrivent
pas dans une politique volontariste : on est encore à une
époque où le laissez-faire, laissez-passer est la règle
en matière d'immigration.
Ainsi, à la faveur de la longue récession dans laquelle
la France s'installe dans les années 1880, les mécontentements
sectoriels qui existent dans certaines régions où se concentre
la main d'oeuvre étrangère se cristallise en un mouvement
d'opinion dirigé contre la concurrence du travail étranger
que certains politiciens reprennent à leur compte. Les premières
mesures de contrôle obligeant les étrangers à se
déclarer en mairie interviennent en 1888 ; elles seront
perfectionnées par une loi de 1893, adoptée dans une conjoncture
politiquement troublée scandale des décorations,
boulangisme, scandale de Panama, recrudescence des attentats anarchistes
qui exacerbe les tensions et dans laquelle les préoccupations
de police viennent redoubler les préoccupations économiques.
Mais une fois la prospérité revenue et la stabilité
politique retrouvée, la pression se relâche. L'échec
des nombreuses tentatives une cinquantaine de propositions
de loi sont déposées pour élaborer
une réglementation générale plus stricte de l'immigration
atteste l'insuffisance de l'enjeu : la question des étrangers
ne préoccupe que des catégories peu nombreuses de la population
une partie des employeurs et de la classe ouvrière.
A la fin de la guerre, en revanche, le statut des étrangers
et la question de l'immigration reviennent au premier plan des préoccupations
et vont représenter un enjeu majeur des controverses politiques
et idéologiques de l'entre-deux guerres. L'immédiat après-guerre
est marqué par une forte poussée nationaliste qui entretient
une atmosphère de méfiance et d'hostilité de nature
essentiellement politique envers les étrangers. La question de
la main-d'oeuvre immigrée, quant à elle, surgit au rythme
de l'alternance des périodes de crise économique 1924,
1927, 1931 et de prospérité.
Le seul débat qui, en dehors de ces périodes, va susciter
l'intérêt et parfois la passion de l'opinion publique en
dépassant le cercle restreint de la classe politique porte sur
l'octroi de la nationalité française. La discussion qui
précède l'adoption de la loi du 10 août 1927 voit
s'affronter deux conceptions de la nation : l'une volontariste
et ouverte, pour laquelle il convient d'accueillir généreusement
tous ceux qui souhaitent se fondre dans la nation française,
l'autre exclusive et frileuse qui, identifiant la nation soit à
la communauté de sang et de race, soit à une histoire
commune et un long passé vécu ensemble, est réservée
à l'idée d'y admettre de nouveaux membres et dénonce
les futurs « Français de papier »... que
Vichy s'empressera de dénaturaliser.
A partir des années trente, la dépression consécutive
à la grande crise, puis à partir de 1933 l'afflux des
réfugiés, enfin l'approche des hostilités et la
tension internationale qui en résultent alimentent une vague
de xénophobie sans précédent. Face à la
montée du chômage les clivages politiques s'estompent et
un consensus s'instaure à peine entamé par
quelques voix dissidentes émanant de personnalités isolées
comme Paul Reynaud ou de groupes minoritaires comme la Ligue des droits
de l'Homme ou le PCF pour réclamer et obtenir le
renvoi des immigrés. Lorsque les réfugiés d'Allemagne
et d'Europe de l'Est commencent à affluer, les pouvoirs publics
cèdent à la pression des corporatisme en adoptant des
mesures protectionnistes contre la concurrence des artisans, des commerçants
et des médecins étrangers.
Pendant ces années, la gauche socialiste critique les excès
de cette politique : elle dénonce l'arbitraire des pratiques
administratives, elle proteste contre les refoulements autoritaires
et massifs de travailleurs étrangers. Mais une fois au pouvoir,
ces idées ne trouvent pas de traduction concrète. La période
du Front populaire, si elle se traduit par une attitude plus souple
et plus humaine, en particulier vis-à-vis des réfugiés,
ne débouche sur aucune initiative marquante en ce qui concerne
le statut des étrangers. La base reste dans l'ensemble hostile
aux étrangers et ceci pèse plus lourd que les convictions
des dirigeants dans la définition des politiques d'immigration.
A la Libération et pendant près d'une trentaine d'années,
la question de l'immigration disparaît comme question sensible.
L'ordonnance de 1945, qui instaure le monopole de l'ONI (Office national
d'immigration) pour le recrutement de la main d'oeuvre étrangère,
tente de poser les bases d'une politique volontariste en matière
d'immigration. Mais la question ne représente pour autant ni
un enjeu, ni une question sensible. Le débat qui met aux prises
les démographes, qui souhaitent favoriser une immigration de
peuplement, et les économistes, favorables à une immigration
de main d'oeuvre, reste confiné à un petit cercle d'experts.
Et comme, presque immédiatement, le monopole de l'ONI est battu
en brèche avec l'assentiment tacite des pouvoirs publics, on
ne peut même pas parler d'une politique publique en matière
d'immigration, sauf à qualifier telle une politique qui se résout
à « laisser-faire laisser-passer ». Il en
ira ainsi jusqu'aux années 70, lorsque les experts du Plan commencent
à s'inquiéter des premières tensions qui apparaissent
sur le marché de l'emploi.
1974-1998
Ce sont les circulaires Marcellin-Fontanet de 1972 qui, en interdisant
la régularisation des travailleurs entrés en infraction
au monopole de l'ONI, provoquent les premières mobilisations
des « sans papiers », pour que la question de l'immigration
émerge sur la scène politique. Un an plus tard, c'est
le « premier choc pétrolier », suivi en 1974
de l'annonce de la fermeture des frontières à l'immigration
de travailleurs. La montée inexorable du chômage qui favorise
les tendances xénophobes latentes, l'alternance au pouvoir à
partir de 1981, l'ombre portée du Front national enfin :
tout concourt à faire de l'immigration, et cette fois de façon
durable, une question sensible.
Des impératifs contradictoires
L'immigration semble a priori un thème particulièrement
apte à être transformé en enjeu politique :
il cristallise l'attention de l'opinion, il rend visible la ligne de
partage entre la droite et la gauche, il permet également de
remobiliser, d'un côté comme de l'autre, sur des thèmes
à connotation idéologique forte. De fait, chaque alternance,
sans exception, à partir de 1981, se traduira par une remise
en chantier de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui régit
l'entrée et le séjour des étrangers en France.
Mais d'autres facteurs viennent contrecarrer cette tendance : d'une
part l'existence d'un consensus sur la nécessité de « maîtriser
les flux migratoires », d'autre part les conséquences
ambivalentes de la présence encombrante du Front national sur
la scène électorale à partir de 1983.
La politique officielle en matière d'immigration est définie
dès 1976 : refus de toute immigration nouvelle de travailleurs
d'un côté, intégration des étrangers déjà
établis en France de l'autre (même si en pratique le second
objectif ne dépassera jamais le stade des intentions, tandis
que le premier se révèlera hors de portée, malgré
l'énergie dépensée, en termes de réformes
législatives et de mise en oeuvre de moyens policiers, pour l'atteindre).
Et sur ces objectifs, un consensus se dégagera assez vite : non
seulement la gauche ne les remet pas en cause lorsqu'elle arrive au
pouvoir, mais elle fera également sien l'objectif de lutte contre
l'immigration dite « clandestine », considérée
comme le corollaire nécessaire de l'arrêt de l'immigration.
L'enjeu, par conséquent se déplace, la gauche et la droite
cherchant à se distinguer l'une de l'autre non pas sur les objectifs
mais sur les moyens mis en oeuvre pour les atteindre. La première
sera tentée de mettre en avant les droits de l'homme, se préoccupant
par conséquent d'accroître les garanties offertes aux étrangers,
la seconde mettra plus volontiers l'accent sur la nécessité
de la répression comme condition de l'efficacité de la
politique de fermeture des frontières.
Mais même sur ce terrain les partis de gouvernement sont entravés
dans leur propension à cultiver leur différence par rapport
à leur adversaire par d'autres considérations : la
gauche, en effet, n'entend pas laisser à la droite le monopole
de l'efficacité et cherche à montrer qu'elle sait conjuguer
respect des droits de l'homme et fermeté dans la lutte contre
l'immigration clandestine ; la droite, de son côté,
tentée de faire de la surenchère dans la répression
lorsqu'elle arrive au pouvoir après avoir dénoncé
dans l'opposition le « laxisme » de la gauche, doit
néanmoins, en sens inverse, prendre certaines précautions
pour ne pas donner l'impression de négliger les contraintes de
l'Etat de droit et de brader les « valeurs républicaines ».
Le second frein à la constitution de l'immigration en enjeu
politique, c'est que la question est trop brûlante, qu'elle est
porteuse de dangers potentiels qui à certains moments peuvent
inciter à adopter une stratégie d'évitement.
L'ombre portée du Front national sur la politique d'immigration
puisque c'est bien de lui qu'il s'agit produit
donc finalement des conséquences ambivalentes. Elle incite les
partis de gouvernement à adopter une ligne « dure »
sur la question de l'immigration par simple calcul électoral :
la gauche pour ne pas perdre de voix au profit de la droite, la droite
par crainte de céder des voix à l'extrême-droite.
Mais en même temps le souci d'endiguer des dérives xénophobes
et racistes interdit de s'aligner complètement sur l'extrême-droite
et conduit à rechercher un équilibre entre ce qu'on fait
et ce qu'on dit : une politique répressive se conjuguera
souvent avec un discours modéré qui minimise le danger
qu'est censé représenter l'immigration ; inversement
on cherchera à compenser une politique plus libérale par
un discours plus « dur ».
Mais dans ce domaine où tout se joue sous le regard de l'opinion,
les discours et les effets d'annonce ont autant d'importance que les
mesures concrètes et les pratiques effectives. La surenchère
répressive, qu'elle se traduise en paroles ou en actes, est autant
une façon pour les gouvernants de montrer à l'opinion
qu'ils n'ignorent pas ses préoccupations qu'un moyen pour mettre
un terme à l'immigration irrégulière, dont il apparaît
à l'évidence qu'elle ne pourra pas être éradiquée.
Or ceci n'est pas sans risque. Car on peut penser qu'à force
de vouloir frapper l'opinion par des mesures symboliques et spectaculaires
les pouvoirs publics ont conforté, au lieu de les stopper, les
tendances xénophobes latentes d'une opinion particulièrement
réceptive, en temps de crise, à la thématique complaisamment
développée par l'extrême-droite.
L'ascension de Giscard d'Estaing à la présidence de
la République coïncide avec les premières retombées
économiques, en France, du choc pétrolier de 1973. Les
dernières années du septennat giscardien voient la situation
des étrangers se détériorer progressivement. La
« nouvelle politique de l'immigration » annoncée
par Paul Dijoud, secrétaire d'Etat chargé de l'immigration,
insiste certes sur la nécessité d'assurer une meilleure
insertion des immigrés dans la société française ;
mais tandis que cette volonté d'insertion a du mal à se
traduire concrètement dans les faits, l'autre volet de cette
politique, axé sur le contrôle des flux migratoires, débouche
lui immédiatement sur une série de mesures restrictives.
A partir d'avril 1977 les problèmes de l'immigration sont confiés
à Lionel Stoléru, secrétaire d'Etat au travail
manuel, qui va attacher son nom, à côté de Christian
Bonnet, ministre de l'Intérieur, et d'Alain Peyrefitte, ministre
de la Justice, à une politique d'extrême rigueur, dont
le but avoué n'est plus seulement de stopper l'immigration mais
d'obtenir la diminution de la population étrangère résidant
en France. Conjuguée avec les préoccupations sécuritaires,
cette politique se concrétise par la multiplication des contrôles
sur la voie publique, les opérations « coup de poing »,
les refoulements massifs d'étrangers en situation irrégulière,
d'abord en marge de la loi, puis légalisés par la loi
Bonnet de janvier 1980, l'expulsion systématique des jeunes étrangers
pour le moindre délit.
L'alternance et ses limites
La gauche dans l'opposition dénonce la répression qui
frappe les étrangers. Et lorsqu'elle arrive au pouvoir, en mai
1981, on constate, tant au niveau du discours que des actes, un changement
d'attitude radical vis-à-vis de la population immigrée.
On ne parle plus de renvoyer chez eux ceux qui sont au chômage,
mais on proclame au contraire le droit de demeurer pour les immigrés
installés en France ; une procédure de régularisation
exceptionnelle est engagée, qui doit permettre à tous
les étrangers en situation irrégulière mais dotés
d'un emploi et entrés en France avant le 1er janvier 1981 d'obtenir
une carte de séjour. La législation est modifiée
et les dispositions de la loi Bonnet remplacées par d'autres,
beaucoup plus protectrices. Ultérieurement, la réforme
de 1984 créant la carte de résident, viendra concrétiser
la reconnaissance du caractère durable de l'installation en France
de la population immigrée et la dissociation du droit au séjour
d'avec l'occupation d'un emploi.
Si la rupture est réelle, elle n'est pourtant pas totale. Sur
cette question sensible, le gouvernement hésite manifestement
à aller jusqu'au bout de ses engagement, comme en témoigne
la rapidité avec laquelle il fait marche arrière sur la
question du droit de vote des étrangers aux élections
locales, qui figurait pourtant dans le programme du PS et parmi les
110 propositions du candidat Mitterrand. De même sont maintenues
en vigueur deux dispositions parmi les plus contestées de la
loi Bonnet et âprement critiquées par l'opposition d'alors :
la faculté de reconduire de force à la frontière
l'étranger expulsé, et la possibilité de maintenir
les étrangers en instance de départ forcé dans
des locaux spéciaux sous surveillance policière jusqu'à
leur départ effectif. Dès lors qu'elle a repris à
son compte l'objectif de fermeture des frontières, la gauche
n'estime pas opportun de se priver d'un moyen d'assurer l'effectivité
des mesures de reconduite à la frontière ; elle se
borne donc à entourer l'exercice de ces prérogatives exorbitantes
de quelques garanties de procédure supplémentaires. Et
dès la fin de l'année 1982, une fois l'opération
de régularisation exceptionnelle achevée, le gouvernement
estime normal, conformément à l'objectif de la fermeture
des frontières, de sévir contre ceux qui se maintiennent
illégalement sur le territoire.
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19-11-2000 11:54.
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