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COMPTE-RENDU

Des demandeurs d'asile d'Irak
dénoncent l'attentisme de la CRR
et la trahison du ministère de l'intérieur

Compte-rendu par Jean-Pierre Alaux
(membre du Gisti)

28/04/2005 — Des demandeurs d'asile d'Irak ont manifesté, les 25 et 26 avril 2005 à Paris, leur mécontentement contre l'attitude de la Commission des recours des réfugiés (CRR) à leur égard. Leur mouvement spontané, parti de centres d'hébergement de Champagne, de Normandie et de la région parisienne où certains d'entre eux ont été affectés, vise notamment à dénoncer l'attentisme décidé il y a trois ans par la CRR à l'encontre des requêtes des Irakiens. Avec quelques autres organisations françaises, le Gisti, sollicité par eux alors que leur manifestation était déjà engagée, a apporté son soutien à ces Irakiens.


Les Irakiens demandeurs d'asile de Champagne, de Normandie et de la région parisienne, qui avaient organisé le 25 avril 2005 un rassemblement sur la place Saint-Augustin à Paris, ont poursuivi leur mouvement de protestation le 26 avril, cette fois devant la Commission des recours des réfugiés (CRR) à Montreuil. Ils entendaient attirer notamment l'attention des pouvoirs publics sur le gel, depuis deux ou trois ans selon les cas, des appels qu'ils avaient formés devant cette commission à la suite des décisions de rejet prises en première instance à leur encontre par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

Différentes associations françaises étaient venu soutenir les manifestants, notamment le Collectif de soutien des exilés, le Gisti et le Réseau chrétien-immigrés.

La présidente de la branche française du réseau d'avocats Elena (European Legal Network on Asylum), Me Marianne Lagrue, était également présente en compagnie de quelques confrères. Le président de la CRR n'a pas accepté de la recevoir en compagnie des Irakiens. Elle s'est engagée à solliciter un prochain rendez-vous.

Manifestation devant la CRR et entretien avec son président

Dans l'entretien qu'il a accordé en début d'après-midi à une délégation des manifestants, M. François Bernard a reconnu que la CRR avait pris, il y a trois ans, la décision de suspendre l'examen des requêtes des Irakiens en raison de la situation confuse qui règne dans leur pays et qui interdit, selon lui, aux magistrats appelés à statuer de déterminer les responsabilités respectives des divers auteurs de violences et de persécutions. Admettant que la situation n'est pas nécessairement plus claire aujourd'hui, il a annoncé sa décision récente de « dégeler » les 450 requêtes irakiennes en attente et sur lesquelles des décisions devraient commencer à être prises dans un délai de trois à quatre mois.

M. Bernard a reconnu que la CRR avait coutume de suspendre l'examen des appels des ressortissants de pays où la situation lui paraît trop confuse, citant à titre d'exemples l'Algérie et le Kosovo par le passé, Madagascar, Haïti et la Côte d'Ivoire dans des périodes plus récentes. Il a observé que les recours des Irakiens représentaient moins de 10% des 47 000 dossiers sur lesquels les 136 formations de la CRR allaient être appelées à prendre des décisions dans les mois à venir pour éponger son retard.

Pour le président de la CRR, la nouvelle « protection subsidiaire » instituée par la réforme de l'asile entrée en vigueur le 1er janvier 2004 et qui, selon lui, n'a guère été utilisée (une soixantaine de décisions en ce sens tout au plus à l'initiative de la Commission) pourrait représenter une réponse souvent adaptée pour ceux des Irakiens en faveur desquels des décisions positives seraient prises. Il a exprimé sa conviction que les titres de séjour d'une durée de validité d'un an délivrés aux bénéficiaires de cette protection feraient globalement l'objet de renouvellements par les administrations préfectorales compétentes, même si la réglementation ne prévoit aucune automaticité en la matière.

A la question de savoir s'il donnerait des instructions pour que les magistrats prennent en considération l'ancienneté des motivations de persécutions ou de risques de persécutions avancés par les Irakiens, dont l'attentisme de la CRR est entièrement responsable, M. Bernard s'est contenté d'indiquer qu'une telle mesure n'était pas exclue. Il a néanmoins rappelé que la Commission se fondait sur l'actualité des craintes, conseillant avec insistance aux requérants d'actualiser leur argumentation et de veiller à son individualisation.

Les délégués irakiens ont insisté sur le fait que la durée de leur séjour en France, dont ils ne sont pas responsables, pouvait être retenue contre eux par les différentes formations islamistes de leur pays s'ils étaient contraints d'y revenir après des confirmations de rejets de leurs demandes d'asile par la Commission. Ils ont affirmé que la durée de leur exil serait interprétée par les islamistes comme la preuve de leur adhésion aux valeurs occidentales, laquelle pouvait ainsi leur valoir de nouvelles persécutions. Cette objection a été jugée parfaitement recevable par M. Bernard. Il a vivement conseillé à ses interlocuteurs de compléter leurs requêtes à l'aide d'indices récents étayant ce type d'arguments.

Des questions des représentants des Irakiens sur le bénéfice de l'aide juridictionnelle ont permis de constater qu'il avait échappé au président de la CRR que la quasi-totalité des demandeurs d'asile d'Irak, comme d'autres nationalités, sont entrés en France dépourvus de visas et que, de ce fait, ils ne peuvent prétendre à la prise en charge par l'Etat des honoraires de leurs avocats. Pour pallier cette difficulté, M. Bernard a affirmé que les associations pouvaient être entendues au cours des audiences de la CRR et concourir ainsi à la défense des requérants privés d'avocats.

Trahison des « accords de Sangatte » par le ministère de l'intérieur

Une forte proportion des manifestants irakiens dénoncent par ailleurs le non-respect par le ministère de l'intérieur des engagements qu'il avait pris, en la personne de M. Nicolas Sarkozy, à l'égard des derniers « résidents » du camp de Sangatte fermé en novembre 2002. A ceux d'entre eux qui avaient exprimé leur désir de rester en France, il avait alors été promis le délivrance d'un titre de séjour « vie privée et familiale » comportant l'accès à l'emploi.

Or nombre des manifestants affirment que, bien que présents à Sangatte à l'heure de sa fermeture, ils ne se sont vu délivrer aucune autorisation de demeurer en France.

Ils ont envisagé la perspective de solliciter prochainement un rendez-vous au ministère de l'intérieur.

Création d'un réseau national de demandeurs d'asile d'Irak

A l'issue de leurs deux journées de protestation à Paris, les manifestants ont décidé la création d'un réseau national des demandeurs d'asile d'Irak. Ce réseau permettra de rassembler les inquiétudes et de coordonner les revendications des exilés irakiens dispersés dans diverses régions et qui, apprenant l'initiative de leurs compatriotes de Champagne, de Normandie et de la région parisienne, ont manifesté par différents canaux leur volonté de participation.

Les associations françaises sont invitées à soutenir ce mouvement qui devrait définir ses objectifs lors d'une prochaine réunion à Paris dans quelques semaines.

Paris, le 27 avril 2005

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Dernière mise à jour : 28-04-2005 11:12 .
Cette page : https://www.gisti.org/ doc/actions/2005/irakiens/index.html


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