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Plein Droit
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Plein Droit
n° 53-54, mars 2002 Les « grands arrêts » du GistiPas de vie familiale
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Un an et demi après avoir reconnu officiellement le droit au regroupement familial, désormais réglementé par un décret du 29 avril 1976, le gouvernement décide, par un décret du 10 novembre 1977, de suspendre pour une période de trois ans, ladmission des membres de familles, à moins quils ne renoncent à occuper un emploi. Un an plus tard donc très rapidement par rapport aux délais habituels le Conseil dÉtat annule ce texte, estimant quil contredit un principe général du droit selon lequel « les étrangers résidant régulièrement en France ont, comme les nationaux, le droit de mener une vie familiale normale », le droit de travailler étant une condition nécessaire à lexercice de ce droit. La notoriété de larrêt tient autant, sinon plus, au fait que le Conseil dÉtat y découvrait un nouveau « principe général du droit », quà son incidence sur la protection des droits des étrangers. Bien quérigé par le Conseil constitutionnel en principe à valeur constitutionnelle, le droit de mener une vie familiale normale a été par la suite concurrencé et partiellement éclipsé par larticle 8 de la Convention européenne des droits de lhomme qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale. Par ailleurs, si larrêt du 8 décembre 1978 a représenté une grande victoire, surtout dans le contexte de lépoque, il ne faut pas se cacher limpact limité du droit ainsi reconnu, auquel le Conseil constitutionnel comme le Conseil dÉtat ont admis très largement la possibilité dapporter des restrictions. * Les grands arrêts de la jurisprudence administrative. Les conclusions Dondoux ont été publiées dans Droit social, 1979, p. 57. |
C.E. Ass. 8 déc. 1978, Groupe dinformation et de soutien des travailleurs immigrés et autres (GISTI), CFDT et CGT.
Cons. que les requêtes du Groupe dinformation et de soutien des travailleurs immigrés, de la Confédération française démocratique travail et de la Confédération générale du travail sont dirigées contre le décret du 10 nov. 1977 ; quil y a lieu de les joindre pour quelles fassent lobjet dune même décision ;
Sur la recevabilité des requêtes :
Cons. que la défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs étrangers répond à lobjet de lassociation et des organisations syndicales requérantes ; quainsi le ministre du travail et de la participation nest pas fondé à soutenir que les requérants ne justifient pas dun intérêt suffisant pour demander lannulation du décret attaqué ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens des requêtes :
Cons. que le décret du 29 avril 1976, relatif aux conditions dentrée et de séjour en France des membres des familles des étrangers autorisés à résider en France, détermine limitativement, et sous réserve des engagements internationaux de la France, les motifs pour lesquels laccès au territoire français ou loctroi dun titre de séjour peut être refusé au conjoint et aux enfants de moins de 18 ans dun ressortissant étranger bénéficiant dun titre de séjour qui veulent sétablir auprès de ce dernier ; que le décret attaqué du 10 nov. 1977 suspend, pour une période de trois ans, les admissions en France visées par ces dispositions mais précise que les dispositions du décret du 29 avril 1976 demeurent applicables aux membres de la famille qui ne demandent pas laccès au marché de lemploi ; que le décret attaqué a ainsi pour effet dinterdire laccès du territoire français aux membres de la famille dun ressortissant étranger titulaire dun titre de séjour à moins quils ne renoncent à occuper un emploi ;
Cons. quil résulte des principes généraux du droit et, notamment du Préambule de la Constitution du 27 oct. 1946 auquel se réfère la Constitution du 4 oct. 1958, que les étrangers résidant régulièrement en France ont, comme les nationaux, le droit de mener une vie familiale normale ; que ce droit comporte, en particulier, la faculté, pour ces étrangers, de faire venir auprès deux leur conjoint et leurs enfants mineurs ; que, sil appartient au Gouvernement, sous le contrôle du juge de lexcès de pouvoir, et sous réserve des engagements internationaux de la France, de définir les conditions dexercice de ce droit pour en concilier le principe avec les nécessités tenant à lordre public et à la protection sociale des étrangers et de leur famille, ledit gouvernement ne peut interdire par voie de mesure générale loccupation dun emploi par les membres des familles des ressortissants étrangers ; que le décret attaqué est ainsi illégal et doit, en conséquence, être annulé ; (Annulation).
Dernière mise à jour :
24-10-2003 21:10
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doc/plein-droit/53-54/j2.html