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ZONE D'ATTENTE
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DEUX RAPPORTS ACCABLANTS DE L'ANAFÉ
Une personne maintenue en zone d'attente peut
« demander l'assistance d'un interprète et d'un
médecin et communiquer avec toute personne de son choix ».
Article 35 quater II alinéa 2 de l'ordonnance du 2 novembre
1945.
Le Conseil d'État a souligné que l'étranger qui
demande son admission au titre de l'asile est maintenu en zone
d'attente « afin qu'il puisse bénéficier
des garanties édictées par les dispositions de l'article 35
quater », « des garanties grâces auxquelles
il est mieux à même de faire valoir ses prétentions
devant l'autorité administrative pour l'examen même de
sa demande d'asile » [6].
Cependant, les témoignages recueillis au cours des visites effectuées
montrent que des étrangers ont des difficultés pour faire
enregistrer leur demande d'asile dans deux situations différentes :
d'une part, certains n'arrivent pas à franchir le premier contrôle
de la PAF et restent dans la partie dite « internationale »
parmi les passagers en transit, d'autre part ils peuvent avoir franchi
ce contrôle mais se trouvent dans les catégories non-admis
ou en transit interrompu et ne parviennent pas à faire enregistrer
leur demande.
Plusieurs étrangers ont été rencontrés
dans les aérogares, dans la « zone internationale »,
espace faisant également partie de la zone d'attente (CR du 26-12-00,
30-12-00, 16-01-01, 28-01-01) : ces étrangers ne bénéficient
alors d'aucune assistance et déclarent souvent soit qu'ils n'ont
rien à manger (CR du 6-12-00), soit qu'ils sont nourris par les
passagers en attente d'un vol (CR du 18-12-00) et souvent ils dorment
sur les banquettes de l'aérogare (CR du 26-12-00). Des étrangers
vus dans les postes de police, dans les salles de correspondance (CR
des 18-12-00, 27-12-00, 30-12-00, 03-01-01) ou dans les lieux d'hébergement
ont témoigné avoir vécu une situation identique
(CR des 26-12-00, 28-01-01). Ces étrangers ont expliqué
que leur demande d'asile n'a été enregistrée qu'après
plusieurs jours passés dans l'aérogare (CR des 18-12-00,
26-12-00, 30-12-00, 03-01-01, 16-01-01), certains y seraient restés
jusqu'à huit jours.
La police affirme qu'elle n'a aucun intérêt à refuser
l'enregistrement de ces demandes mais aussi que celles-ci doivent être
spontanées et qu'il ne leur revient pas d'interroger les étrangers
pour savoir s'ils demandent ou non l'asile (CR 30-12-00). Des étrangers
ont témoigné qu'on leur avait dit d'attendre dans la zone
internationale (CR du 26-12-00). Lors de la visite du 30 décembre,
l'officier de quart a fait remarquer aux visiteurs les demandeurs d'asile
devant la porte du bureau de quart et il a expliqué, pendant
la visite du 28 janvier, que les étrangers présents
en « zone internationale » doivent faire
explicitement une demande, qui est enregistrée en échange
d'information concernant leur vol d'arrivée et qu'il est donc
d'usage de les faire attendre quelques jours. Enfin, les officiers de
quart auraient l'ordre de ne pas enregistrer trop de demandes d'asile
(CR du 28-01-01).
Après le contrôle PAF
Des étrangers maintenus en zone, en situation de non-admis
ou de transit interrompu, ont également témoigné
de difficultés à faire enregistrer une demande d'asile
notamment depuis ZAPI 3 (CR du 28-01-01). Le 22 mars, dix
huit personnes n'avaient pas pu faire enregistrer leur demande d'asile.
Un policier qui venait chercher deux étrangers pour les conduire
à l'aérogare pour un embarquement a prétendu que
c'était dans l'aérogare que leur demande pouvait être
prise en considération (CR du 15-02-01). La demande d'asile d'une
femme a été enregistrée, à ZAPI 3,
après plusieurs tentatives d'embarquement (visite du 13-03-01).
Certains ont vu leur demande enregistrée après avoir
refusé d'embarquer (CR des 26-12-00, 30-12-00, 09-01-01, 10-01-01,
13-03-01). Il est inquiétant de constater que certaines personnes,
dans cette situation, se soient vu répondre : « Toi
tu vas rentrer chez toi » ou encore « Ce
n'est pas mon problème. Tu as déjà perdu toute
ta famille, il est naturel de mourir. Tu dois retourner là-bas »
(CR du 30-12-00). Ou encore « on ne veut pas de vous ici »
(visite du 13-03-01).
Le problème de l'interprétariat a d'importantes conséquences
sur cette situation. L'absence d'interprète et le déroulement
d'une procédure inconnue dans une langue incomprise empêche
parfois les étrangers de pouvoir formuler une demande d'asile.
Deux ressortissants du Sri-Lanka ont été maintenus
en zone d'attente comme non-admis, la procédure s'est déroulé
en anglais, langue qu'ils ne comprenaient pas. C'est uniquement après
une intervention des visiteurs pour qu'ils puissent s'exprimer par l'intermédiaire
d'un interprète qu'ils ont pu formuler leur crainte d'un retour
et leur volonté de demander l'asile (CR du 10-01-01).
Les allégations de violences policières sont fréquentes
et les faits constatés et rapportés dépassent largement
les conséquences de la tension qui peut régner en zone
d'attente. Aux violences physiques s'ajoutent des violences psychologiques :
les étrangers sont réveillés au milieu de la nuit,
pour décliner leur identité à un policier qui frappe
à toutes les portes, parfois plusieurs nuits de suite. Si la
personne doit aller au TGI ou être renvoyée, elle est emmenée
dans une salle au rez-de-chaussée de ZAPI 3, où elle
doit patienter jusqu'à l'heure du départ (8h ou 9h) (visite
du 22-03-01).
À plusieurs reprises, des allégations de violences ont
été rapportées : humiliation (CR des 30-12-00,
28-01-01, 30-01-01), insultes (CR du 13-03-01), agressivité,
coups (CR des 18-12-00, 03-01-01, 05-01-01 28-01-01, 13-03-01) jusqu'au
tabassage (CR du 23-01-01). Si les visiteurs pouvaient difficilement
vérifier ces allégations, ils ont pu constater, lors de
trois visites, que les étrangers rencontrés avaient des
traces de coups (CR des 05-01-01, 28-01-01, 13-03-01). Cette violence
a été reconnue, par le juge délégué
de Bobigny. Dans un arrêt rendu le 5 février 2001,
il a constaté que M. John Ejike portait des traces de coups ;
il a reconnu la voie de fait caractérisée et a annulé
la procédure. La PAF a fait appel de cette décision. Cet
arrêt a été confirmé par la cour d'appel
de Paris dans une ordonnance du 7 février 2001 : « considérant
que John Ejike (...) fait valoir par l'intermédiaire de
son conseil qu'il a fait l'objet de violences lors d'une tentative de
réembarquement le jeudi 1er février 2001 ; qu'il
est produit un certificat médical établi le 6 février
2001 mentionnant diverses lésions, marques et traces d'hématomes
et notamment des « croûtes » manifestant que
ces lésions ne sont pas toutes récentes ; considérant
que la procédure ne fait état d'aucun élément
pouvant laisser penser que l'intéressé a été
blessé avant son appréhension ; qu'il résulte
du certificat médical (...) que John Ejike s'est plaint
de douleurs au « poignet gauche » et à l'« épaule
gauche suite à des coups » (...) qu'il convient dans
ces conditions de confirmer l'ordonnance entreprise ».
Cette violence a souvent lieu dans un aérogare notamment lorsque
les étrangers demandent des informations sur leur situation ou
simplement lorsqu'ils ne répondent pas aux questions qui leur
sont posées (CR des 30-12-00, 05-01-01, 28-01-01, 30-01-01).
Si les lieux d'hébergement semblaient épargnés
par la violence, un étranger a dit avoir subi de tels actes dans
l'aérogare puis à ZAPI 3 (CR du 30-01-01). Ces allégations
de violence sont régulières lors des tentatives d'embarquement
et semblent courantes après un refus d'embarquement (CR des 18-12-00,
03-01-01, 05-01-01, 23-01-01, 28-01-01, 13-03-01). Leur explication
semble liée à la généralisation des refus
d'enregistrer les demandes d'asile. Un officier de quart a même
affirmé que l'attitude de l'étranger pendant la tentative
d'embarquement permettait de « tester » l'authenticité
de la demande d'asile.
Depuis quelques semaines, les témoignages d'actes de violence
se font plus courants. Lors d'une visite à ZAPI 3 le 13 mars,
les visiteurs ont pu recueillir le témoignage d'une femme, ressortissante
de République Démocratique du Congo, victime de violences
depuis son arrivée à Roissy. Interpellée par la
PAF à l'occasion du contrôle passerelle de son avion, cette
femme a été conduite dans les locaux de la police dans
l'aéroport. Elle a signé de force, menacée d'une
gifle, un papier pour quitter la France. Elle a ensuite été
conduite à ZAPI 3. Vers 3h du matin, elle a été
réveillée, on lui a annoncé qu'elle devait partir.
Elle a été transférée à l'aéroport
à 9h du matin : pendant ce transfert, des injures ont été
proférées par les policiers : « cochons »,
« macaques ». Lors d'une tentative d'embarquement
et alors qu'elle résistait, elle a été frappée,
traînée par le bras et s'est fait écraser une jambe
par un policier. Les autres personnes présentes, menottées,
se sont débattues pour ne pas monter dans l'avion et ont reçu
également des coups. Les coups se sont arrêtés lorsque
les agents de la PAF ont vu arriver le bus amenant les passagers du
vol. Ramenée à ZAPI 3 vers 12h, cette femme n'a pas
réussi à descendre du bus du fait de ses blessures, elle
a accepté l'aide d'un policier, qui, en fait, l'a tiré
par les cheveux. Ces violences ont été telles que la police
a préféré l'emmener à l'hôpital, où
un traitement lui a été prescrit. La nuit suivante, toujours
à 3h du matin, elle a été à nouveau réveillée.
Elle a été à nouveau transférée à
l'aéroport, elle y a retrouvé les mêmes personnes
que la veille. À 11h, elle a été ramenée
à ZAPI 3. Le lendemain, l'infirmière la cherchait,
elle le savait, les visiteurs ont compris qu'elle avait peur, qu'elle
n'avait plus confiance en personne.
Pendant la visite du 22 mars, le visiteur a recueilli le témoignage
d'une dizaine de personnes, de nationalité sierra leonaise, guinéenne
et pakistanaise, qui avaient subi des violences à plusieurs reprises
lors de tentatives d'embarquement. Parmi ces personnes, un Sierra Leonais,
arrivé le 17 mars. Il a subi une tentative d'embarquement,
accompagnée de mauvais traitements, dans la nuit du 17 au 18 mars.
Refusant d'embarquer, il a été ramené à
ZAPI 3 où on l'a également battu : pris d'un
malaise cardiaque, le médecin a été appelé.
Cela n'a pas empêché qu'on le ramène à l'aéroport
dans la nuit du 18 au 19 mars pour tenter de le faire monter dans
un avion. Après un nouveau refus, il a été ramené
à ZAPI 3. Le médecin qui l'a vu le 21 mars,
a établi un certificat signalant qu'il avait subi une agression.
Pourtant dans la nuit du 21 au 22 mars, il a été
emmené pour la troisième fois à l'aéroport
et une nouvelle fois battu. Lorsque le visiteur l'a rencontré
il boitait. Le lendemain, selon nos informations, il ne pouvait plus
sortir de sa chambre.
Un Pakistanais témoigne que, dans la nuit du 20 au 21 mars,
lors d'une tentative d'embarquement, il a reçu des coups de matraques,
à tel point qu'il a dû être emmené aux urgences
de l'hôpital. Le visiteur a pu constater qu'il avait sept points
de sutures sur le crâne.
Un Sierra Leonais raconte que dans la nuit du 18 au 19 mars, il
a été frappé et tiré par terre par quatre
policiers parce qu'il refusait de monter dans l'avion. Lorsque le visiteur
l'a rencontré, il avait des plaies aux genoux.
Les étrangers maintenus à ZAPI 3 vivent dans
une profonde angoisse, qui se renforce au fil des jours. Un étranger
raconte que son inquiétude est liée, en partie, aux évènements
auxquels il a assisté le 20 mars, au moment où il
partait pour le TGI de Bobigny. Du camion de police, il a vu des hommes
et des femmes, poignets et chevilles menottés. Certains de ces
étrangers, qui partaient pour l'aéroport, avaient des
ceintures les ligotant au niveau des genoux et des coudes. Les mains
derrière le dos, ils ne pouvaient pas se déplacer et étaient
transportés par les policiers comme de vulgaires objets.
Les propos d'un étranger, libéré, qui devait se
rendre dans un hôtel pour passer la nuit, retranscrivent la crainte
de se déplacer seul dans Paris et il traduisent cette peur de
se faire battre à nouveau. Demandant à un des visiteurs
si ce n'est pas problématique de se présenter dans un
lieu qu'il ne connaît pas, il appuie ces paroles par un geste
qui en dit long : le bras devant le visage, comme un enfant qui
va recevoir une gifle (visite le 21-03-01).
« Le refus d'entrée ne
peut donner lieu à une mesure de rapatriement contre le gré
de l'intéressé avant l'expiration du délai d'un
jour franc. ».
Article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
« Ce délai doit permettre
à l'étranger de faire jouer ses droits et notamment « s'il
le souhaite, d'entrer plus facilement en contact avec les personnes
de son choix ».
Circulaire du 26 juin 1990.
Ce délai est un droit pour l'étranger, s'il ne veut pas
en bénéficier, il doit y renoncer expressément.
Le problème réside dans le fait que la formule utilisée
sur les notifications ne correspond pas à la loi : « [la
loi] vous permet également, si vous le souhaitez, de disposer
d'un délai d'un jour franc avant ce rapatriement. Je renonce
à bénéficier au délai du jour franc avant
ce rapatriement », suivi de deux cases « oui »
et « non ». La présentation de ce
droit dans cette formule ne permet pas à une personne qui ne
connaît pas l'ordonnance du 2 novembre 1945 d'en comprendre
l'importance.
Outre le fait que la formule est incompréhensible, il apparaît
que la case « oui » est très fréquemment
cochée, y compris par des demandeurs d'asile, ce qui est manifestement
contradictoire avec les droits dont ils disposent par ailleurs.
D'après la police, « cette notion est difficile
à expliquer et les étrangers ne la comprennent pas »
(CR du 03-01-01). C'est sans doute pour cela que cette notion ne leur
est pas expliquée, au mépris du droit, comme le montrent
de nombreux témoignages (CR du 27-12-00, 30-12-00). Une telle
pratique est illégale puisque, si les personnes renoncent à
ce droit il est nécessaire que ce soit une décision sans
équivoque. Ainsi ce n'est pas uniquement un problème de
formulation, c'est également celui du respect des procédures
(CR du 27-12-00, 30-12-00).
Tout d'abord il est très difficile pour les étrangers maintenus
en zone d'attente d'entrer en contact avec des personnes qui peuvent
les informer sur leur situation et sur leurs droits.
Mais en plus, en pratique, il est presque impossible de contester un
refus d'entrée :
-
Soit parce que les notifications n'ont pas été remises
et il est donc impossible de connaître les motifs du refus
d'entrée (CR des 27-11-00 et 03-01-01).
-
Soit parce que les notifications ne contiennent aucune information.
Un officier de quart a déclaré à ce propos
« il ne faut pas chercher sur les PV les raisons de
leur maintien » (CR du 30-12-00).
- Soit parce que le refus d'entrée est motivé par l'utilisation
de documents falsifiés sans que la police ne procède
aux vérifications auprès des services consulaires étrangers
compétents, malgré les demandes des personnes maintenues
(CR du 27-12-00 et 15-02-01).
« Il [l'étranger]
peut (...) communiquer avec toute personne de son choix ».
Article 35 quater II de l'ordonnance du 2 novembre
1945.
Le droit de communiquer passe obligatoirement pour les étrangers
enfermés par l'utilisation de téléphones et la
possibilité de recevoir des visites.
Des cabines de téléphones publics ont été
installées dans tous les lieux d'hébergement et dans les
aérogares, pour que les étrangers puissent communiquer
librement. À ZAPI 3, trente deux téléphones
publics sont répartis dans le bâtiment, il est possible
de téléphoner et de recevoir des appels 24h/24. Mais aucun
téléphone n'a été installé dans les
salles de visite, la PAF prévoit que des téléphones
soient mis ponctuellement à disposition en présence de
l'avocat.
Il arrive que certains téléphones soient déficients
ou éloignés des espaces où se trouvent habituellement
les personnes maintenues, ce qui ne leur permet pas de pouvoir
exercer leur droit de communication dans les meilleurs conditions. À
Ibis, en particulier, quatre téléphones étaient
installés pour 120 personnes environ. Les téléphones
étaient régulièrement en panne pendant plusieurs
jours avant d'être réparés, une grève des
services Télécom d'ADP pendant plus de 15 jours avait
empêché toute réparation (CR des 18-12-00, 10-01-01).
À ZAPI 2, les téléphones publics ont été
installés à l'extérieur, ce qui entraîne
au moins deux inconvénients : d'une part, il est difficile
d'entendre le téléphone sonner, d'autre part, rien n'est
prévu pour protéger les utilisateurs des intempéries
(CR du 26-12-00).
Enfin, chaque étranger maintenu se voit normalement remettre
une carte téléphonique par l'OMI dès son arrivée.
Il a parfois été constaté que des personnes arrivées
depuis un jour ne disposaient pas de cette carte (CR du 30-12-00). Il
est arrivé que des policiers acceptent d'aller chercher des cartes
pour des personnes présentes dans les aérogares, sachant
que l'OMI n'était pas passé depuis leur arrivée
(CR du 27-12-00).
Les visites personnelles des familles peuvent relever du parcours du
combattant. En effet, il faut tout d'abord déterminer l'aérogare
par lequel l'étranger est arrivé, puis accéder
au bureau du chef de quart pour demander une autorisation de visite.
Concernant ZAPI 3, le fonctionnement n'est pas encore certain :
si les demandes de visites peuvent être gérées par
ZAPI 3, certains fonctionnaires demandent aux visiteurs de passer
par les officiers de quart des terminaux (CR du 23-01-01).
En partant de Paris pour se rendre à ZAPI 3, le billet
aller-retour en RER coûte 98 francs ; il faut ajouter
le ticket de bus (2 x 8 francs), soit un total de 114 francs.
Il n'est pas possible d'effectuer des visites entre 12h et 14h, lorsque
l'officier est parti déjeuner. Si vous arrivez en fin de matinée,
il se peut que le policier vous demande de revenir. Si vous revenez
à 13h30, le nouvel officier vous redemande une pièce d'identité
pour une nouvelle photocopie ; vous indiquez à nouveau la
personne à qui vous venez rendre visite. L'attente peut durer
jusqu'à 1h30 voire 2h. Votre impatience vous conduit à
interpeller les policiers qui ne cessent de traverser le hall, chacun
indique que ce n'est pas de son ressort, qu'il a signalé votre
demande et qu'on est parti chercher la personne.
Les policiers recherchent dans les listes de ZAPI 3 ou de ZAPI 2
le nom de la personne que vous désirez rencontrer. Malgré
l'orthographe correcte et la véritable identité, le policier
peut ne pas trouver cette personne dans ces fichiers. Sa recherche restant
vaine, il peut prétexter que vous n'avez pas donné la
bonne orthographe ou que la personne étant arrivée sous
une fausse identité, vous ne pouvez pas lui rendre visite (visite
du 22-03-01).
À plusieurs reprises, des personnes de l'ANAFÉ se sont
rendus à ZAPI 3 pour rencontrer des étrangers maintenus
qui les avaient contactées. Dans un premier temps, se présentant
comme des amis ou comme venant par l'intermédiaire d'une association,
ils n'ont eu aucun problème pour rencontrer ces personnes. Le
23 mars un refus de visite leur a été opposé,
ils s'étaient présentés à titre personnel,
par l'intermédiaire de l'ANAFÉ. Les étrangers étant
prévenus de leur visite, il ne leur a pas été possible
d'user de leur droit de communiquer avec « la personne
de leur choix ». Les motifs du refus semblaient être
le fait de ne pas appartenir à la famille et l'appartenance à
une association, alors qu'aucune disposition dans l'ordonnance du 2 novembre
1945 n'interdit aux étrangers maintenus de recevoir des
visites de membres d'association.
À ZAPI 3, trois salles à l'entrée du bâtiment
sont réservées aux visites. Ces salles semblent insuffisantes
surtout pendant le week-end. Les visites des familles sont autorisées,
de 8h à 21h, pour une durée limitée à une
demi-heure. Il n'est pas possible de rencontrer une personne pendant
les heures de repas, ainsi entre 12h et 14h aucune visite n'est autorisée.
À ZAPI 2, la salle prévue pour les visites des familles
se trouve dans la partie administrative du bâtiment, à
côté des bureaux de la PAF : les personnes ne peuvent
donc pas s'entretenir de manière confidentielle (CR du 26-12-00
et du 27-12-00).
La Cour de cassation, dans un arrêt du 25 février
2001, a reconnu que les avocats pouvaient accéder aux zones d'attente
24h/24. À ZAPI 2, les visites des avocats se déroulent
dans un bureau, ce qui permet d'éviter tout racolage de la part
de certains avocats (CR du 27-12-00). En effet une pratique inquiétante
a été rapportée aux visiteurs : certains avocats
présents en zone d'attente auraient eu une activité proche
de l'escroquerie, ce qui a amené des agents à intervenir
sous couvert de leur hiérarchie auprès du barreau de Bobigny,
certains avocats auraient même dû rembourser les étrangers
victimes (CR 18-12-00).
À Ibis, depuis juin 2000, un médecin était
présent à mi-temps ainsi qu'une infirmière à
plein temps. Aujourd'hui Ibis étant fermé, leurs bureaux
ont été transférés à ZAPI 3.
Ils disposent également d'une salle d'attente, une chambre avec
deux lits et ont chacun un cabinet de consultation. Ils disposent d'une
réserve de médicaments sur place. Les médicaments
sont préparés pour chaque étranger, par prise et
par jour, et mis dans le casier correspondant à sa chambre.
Malgré la mise en place d'un système d'assistance médicale,
certains problèmes persistent. D'une part, le personnel soignant
n'est pas présent le week-end : lors de la visite du 30 décembre,
les policiers ont dû faire appel à un médecin du
SMUR pour une crise de nerfs. D'autre part, leur présence se
limite à ZAPI 3 et pour les autres parties de la zone d'attente,
ZAPI 2 et les aérogares, c'est donc l'ancien système
qui persiste à savoir l'appel au SMUR (CR du 27-11-00). L'assistance
médicale demandée par les visiteurs (CR du 27-11-00 et
30-12-00) dépend alors de la disponibilité des policiers
à emmener les étrangers voir le médecin du SMUR
ou faire appel à lui.
La procédure de consultation posait problème à
Ibis. Les étrangers désirant bénéficier
de l'assistance médicale devaient souvent passer par l'intermédiaire
des policiers. La transmission des informations médicales n'était
pas optimale comme le montrent les différents témoignages
recueillis durant les visites. Un étranger souffrant d'asthme
n'avait pas été soigné, bien qu'il ait vu le médecin,
car les policiers avaient égaré son ordonnance (CR du
30-12-00) ; une femme enceinte de 7 mois, prise d'un malaise
durant l'audience devant le juge délégué, avait
été conduite à l'hôpital où on lui
a dit de revenir, mais lors de la visite du 26 décembre,
son nom apparaissait sur le tableau des personnes qui allaient être
renvoyées ; l'agent de police présent au terminal
n'était pas au courant de tous ces faits (CR du 26-12-00). L'intervention
des personnes visitant la zone d'attente a parfois été
nécessaire pour transmettre les demandes : huit étrangers
ont demandé auprès des visiteurs à voir le personnel
soignant qui pensait avoir terminé les consultations (CR des
27-11-00 et 05-01-01).
Le personnel soignant de ZAPI 3 affirme que toutes les demandes
sont prises en compte. Pourtant un homme témoigne avoir été
battu lors d'une tentative d'embarquement, puis enfermé dans
le poste de police et enfin conduit à ZAPI 3 où on
ne l'a pas autorisé à être hospitalisé ou
avoir une aide médicale (CR du 23-01-01).
L'infirmière remarque que beaucoup de personnes sont angoissées
à ZAPI 3 (CR du 15-02-01). Déjà l'infirmière
et le médecin présents à Ibis déclaraient
qu'elles prescrivaient surtout des médicaments pour des douleurs
abdominales dues au stress, que les étrangers avaient besoin
de discuter de leurs problèmes et d'ailleurs elles étaient
consultées autant pour des soins que pour une assistance psychologique
(CR des 13-12-00 et 03-01-01).
Notes
[6] CE, 29 juillet 1998,
ministre de l'intérieur c/ M. Mwinyl.
Dernière mise à jour :
2-04-2001 19:32.
Cette page : https://www.gisti.org/
doc/actions/2001/zone-attente/visites/bilan-3.html
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