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ACTIONS COLLECTIVES
« Avis de KO Social »
à Lyon
Intervention de Marie Cheix (Gisti)
lors du concert-meeting du lundi 15 décembre 2003
(Hall Tony Garnier, Lyon)
18/12/2003 À
l'initiative du collectif Musik en lutte et de l'association
Zarma, c'est tenu à Lyon le lundi 15 décembre
2003, un « concert meeting militant », intitulé
Avis de KO social.
Devant 8000 personnes, de nombreux artistes (quatre Têtes
raides, le Peuple de l'herbe, High tone, Babylon circus, Mei tei sho...)
et une vingtaine d'organisations se sont succédé, dans
une ambiance festive, avec pour mot d'ordre : informer pour mobiliser.
« Bonsoir, je suis Marie, du Gisti, qui
veut dire groupe d'information et de soutien des immigrés.
Je crois, avec Act Up et nous tous, que de nombreuses lois qui sont
passées justifient, imposent, le recours à la désobéissance
civile.
Les lois dont je vais vous parler ce soir concernent les étrangers.
Ce sont des lois qui viennent d'être votées à l'initiative
de Sarkozy, dans l'indifférence quasi-générale.
Des lois extrêmement inquiétantes car foncièrement
réactionnaires. Les pires qui aient été proposées
depuis 1945.
Sur ces lois, Sarkozy a menti quand il a dit qu'elles permettront
une meilleure intégration des étrangers. Sous couvert
d'intégration, la loi pose par exemple une nouvelle condition
pour obtenir certains titres de séjour. L'étranger devra
prouver son intégration républicaine, notamment en montrant
qu'il maîtrise la langue française et qu'il connaît
les principes de la République. Qui, comment on va juger ça
? Ca veut dire quoi intégration ? Ca veut dire quoi connaître
les principes de la République ? Il faudra réciter : liberté,
égalité, fraternité ? Peut-être qu'il faudra
rajouter laïcité par les temps qui courent ? Sous couvert
d'intégration, c'est une condition qui pourra donner lieu à
toutes les dérives pour refuser de donner un titre de séjour.
On nous parle d'intégration, alors que la loi va avoir l'effet
inverse sur de nombreux étrangers, car elle précarise
leur situation. Par exemple, des membres de famille installée
en France qui avaient droit à une carte valable pendant dix ans,
n'ont droit aujourd'hui qu'à un titre d'un an, c'est-à-dire
à une carte précaire dont le renouvellement n'est pas
automatique.
Sarkozy a aussi menti quand il a dit que la double peine est supprimée.
Il a, je pense, réussi à le faire croire à beaucoup
de monde, car c'est vrai qu'il est très fort.
Alors c'est vrai que des étrangers, mais en nombre très
limité, ne seront plus expulsables en principe. En principe,
car il y a toujours des exceptions. C'est vrai que par exemple, un étranger
qui habite en France depuis 20 ans avec un titre de séjour, ne
sera pas expulsable ! Quelle avancée ! Merci Monsieur Sarkozy
! Une avancée qui ne fera pas oublier que la double peine n'est
pas supprimée, qu'elle est au contraire étendue à
de nouvelles infractions pénales.
Il y a aussi dans ces lois des règles complètement
hallucinantes, car elles n'ont aucun sens. Un étranger qui travaille
sans autorisation de travail, la Préfecture pourra décider
qu'il doit quitter la France. Ca n'a aucun sens quand on sait par exemple
que les demandeurs d'asile n'ont jamais le droit de travailler, qu'ils
n'ont pas toujours d'aide de l'Etat. Alors comment faire pour vivre
si ce n'est en travaillant sans autorisation, donc en devenant délinquant
?
Et puis, je ne peux faire l'impasse sur une disposition extrêmement
inquiétante. C'est la pénalisation de l'aide aux sans
papiers. Ca existait déjà, mais il y a une aggravation
considérable de la répression. Une aggravation dans les
textes, puisque par exemple une association pourra se voir confisquer
ses biens, son matériel, son local.... Une aggravation dans la
pratique puisque de plus en plus de ceux qui défendent les sans
papiers sont poursuivis. Ce sont eux qu'on appelle les délinquants
de la solidarité. Et le Gisti, avec Act Up et beaucoup d'autres
personnes, nous disons que si aider un étranger c'est une infraction,
alors nous voulons être poursuivis et condamnnés. Et vous
pouvez nous rejoindre en signant le "Manifeste
des délinquants de la solidarité".
Sur l'asile, un seul exemple de la loi, qui procède à
un démantèlement complet des textes protecteurs qui existaient
: l'asile interne, qui va permettre de ne pas donner l'asile à
une personne qui vient d'un pays où il y a une zone dite sécurisée
par des forces internationales. Vous vous souvenez, car il faut se souvenir,
Srebrenica en Bosnie, qui nous a montré qu'une force internationale
n'empêche pas forcément le massacre d'une population.
Alors voilà quelques exemples de ces lois réactionnaires,
que je ne détaillerai pas plus car vous en trouverez une excellente
analyse sur le non moins excellent site du Gisti, que vous pouvez
retrouvez facilement en tapant GISTI sur un moteur de recherche.
Et puis ce que je voudrais surtout dire ce soir, c'est que ces lois
se situent dans la lignée des précédentes, les
lois Pasqua, Debré, mais aussi Chevènement, et que d'autres
les suivront, vu ce qui se prépare à l'échelle
de l'Europe. Ces lois, c'est une politique qui n'a rien à faire
des droits de l'homme, ce qui n'est pas propre aux étrangers
et qui touche toutes les populations précaires. Une politique
de fermeture des frontières qui n'ouvre ses portes que pour laisser
entrer les étrangers dont les pays riches ont besoin, et qui
demandera à ces étrangers de repartir quand ils seront
devenus inutiles. Une politique qui considère depuis longtemps
que l'étranger n'est pas un homme mais une marchandise. Et c'en
est à ce point que nos gouvernements se foutent complètement
des morts de plus en plus nombreux qu'engendrent leur politique de fermeture
des frontières... vous savez qu'il n'y a plus une seule semaine
où on apprenne la mort d'étrangers aux frontières
de l'Europe.
Face à cela, au Gisti, nous sommes pour une idée qui
semble utopique à ceux qui se disent réalistes. Mais quand
on sait qu'un réaliste c'est quelqu'un qui a une réalité
de retard, on n'est pas trop inquiet. Cette idée soit-disant
utopiste, c'est la liberté de circulation, c'est-à-dire
le droit de tous de quitter son pays pour aller vers celui de son choix.
On défend cette idée car la pratique trentenaire du Gisti
nous a montré qu'aucune politique de fermeture des frontières
ne peut être respectueuse des droits de l'homme. On défend
la libre circulation car c'est le seul moyen pour qu'il y ait égalité
effective des droits entre les hommes, où qu'ils soient nés. »
Lyon, le 15 décembre 2003
Voir aussi :
Dernière mise à jour :
26-08-2004 16:01
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Cette page : https://www.gisti.org/
doc/actions/2003/ko_social/index.html
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