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Plein Droit n° 15-16, novembre 1991
« Immigrés : le grand chantier de la “dés-intégration” »

L'exemple guyanais

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Voir aussi l'article « Notes de voyage »

N'en déplaise à M. Pierre Mauroy, il existe déjà un département français où le gouvernement, par l'intermédiaire des services de l'Etat, traite l'immigration de façon expéditive sans que les socialistes locaux y trouvent à redire, pour la simple raison qu'ils participent eux-mêmes au consensus xénophobo-politique qui y règne depuis que la population locale compte 30 % d'étrangers.

Ce département, c'est la Guyane. Un office de la main d'oeuvre internationale y a été installé, le 1er janvier, à la demande notamment du président du conseil général, M. Elie Castor, député apparenté socialiste, dirigeant du Parti socialiste guyanais (autonome par rapport au PS), principale composante locale de la majorité mitterrandienne.

La pratique du charter y est quasi hebdomadaire. Elle y est même tellement élaborée que les autorités affrètent les avions dans lesquels les immigrés en situation irrégulière sont reconduits chez eux avant que les principaux intéressés ne soient arrêtés par les gendarmes. Comme il n'y a pas encore de lieu de rétention on procède par opérations « coups de poing » : les gendarmes sont informés qu'ils ont un avion « à remplir » tel jour à telle heure, et le matin du jour dit ils font le tour des grands chantiers de Cayenne et de ses environs.
Comme le recours à la main d'oeuvre clandestine originaire du Brésil, du Surinam ou de la Guyana est d'usage courant dans les entreprises guyanaises, qui le considèrent comme un facteur de croissance économique, ils n'ont jamais aucun mal à « garnir » le charter.

De modestes travailleurs

Ces gendarmes n'ont pas vraiment bonne conscience parce que les clandestins qu'ils interpellent ainsi sont en général de modestes travailleurs gagnant leur pitance sans faire de mal à personne, contrairement aux immigrés désoeuvrés, parfois très dangereux dans un département qui n'est pas sans analogie avec le Far-West, mais ces opérations ont avant tout un but psychologique. Elles donnent à la population le sentiment que les autorités emploient les grands moyens contre une immigration excessive.

Il ne faut pas plus de quarante-huit heures à un clandestin reconduit sur la rive sud de l'Oyapock, à la frontière brésilienne, ou sur la rive nord du Maroni, à la frontière surinamienne, pour revenir tout aussi clandestinement à Cayenne, avec de nouveaux papiers tout aussi faux que les précédents. Dans ces immenses contrées amazoniennes, parcourues de milliers de voies d'eau, il n'existera jamais aucune frontière imperméable.

Alors, personne n'étant dupe, tout le monde joue à cache-cache avec beaucoup de philosophie. Les deux centres de surveillance installés sur le littoral, le premier au lieu-dit la Montagne d'Argent, côté brésilien, le second à la pointe de Hattes, côté surinamien, servent aussi souvent de centres de secours que de points de contrôle.

Refoulés en charters aériens, les immigrés clandestins reviennent en effet avec leurs propres « charters » nautiques : presque toutes les nuits, on entend les pirogues à moteur des passeurs danser la sarabande à la barbe de la maréchaussée qui les guette le long des rivages et qui doit parfois, quand la mer est mauvaise, voler au secours de leurs indésirables passagers en danger de noyade...

A.R.

Article paru dans Le Monde du 9 juillet 1991

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Dernière mise à jour : 24-12-2000 13:10.
Cette page : https://www.gisti.org/ doc/plein-droit/15-16/guyane.html


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