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Plein Droit
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Plein Droit n° 38, avril
1998 Régularisation... à la portugaiseJosé Falcao, Deux régularisations en quatre ans. Le Portugal tente d'« absorber » ses irréguliers mais sans en prendre réellement les moyens. La deuxième régularisation, celle de 1996, destinée à rectifier les erreurs de la première, ne semble pas avoir donné les résultats espérés. L'association SOS Racismo-Portugal en dresse un bilan très critique. L'une des principales causes de l'opération de régularisation de 1996 des étrangers en situation irrégulière, installés au Portugal, est à rechercher dans... la précédente opération qui s'est déroulée entre octobre 1992 et mars 1993. À l'époque, moins de la moitié des étrangers potentiellement concernés avaient été régularisés (38 364 sur environ 80 000), faute d'une campagne d'information suffisante et d'une organisation adaptée. Certes, la volonté de sortir de la politique de l'autruche olhos fechados , du statu quo et des discriminations masquées était déjà présente lors de la première opération de régularisation de 1992. Mais les conditions d'organisation, les cas de corruption de fonctionnaires, l'absence d'information, les blocages administratifs, l'exigence de documents non prévus par les textes, ainsi que la difficulté pour les intéressés de présenter les documents exigés (notamment les attestations des employeurs), n'avaient pas permis que cet objectif soit pleinement atteint. Ce bilan était bien connu de la Nouvelle Majorité (Nova Maioria) qui, quatre ans plus tard, organisait une nouvelle opération de régularisation. Avant l'adoption de la loi par l'Assemblée de la République, beaucoup de promesses avaient été faites par le Parti socialiste : « le gouvernement mettra en uvre une politique de l'immigration respectueuse et compatible avec nos engagements européens, en donnant la priorité à une bonne intégration sociale des étrangers qui résident déjà sur le territoire national, ce qui exige que l'opération de régularisation soit menée à son terme ». Pour la députée socialiste, Celeste Correia, « l'insertion des immigrés dans la société portugaise est une question nationale et un impératif éthique, social et politique », c'est pourquoi « cette loi permettra que de nombreux étrangers qui résident déjà au Portugal, aient une existence légale et que leur soient reconnus des droits civiques et sociaux ». Les moyens devaient être à la hauteur de ces ambitions : meilleure diffusion de l'information ; augmentation du nombre de centres de réception des postulants à la régularisation ; contrôle renforcé du fonctionnement de ces centres notamment par l'instruction de toutes les plaintes où un fonctionnaire est mis en cause et mise en place de brigades mobiles ; souplesse dans l'appréciation des documents à produire, le simple témoignage étant suffisant pour justifier de l'activité professionnelle ; soutien appuyé des gouverneurs civils (préfets) aux associations impliquées dans l'opération. La proposition de loi a été approuvée à l'unanimité par les parlementaires, malgré les déclarations de quelques-uns dénonçant les défauts et les injustices de certaines situations. Il faut souligner que, sur l'ensemble des partis qui siègent au Parlement, seuls le Parti communiste portugais et le groupe des Verts avaient présenté une proposition de loi alternative, ce qui prouve le manque d'intérêt et de volonté (politique) des autres partis pour trouver une solution à la situation des milliers d'irréguliers qui séjournent au Portugal. La loi n° 17/96 du 24 mai 1996 a ouvert une période dite de « régularisation exceptionnelle » de six mois. Celle-ci prévoyait la délivrance de titres de séjour aux étrangers pouvant justifier :
Elle posait en outre un critère d'ancienneté de présence sur le territoire, différent selon la nationalité d'origine du demandeur (cf. encadré « Une régularisation à deux niveaux, au nom des liens d'amitié »). Promesses non tenuesIl est apparu rapidement que de nombreuses promesses ne seraient pas tenues. Tout d'abord, la campagne d'information n'a démarré que très tardivement, avec des moyens limités et souvent mal utilisés (pourquoi, par exemple, avoir choisi une station de radio si peu écoutée par les étrangers ?). Le climat de confiance nécessaire pour permettre à ces derniers de se présenter dans les meilleures conditions n'était pas au rendez-vous dans les centres de réception. Ainsi, on a pu constater diverses manuvres de la police pour interpeller des étrangers en situation irrégulière, incidents largement couverts par les média. Dans certains centres, l'accueil a été autoritaire et arrogant (avec, parfois, des interrogatoires semblables à ceux de la police, et l'exigence de documents non prévus par la loi). Tous ces éléments ont été dissuasifs et démobilisateurs, tout comme l'insistance du ministre de l'intérieur à rappeler que les étrangers doivent respecter la loi. Enfin, le soutien que devaient apporter les gouverneurs civils aux associations ne s'est manifesté qu'une fois l'opération de régularisation commencée. Ces mêmes associations, d'ailleurs, n'ont à aucun moment été tenues de rendre des comptes sur l'utilisation des fonds reçus ni sur le travail accompli. La loi de régularisation prévoyait, par ailleurs, la délivrance de titres de séjour provisoires d'une durée de validité d'un an dont la transformation au bout de trois ans en titre de séjour permanent était conditionnée par l'absence de toute condamnation pénale. Pour le ministre de l'intérieur, Alberto Costa, cette condition avait été ajoutée pour inciter les étrangers « à respecter la loi ». Ce qui semblait signifier qu'un étranger ne peut être qu'un délinquant potentiel et qu'il lui appartient donc d'apporter la preuve du contraire. Enfin, malgré toutes les promesses faites par le Service des étrangers et des frontières quant aux délais de traitement des demandes, des retards importants ont pu être constatés dans la délivrance des titres de séjour, de même que des problèmes dus au refus de certains employeurs publics et privés de reconnaître la validité des titres de séjour provisoires délivrés lors de cette régularisation. Tous ces obstacles ont mis à mal les bonnes intentions exprimées quelques mois plus tôt. Les objectifs de la régularisation auraient-ils entre-temps changé ? Le 29 mars, ne parlant plus d'intégration, le ministre de l'intérieur Alberto Costa, lors des débats à l'Assemblée de la République, déclarait en effet : « cette régularisation doit être une contribution positive à la relance d'une politique de coopération ». Tout comme lors de la régularisation de 1993, un grand nombre de sans-papiers resteront étrangers à cette nouvelle opération. Pour ceux qui ont tenté leur chance sans succès et qui ne seront pas régularisés, une question demeure : que deviendront-ils ? Pour répondre à cette question, le gouvernement portugais tente de mettre en place des programmes d'aide au retour volontaire mais, surtout, il envisage de modifier et de renforcer les dispositions législatives en matière d'éloignement...
ENCADRÉ Une régularisation à
deux niveaux,
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