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Un ancien ministre tchétchène
du gouvernement Maskhadov « indésirable »
en France ?
COMMUNIQUÉ
02/02/2003 Arrivé
en France le 17 janvier pour demander l'asile, M. Lom Ali Aldamov,
ancien ministre du commerce du gouvernement tchétchène
et membre de la représentation tchétchène en Géorgie,
s'est vu remettre le 25 janvier un refus d'admission sur le territoire.
Son renvoi lui a été signifié vers la Jordanie,
pays par lequel il a transité, au motif que sa demande d'asile
était « manifestement infondée »,
après avoir été maintenu en zone d'attente à
l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle.
Assisté par l'Anafé et une avocate, Monsieur Aldamov
a alors saisi le tribunal administratif d'une requête en référé-liberté.
Le tribunal de Cergy-Pontoise, ne se prononçant pas sur le fond
lors de l'audience de ce jeudi 30 janvier, a demandé une
nouvelle audience en présence de l'intéressé le
5 février prochain.
Après le refus d'accès au territoire, l'Anafé
est intervenue à nouveau auprès des deux ministères
responsables de la décision ; le ministère de l'Intérieur
maintient sa position et, après avoir semblé douter de
l'identité du requérant, semble douter aujourd'hui du
bien fondé des poursuites dont il serait l'objet en Géorgie.
Le ministère de l'Intérieur aura pour le moment réussi
à « prouver » sa mauvaise foi : devant
le juge, il jette le doute sur l'authenticité du passeport de
M. Aldamov au motif que la couverture comporte la mention « URSS »
(USSR), feignant d'ignorer que les stocks de passeports soviétiques,
ainsi que nombre d'autres documents officiels, ont été
utilisés partout en Russie pendant des années après
la disparition de l'URSS.
M. Aldamov bénéficiait en Géorgie du statut
de réfugié prima facie (c'est à dire demandeur
d'asile), un statut au départ assez largement accordé
par les autorités géorgiennes. Mais depuis quelques mois,
celles ci sont soumises à de fortes pressions de la part de la
Russie. En août 2002, 13 Tchétchènes ont été
arrêtés par les autorités géorgiennes et
leur extradition demandée par la Russie : 5 ont été
extradés en octobre, 3 autres au moins sont en attente de
l'être.
En décembre 2002, M. Aldamov, comme tous les membres de
la représentation et l'ensemble de la communauté tchétchène
de Géorgie, a été interpellé et retenu par
la police géorgienne. Il est manifeste qu'aujourd'hui, ce statut
ne protège plus les Tchétchènes résidant
en Géorgie, même si ce pays a signé la Convention
Européenne des Droits de l'Homme, les autorités russes
cherchant par tous les moyens à discréditer les représentants
des autorités tchétchènes. Un constat que le HCR
a confirmé. Rappelons qu'outre les milliers de disparitions forcées
et exécutions extra-judiciaires pratiquées en Tchétchénie
même par les forces russes, l'ancien ministre de la sécurité
T. Atguiriev et le président du parlement tchétchène
R. Alikhadjiev sont morts ou ont « disparu »
dans les prisons russes après leur arrestation.
Le Comité Tchétchénie et l'Anafé dénoncent
avec la plus grande fermeté le refus des autorités françaises
d'admettre M. Aldamov sur le territoire et son maintien dans la
zone d'attente de Roissy, où il risque toujours un refoulement
vers la Jordanie, alors qu'il n'y a aucune garantie que ce pays ne le
renvoie pas immédiatement vers la Russie. Après les remous
suscités par la détention pendant plusieurs semaines au
Danemark d'A. Zakaev, à nouveau sous le coup d'une procédure
judiciaire en Grande-Bretagne, ce refus d'admettre sur le territoire
français une personnalité tchétchène serait-elle
une décision politique visant à ne pas heurter les autorités
russes à quelques jours de la visite de V. Poutine en France ?
Ou de la volonté de dissuader d'autres Tchétchènes
de venir se réfugier en France ?
Par ailleurs, il s'agit d'une pratique inquiétante pour le droit
d'asile en France : par le biais de l'examen du caractère manifestement
infondé d'une demande d'admission sur le territoire au titre
de l'asile, le ministère de l'Intérieur semble vouloir
s'arroger le droit de décider seul qui est fondé à
obtenir une véritable protection en France. Cette pratique est
devenue extrêmement restrictive puisque des critères, non
prévus dans la loi française, pour l'examen d'une demande
de statut de réfugié, sont utilisés quotidiennement
en zone d'attente pour refuser l'admission sur le territoire. De cette
manière, le ministre de l'intérieur porte atteinte à
l'essence de la liberté fondamentale qu'est le droit d'asile.
Nous demandons à ce que M. Aldamov soit admis sur le territoire
français afin qu'il puisse entamer au plus vite les démarches
en vue de l'acquisition de la qualité de réfugié
par l'OFPRA, seul habilité à juger du bien fondé
de sa demande.
Paris, le 2 février 2003
Dernière mise à jour :
12-02-2003 18:54
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Cette page : https://www.gisti.org/
doc/actions/2003/anafe/tchetchene.html
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