ZONE D'ATTENTE
:
DEUX RAPPORTS ACCABLANTS DE L'ANAFÉ
L'ANAFÉ a lancé une nouvelle campagne de visites de la
zone d'attente de l'aéroport Roissy Charles de Gaulle entre fin
novembre 2000 et mars 2001. Trois associations (ANAFÉ, Amnesty
International et Cimade) ont effectué 16 visites, dans les
zones d'hébergement (Ibis, ZAPI 2, ZAPI 3) et sur les
aérogares 1 (satellite 7), 2A, 2B, 2F. Il faut savoir
que cet aéroport accueille l'essentiel des personnes arrivant
en France et qui sont maintenues en zone d'attente [1].
Les textes internationaux et nationaux reconnaissent à tout
individu la liberté d'aller et venir, permettant à toute
personne de pouvoir se déplacer librement. L'usage de cette liberté
est limité par le nécessaire respect des conditions d'entrée
et de séjour sur le territoire national fixées par chaque
État. En France, les conditions d'entrée des étrangers
sont définies par l'ordonnance du 2 novembre 1945. Lorsque
les personnes se présentant à la frontière ne remplissent
pas les conditions définies, elles peuvent être maintenues
en zone d'attente. Trois situations sont envisagées : l'étranger
est considéré comme « non-admis »,
il est demandeur d'asile, il est en transit interrompu.
Le maintien en zone d'attente limitant la liberté d'aller
et venir, il était nécessaire que son régime soit
encadré. La loi du 6 juillet 1992, article 35 quater
de l'ordonnance du 2 novembre 1945, crée les zones d'attente.
Le maintien est soumis à un certain nombre de conditions
et limité dans le temps. Certains droits sont reconnus aux personnes maintenues :
en théorie, elles sont libres de quitter la zone d'attente pour
toute destination située en dehors du territoire français ;
mais en pratique les étrangers sont parfois dépossédés
de leurs papiers d'identité. La zone d'attente doit également
permettre aux personnes maintenues de bénéficier
d'une assistance linguistique, médicale et juridique. Pour l'ANAFÉ
, cette loi reste contestable tant sur le plan des libertés individuelles
que sur le respect du droit d'asile. L'ANAFÉ s'est fixée
pour objectif « d'assurer une présence effective
et compétente auprès des étrangers en difficulté
en zone internationale », pour que les garanties accordées
aux étrangers soient respectées, « et leur
apporter une assistance juridique et humanitaire » en
cas de défaillance dans l'exercice de ces garanties.
À l'occasion de la visite de la nouvelle zone ZAPI 3, le
8 janvier 2001, le ministre de l'Intérieur M. Daniel
Vaillant déclarait « La France est un pays ouvert, (...)
attaché depuis deux siècles, par sa tradition républicaine,
à accueillir l'étranger. Mais, en même temps, elle
n'a pas à dire oui à tous ceux qui par leur seule volonté,
ou par l'utilisation de réseaux criminels, demandent à
s'y installer. Ce serait totalement irresponsable. (...) Cette
détermination n'entame en rien, cependant, notre volonté
de voir les situations individuelles des personnes non admises examinées
avec toutes les garanties qu'offrent la loi et le respect qu'un État
démocratique comme la France doit à la personne humaine.
C'est l'ambition que j'assigne à ces nouveaux locaux et je sais
pouvoir compter sur toutes les personnes qui y travailleront ».
Malgré l'amélioration des conditions d'hébergement
et bien que « le gouvernement a toujours entendu apporter
des solutions conformes à la dignité des personnes et
au respect du droit », il a été constaté,
à de nombreuses reprises, que les droits de personnes maintenues
étaient bafoués, des demandes d'asile n'étaient
pas enregistrées, le jour franc était couramment violé
et le recours à la violence, était de plus en plus fréquent.
Plusieurs visiteurs se sont heurtés à certaines difficultés,
pouvant aller du refus d'accès à une partie de la zone,
au refus de contact avec les personnes présentes dans la zone
d'attente.
Les sept associations d'assistance aux étrangers, de défense
des droits de l'homme ou d'assistance médicale peuvent visiter
les zones d'attente sous réserve d'avoir obtenu un double agrément
portant sur l'association elle-même et sur les personnes désignées
par elle pour effectuer ces visites. Un arrêté du ministre
de l'Intérieur pris après avis du ministre des Affaires
étrangères désigne les associations habilitées ;
leurs dix représentants obtiennent un agrément valable
pour trois ans, pour huit visites par an et par zone. Avant chaque visite,
le visiteur doit demander une autorisation expresse auprès du
ministère de l'Intérieur.
Une zone est « délimitée
par le représentant de l'État dans le département »,
elle s'étend « du point d'embarquement et de débarquement
à ceux où sont effectués les contrôles des
personnes » et peut inclure « un ou plusieurs
lieux d'hébergement assurant aux étrangers concernés
des prestations de type hôtelier ».
Article 35 quater I de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
L'accès aux aérogares et à tout ou partie des
aérogares a posé des problèmes. Deux visiteurs
se sont vu refuser l'accès à l'ensemble de l'aérogare
2F, au motif que la zone d'attente se limite à ZAPI 2 et
ZAPI 3 (CR du 15-02-01). Deux personnes se sont vu refuser l'accès
à des zones d'embarquement [2]
au motif que « les visiteurs n'ont rien à faire
là où il n'y a pas d'INAD » (CR du 16-01-01).
Et deux autres visiteurs, dans un premier temps se sont vu refuser
l'accès aux postes de police ; finalement la PAF leur a
donné son accord, mais leur visite a été limitée
« aux maintenus » (CR du 27-11-00).
Ces décisions étaient tout à fait non fondées
au regard de la définition textuelle de la zone d'attente.
Alors que le décret du 2 mai 1995 prévoit que « les
représentants agréés d'une association habilitée
(...) peuvent s'entretenir confidentiellement avec les personnes maintenues
dans cette zone », certains visiteurs se sont vu interdire
la possibilité de discuter avec les étrangers présents
dans les aérogares. Les différentes raisons données :
les étrangers étaient dans « une zone internationale »,
décrite par la PAF comme une zone stérile comprise entre
la zone de débarquement et le contrôle de la police (CR
du 26-12-00) où ils étaient en instance de constitution
de dossier (CR des 05-01-01 et 16-01-01).
Enfin il est regrettable qu'un visiteur se soit vu confisquer la cassette
de son dictaphone le temps d'une visite (CR du 26-12-00). Et qu'un autre
visiteur ait été menacé d'une « inculpation
pour aide à immigration clandestine » pour avoir
parlé avec des étrangers en zone internationale et leur
avoir conseillé de faire explicitement une demande d'asile au
poste de police (CR du 28-01-01).
Notes
[1] Roissy et Orly concentraient,
en 1999, 88 % de l'activité des zones d'attente et 96 % des demandes
d'asile étaient faites à Roissy ; 12 590 personnes
étaient passées par la zone de Roissy en 1999 et 12 503
entre le 1er janvier et le 20 septembre 2000. Louis MERMAZ, Rapport
T II « Intérieur et décentralisation
police », n° 2628, 11 octobre 2000.
[2] L'embarquement CAMAIR
aérogare 1 satellite 4 et l'embarquement du vol AF 764 aérogare
2A.
Dernière mise à jour :
2-04-2001 19:31.
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