Emplois
fermés aux étrangers à la Sécurité sociale
Rapport du CERC-Association
de mars 1999 (extrait)
CERC-Association, « Immigration, emploi
et chômage. Un état des lieux empirique et théorique »,
Les dossiers de CERC-Association n° 3, mars 1999.
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Par analogie avec la Fonction publique ou avec les entreprises publiques
à statut, les organismes de Sécurité sociale, qui
recrutent la quasi totalité de leur personnel selon le droit
commun du travail et régi par des conventions collectives, n'acceptent
les étrangers que dans les postes subalternes, n'impliquant pas
de participation directe au service public de la protection sociale :
ils obéissent aux instructions de leur ministre de tutelle, contenues
dans deux lettres des 19 octobre 1979 et 16 octobre 1980,
mais ils se mettent en infraction avec les dispositions du Code pénal
qui répriment toute discrimination à l'embauche, et sur
lesquelles de simples lettres ministérielles ne peuvent prévaloir.
D'après des témoignages que nous avons recueillis, cette
discrimination s'appliquerait de manière généralisée
dans la Sécurité sociale en raison d'une longue pratique
antérieure qui a généré une croyance souvent
sincère en la légalité d'une condition de nationalité
à l'embauche dans ce secteur. Cette croyance imprègne
très fortement l'ensemble des institutions de Sécurité
sociale et ces pratiques de discrimination sont suffisamment structurelles
et généralisées pour qu'on puisse parler de « droit
coutumier ». Lorsque le sujet est évoqué, il
est fréquent de s'entendre rétorquer, comme pour se donner
bonne conscience, que la discrimination aurait été supprimée
pour les ressortissants communautaires, de nouveau en s'inspirant du
changement intervenu en 1991 dans le statut de la Fonction publique.
Il s'agit en fait d'un argument fallacieux car aucun texte légal
ne permet à la Sécurité sociale de favoriser ces
derniers par rapport aux autres étrangers.
L'argument selon lequel ces emplois en question impliquent une participation
à l'exécution d'un service public ne tient pas davantage
ici que pour la Fonction publique et les entreprises du secteur public
et nationalisé. Dans le cas précis des organismes de Sécurité
sociale, cette exclusion semble d'autant plus paradoxale que les étrangers
sont désormais admis à siéger dans les conseils
d'administration des caisses sur un pied d'égalité avec
les nationaux. Par ailleurs, il n'existe aucune discrimination sur la
base de la nationalité pour le recrutement des salariés
des ASSEDIC, chargés du service de l'assurance chômage
et qui accomplissent des tâches similaires à celles des
personnels des organismes de Sécurité sociale.
Ces pratiques n'en ont pas moins permis une inscription structurelle
et généralisée de la discrimination. Les effectifs
des caisses de Sécurité sociale du régime général
et des régimes agricoles s'élèvent à environ
200 000 personnes (respectivement 176 000 et 20 000),
auxquelles il faudrait ajouter le personnel employé dans les
autres régimes de Sécurité sociale, ce qui pourrait
augmenter considérablement ce total.
Dernière mise à jour :
14-10-2001 14:47
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