COMMUNIQUÉ
LES AMIS DU BUS DES FEMMES CIMADE
GISTI LIGUE DES DROITS DE L'HOMME
12/02/2002 Nous apprenons
que la proposition de loi sur l'autorité parentale qui comporte
un amendement prévoyant la modification de l'article 35 quater
de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée est discutée
au Sénat ce jour.
Nous soulignons l'incohérence de ce texte au regard de la proposition
de loi relative à la lutte contre la traite humaine adoptée
par l'Assemblée Nationale le 24 janvier 2002.
L'amendement introduit dans la proposition de loi sur l'autorité
parentale vise à instituer la présence d'un administrateur
ad hoc auprès des mineurs étrangers isolés
maintenus en zone d'attente.
Critiqué à de nombreuses reprises par les associations,
cet amendement permettrait de maintenir ces mineurs dans un lieu de
privation de liberté et faciliterait, par l'apport de l'administrateur
ad hoc, le déroulement « normal »
des procédures de refoulement de ces mineurs vers le pays de
provenance. Il constituerait ainsi le plus sûr moyen de soustraire
ces mineurs en danger au dispositif français de protection de
l'enfance qui a pourtant vocation à leur être appliqué.
Comment le gouvernement peut-il proclamer dans le même temps
qu'il entend mener une politique de protection des victimes de la traite
humaine et proposer un dispositif renvoyant à la va-vite des
mineurs dans les mains des réseaux criminels ?
La réponse de la ministre de la Justice le 11 décembre
2001 à un député qui proposait que le procureur
de la République puisse saisir les juges des enfants et que le
droit commun de la protection de l'enfance soit appliqué est
symptomatique d'une mesure incompréhensible : « Appliquer
le droit commun de la protection de l'enfance à ces mineurs et
les admettre sans condition serait donner un signal très dangereux
aux trafiquants internationaux de toute espèce ».
La réalité est malheureusement totalement contraire à
cette déclaration !
Renvoyer les victimes dans leurs pays de provenance sans leur proposer
de protection appropriée fait le jeu des trafiquants, pour lesquels
le coût d'un ou plusieurs billets d'avion sera toujours inférieur
aux sommes que finiront par rapporter les personnes « trafiquées ».
Dans son rapport d'information, la Mission parlementaire d'information
sur les diverses formes d'esclavage moderne note qu'« une
jeune femme achetée 7000 dollars US par la filière
africaine pourra racheter sa liberté pour une somme variant entre
35 000 et 40 000 dollars ».
En cas d'interpellation, les proxénètes donnent à
leurs victimes la consigne de ne pas s'opposer à l'expulsion.
Car si des mesures de protection des victimes étaient mises en
place, ils perdraient la « marchandise » dans laquelle
ils ont investi.
Les associations, qui sont en contact quotidien avec la réalité
du trafic humain, déplorent que la politique française
à l'égard des étrangers mineurs isolés encourage
ainsi, par aveuglement ou par cynisme, la logique des trafiquants.
C'est pourquoi nous demandons aux Sénateurs de bien vouloir
avoir la sagesse de geler le vote sur cet amendement proposé
bien trop hâtivement.
Toute mesure législative ou réglementaire nouvelle destinée
à répondre aux problèmes des mineurs étrangers
isolés doit se construire prioritairement en conformité
avec les engagements internationaux pris par la France, avec le souci
de protéger les enfants, quelque soit leur nationalité
et avec la volonté de lutter efficacement contre la traite humaine.
Le 07/02/2002
Sur ce thème, voir aussi :
Dernière mise à jour :
21-10-2002 19:17
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