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ACTIONS COLLECTIVES
Pour une riposte
aux descentes de police inadmissibles dans les foyers
21/05/2002 Le mercredi 24 avril
vers 7h du matin, plusieurs voitures de police se sont garées
devant le foyer SOUNDIATA, 5, rue de la Petite Pierre, Paris 11ème
(entre les métros Charonne et Alexandre Dumas).
Armés d'une requête de justice datée du 11 mars
2002, un huissier, sa secrétaire, un serrurier, le commissaire
adjoint du 11ème arrondissement et une quinzaine de policiers
ont bloqué les résidents dans le foyer entre 7h et 11h30,
interdisant tout accès ou toute sortie, empêchant de nombreux
résidents d'aller travailler, de rentrer chez eux, et barrant
l'entrée du foyer aux amis ou sympathisants venus voir ce qui
se passait.
Ils ont procédé à une fouille complète
du foyer, relevant les identités (cartes de séjour ou
passeport) de tous ceux qui se trouvaient à l'intérieur,
notant les noms figurant sur la correspondance trouvée à
l'intérieur des chambres, cassant deux placards qui étaient
fermés à clef afin de fouiller l'intérieur. À
un moment donné la tension a monté entre les résidents
et un des policiers. Car les policiers n'étaient nullement mandatés
pour procéder à un contrôle, c'était le travail
de l'huissier. Leur tâche était simplement de « protéger »
celui-ci. Les délégués des résidents se
sont employés à calmer le jeu.
Cette fouille a provoqué la perte de plusieurs heures de travail
pour plusieurs résidents des foyers et constitue en soi une voie
de fait, une « séquestration en bande » selon
les termes de la loi. Et aussi une violation manifeste de domicile privé.
Revenons sur l'histoire du foyer. Géré par l'association
« Nouvelle Soundiata », le foyer est la propriété
de la société Habitat Social Français. Une rénovation
du foyer a eu lieu entre septembre 99 et la rentrée 2000.
La rénovation a été effectuée par la société
BOUYGUES. Certains résidents, ouvriers du bâtiment, se
sont étonnés de sa mauvaise qualité. Peinture appliquée
sans lessivage ni préparation, ventilations de la plus mauvaise
qualité tombant en panne au bout d'un mois, fuites apparaissant
aussitôt dans les douches et dans les chambres. Les résidents
se sont plaints auprès de leur gestionnaire qui, à son
tour, a tenté à plusieurs reprises, et sans succès,
d'organiser une rencontre avec le propriétaire et BOUYGUES qui,
d'autre part, n'a pas pris en charge convenablement le « service
après-vente » destiné à garantir pendant
un an la qualité des travaux après la réoccupation
des chambres. BOUYGUES, afin de se défaire de sa responsabilité,
a prétendu que la sur-occupation du foyer était responsable
des défaillances constatées. Dans la requête il
est écrit que 8 personnes occupent des chambres d'un ou
deux lits !!, alors qu'en réalité certaines chambres
seulement hébergent une ou deux personnes de plus. Face à
ces allégations, le propriétaire n'a rien trouvé
de mieux que de demander un contrôle généralisé,
que le juge du Tribunal d'Instance a accordé sans convoquer ni
écouter les intéressés (gestionnaire et résidents).
-
Nous sommes consternés que le Plan Quinquennal pour la rénovation
des foyers d'immigrés, doté de 1,8 milliard de
francs par l'État, et qui a tant de mal à avancer
(il vient d'être prolongé pour encore 5 ans et
au rythme de sa progression actuelle, il risque de ne pas avoir
terminé sa tâche au siècle prochain) soit détourné
de cette façon. Les foyers d'immigrés, laissés
dans l'abandon depuis 30, 40 ou 50 ans ont un besoin
urgent de réhabilitation et rénovation. Mais pas avec
un travail fait au plus bas prix. Et si la qualité des travaux
effectués à « Petite Pierre »
par BOUYGUES est un signe, il s'agit d'un gâchis. Qu'ils logent
en « foyers de travailleurs » ou en « résidences
sociales », les ouvriers immigrés ont droit à
un logement collectif de qualité !
-
La sur-occupation des foyers est un véritable problème,
mais sa solution ne passe pas par des interventions policières
intimidantes et provocatrices, entraînant des abus de droit
et le risque de violences inutiles. La cause de la sur-occupation
est le manque d'offre de logements sociaux près des grands
bassins d'emploi, et surtout à Paris et dans ses environs.
Sur cette question les divers gouvernements (de droite ou de gauche)
ont largement désinvesti le logement social depuis les années 70.
Ils ont augmenté les facteurs de blocage par la décentralisation,
et n'ont jamais eu le courage politique d'impulser une véritable
politique volontariste de construction. En plus, sachant que les
résidents des foyers n'ont aucune chance d'accès à
un HLM, que les sociétés d'HLM refusent la colocation,
que les divers gouvernements refusent de construire de nouveaux
foyers d'immigrés, considérés comme des « freins »
à l'intégration, les responsables politiques contraignent
les gens à vivre en sur-occupation, dans des locaux mal entretenus
et tenus à l'écart du droit commun du logement. Est-ce
ainsi qu'on encourage « l'intégration »
?
-
L'intervention policière et la surdité du propriétaire
et du constructeur ont perturbé un processus de dialogue
et de concertation qui était déjà entamé
à propos de la sur-occupation. Avant la rénovation
du foyer, avait été mis en place un « comité
de pilotage » (mairie, préfecture, résidents,
gestionnaire et propriétaire) où la question de la
sur-occupation avait été largement discutée.
La Soundiata est en discussion continue avec le Comité de
Résidents et, ensemble, ils avaient trouvé un manière
de gérer le problème par la rotation des lits laissés
vides par les résidents partis en vacances, l'ensemble des
résidents payant les surcoûts générés.
Le propriétaire de l'immeuble, la société
BOUYGUES, le commissariat du 11ème arrondissement, ont tous
fait abstraction de l'existence du Comité de Résidents
du foyer, qui devrait pourtant être un partenaire incontournable
lors de toute intervention dans la vie des résidents d'un
foyer.
-
Cette fouille policière fait suite à une série
d'autres interventions, en général demandées
par les sociétés gestionnaires (AFTAM Vitry
Concorde, ADEF Poissy, Amandiers, Créteil, Reginaldo
etc. etc.) toutes provoquées par le même motif :
le contrôle de la sur-occupation. Elle intervient en plus
entre les deux tours de l'élection présidentielle,
dans une conjoncture qui risque de devenir plus difficile pour les
travailleurs immigrés (perspectives d'un gouvernement de
droite sécuritaire avec risque de renforcement des mesures
anti-immigrés, anti-réfugiés). Cette intervention
est d'autant plus inacceptable qu'elle sonne comme un rappel des
vieilles méthodes autoritaires qui maintenaient la population
immigrée hors de l'État de droit, au moment où
quelques progrès dans le dialogue et la concertation autour
des foyers semblaient enfin se dessiner.
Propositions
-
Nous demandons l'arrêt immédiat des interventions
policières dans les foyers. La sur-occupation est un problème
complexe, et le résultat de plusieurs blocages de la société
française ; elle doit être traitée par
la recherche partenariale de solutions pratiques et effectives.
Le caractère de domicile privé d'une chambre de
foyer comme de résidence sociale doit être reconnu
par le législateur et par la justice.
-
Nous demandons une politique volontariste de la part des gouvernements
responsables (mairies d'arrondissement, maire de Paris, gouvernement)
visant à relancer la construction ou la création du
logement social dans toutes ses formes afin de permettre, entre
autres, le logement correct des familles immigrées, et le
desserrement des résidents des foyers d'immigrés dans
de bonnes conditions.
- Nous proposons d'organiser une fête des foyers du 11ème
arrondissement, l'après-midi et la soirée du samedi
22 juin, mettant en avant les apports positifs de la population
africaine à la vie de la ville (cuisines collectives, musique,
solidarité intergénérationnelle et communautaire,
associations de développement des villages de l'Afrique de
l'ouest. etc.).
Toutes les associations ou organisations qui souhaitent signer ce
papier et/ou participer à l'organisation de la fête sont
les bienvenues.
Réunion d'organisation : mercredi 22 mai
à 19h
5, rue de la Petite Pierre, Paris 11ème sous-sol
(métro Charonne ou Alexandre Dumas)
Premiers signataires :
Comité de Résidents du foyer de la Petite Pierre,
Attac Paris 12ème, Autre Monde, CASAR (Comité Albigeois
de Solidarité avec les Réfugiés), Copaf, Gisti,
DAL, FTCR (Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté
des deux Rives), l'ODU (Observatoire du droit des usagers)
Dernière mise à jour :
21-05-2002 18:05
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Cette page : https://www.gisti.org/
doc/actions/2002/foyers/index.html
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