ÉVOLUTION
DE LA JURISPRUDENCE
EN MATIÈRE D'ÉLOIGNEMENT
Décision B. du Conseil
d'État
du 15 janvier 2001
CONSEIL
D'ÉTAT
statuant au contentieux
N° 222020
M. B.
M. Chauvaux
Commissaire du Gouvernement
Séance du 20 décembre 2000
Lecture du 15 janvier 2001
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CONSEILLER D'ÉTAT DÉLÉGUÉ PAR LE PRÉSIDENT
DE LA SECTION DU CONTENTIEUX DU CONSEIL D'ÉTAT
Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2000, enregistrée
au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée
par M. I. B., demeurant (...) à Rubel (77950) ;
M. B. demande au président de la section du contentieux
du Conseil d'État :
- d'annuler le jugement du 2 mars 2000 par lequel le conseiller
délégué par le président du tribunal administratif
de Melun a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté
du ? janvier 2000 par lequel le préfet de Seine-et-Marne
a décidé sa reconduite à la frontière ;
- d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme
et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée,
notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier
1990, la loi du 26 février 1992, la loi du 24 août
1993 et la loi du 11 mai 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête ;
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 22 de
l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : « Le
représentant de l'État dans le département et,
à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté
motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à
la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si
l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un
titre de séjour a été refusé ou dont le
titre de séjour a été retiré, s'est maintenu
sur le territoire au-delà du délai d'un mois à
compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B.
s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois
après la notification, le 19 janvier 1998, de la décision
du préfet de Seine-et-Marne du 10 janvier 1998, lui refusant
la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à
quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas visé
au 3° de l'article 22-1 de l'ordonnance du 2 novembre
1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un
étranger à la frontière ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération
donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre
1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet
d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté
d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté
de reconduite à la frontière, l'autorité administrative
ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à
l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation
irrégulière au regard des règles relatives à
l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit
que l'intéressé doit se voir attribuer de plein un titre
de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il
puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite
à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à
la date à laquelle a été pris l'arrêté
attaqué, M. B. justifiait résider habituellement
en France depuis plus de dix ans et pouvait donc prétendre
de plein droit à la délivrance d'une carte de séjour
en application des dispositions précitées du 3 de
l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre
1955 ; que, par suite, le préfet de Seine-et-Marne ne pouvait,
sans méconnaître ces dispositions, prendre à son
encontre l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède
que M. B. est fondé à soutenir que c'est à
tort que par le jugement attaqué, le conseiller délégué
par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté
sa requête ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement attaqué du conseiller
délégué par le président du tribunal administratif
de Melun et l'arrêté du 17 février 2000 du
préfet de Seine-et-Marne sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera
notifiée à M. I. B., au préfet de Seine-et-Marne
et au ministre de l'intérieur.
Délibéré dans la séance du 20 décembre
2000 où siégeait M. Martin Laprade, Conseiller d'État
délégué par le Président de la Section du
Contentieux, présidant.
Lu en séance publique le 15 janvier 2001.
Le Conseiller d'État délégué par le Président :
Signé : M. Martin Laprade
Le secrétaire :
Signé : Mme Plantard
Dernière mise à jour :
23-10-2001 20:41
.
Cette page : https://www.gisti.org/
doc/jurisprudence/2001/ce-b-2001-01-15.html
|